"CLUTCH, c'est toujours pareil !"

CLUTCH fait partie de ces groupes qui ont développé un son signature immédiatement reconnaissable. Ce qui pourrait faire penser aux mauvaises langues un peu obtuses que tous les disques se ressemblent. Certes, les onze galettes du combo de Germantown ont une parenté qu'on ne peut démentir, mais elle repose sur des recettes communes proposées dans un habit différent à chaque itération. Leur onzième méfait, Psychic Warfare ne déroge pas à la règle. C'est du CLUTCH pur jus ! Un Heavy Rock aux influences Southern avec une once de Blues du Delta et un groove de malade mental. CLUTCH, c'est le genre de groupe qui met des gros pains dans la gueule. Le genre qui donne envie de monter le son au max et de danser dans le bus, sur la table de la salle à manger ou au bureau. CLUTCH, c'est l'illustration parfaite de ce qu'on appelle une musique organique. C'est à dire une musique primale, naturelle, spontanée, facile d'accès et hautement émotionnelle. Des riffs plus rentre dedans qu'un marteau piqueur ("Our Lady of Electric Light", "Noble Savage"), une noirceur à fleur de peau contrebalancée par une sorte de bonne humeur candide, des soli bien placés où le Southern explose en motifs superposés ("Noble Savage", "A quick Death in Texas"), une batterie bien sèche, rapide et nerveuse et, signature ultime, le chant caractéristique de Neil Fallon, colosse enragé qui semble tout donner dans chaque prestation comme si c'était la dernière. C'est bien simple, toutes les pistes de Psychic Warfare sont une petite apothéose.

A n'en pas douter, l'une des raison de cette sonorité rémanente c'est la pérennité du combo. Car cela fait maintenant 25 ans que Neil Fallon (chant, guitare), Tim Sult (guitare), Don Maines (basse) et Jean-Paul Gaster (batterie) jouent du CLUTCH. Et comme nos quatre compères aiment les histoires qui durent, ils ont à nouveau confié la console à Machine, le producteur qui avait travaillé sur Pure Rock Foly (2001), Blast Tyran (2004) et Earth Rocker (2013). Avec Machine, on va droit à l'essentiel, 12 titres pour 40 minutes, des morceaux ramassés autour de 3 minutes 30. Du direct, du pas bavard, de l'efficace, à l'instar de la puissante triplette d'ouverture qui envoie toute la puissance d'un troupeau de bisons, histoire de bien marquer le territoire.

CLUTCH n'est pas de la musique pour se prendre la tête et Psychic Warfare n'est pas un album à message. Mais le gang fait les choses bien. Le titre fait référence à l'oeuvre du romancier américain Philip K. Dick (la guerre psychique). Sans parler de concept album, le disque est un album avec un concept porté par une petite intro parlée où Neil Fallon campe un privé de série B se préparant à un interrogatoire et par une outro du même acabit pour clôturer le dernier morceau. Entre les deux, chaque chanson est construite comme une petite histoire avec un début et une fin, des textes bien léchés qu'on prend plaisir à découvrir, un plaisir au moins aussi grand que celui prodigué par la musique du quatuor.

L'ouverture du disque est sans pitié. Choc frontal de grande amplitude quand l'auditeur se mange dans les gencives "X-Ray Vision", histoire complètement barrée suant le Philip K. Dick par toutes les rimes à base de manipulation mentale et de confession paranoïaque. Le morceau met déjà la barre assez haut dans la pêche communicative, mais alors qu'on pense avoir quelques secondes pour récupérer avant la prochaine baffe, la musique se poursuit sans transitions dans un fondu enchaîné d'une justesse rare débouchant sur "Firebirds !", une chanson tout aussi puissante et dévastatrice, avec son bon gros riff autoroute, ses roulements de batterie qui en jettent et Neil qui enchaîne avec des lyrics tout aussi barrés. Le rythme se ralentit enfin un peu sur "A quick death in Texas" qui démarre avec une petite intro bien Southern se développant sur une mélodie plus posée. Juste le temps de ramasser ses dents avant d'enchaîner sur des morceaux soufflant le chaud et le tiède. La température ne descend jamais bien bas chez CLUTCH et on les remercie de nous proposer des albums aussi chauds bouillants que leurs live.

Psychic Warfare est une nouvelle démonstration de la puissance de frappe du combo de Germantown, un album parfait pour se réchauffer au coeur de l'hiver.