WATCHTOWER (usa) - Control And Resistance (1989)
Label : Noise Records
Sortie du Scud : 2 octobre 1989
Pays : USA
Genre : Thrash Metal Progressif
Type : Album
Playtime : 8 Titres - 43 Mins
Après avoir touché à l’excellence, avec GAMMACIDE et RECIPIENTS OF DEATH, nous allons toucher là au divin. N’ayons pas peur des mots, WATCHTOWER sur cet album est à ranger du côté d’ATHEIST ou de CYNIC, bien au chaud dans le panthéon des artistes intouchables, touchés par la grâce à un moment donné de leur carrière. WATCHTOWER, c’est qui ? Ben beaucoup de monde en fait, la stabilité de leur line-up n’a jamais été leur point fort, la faute à un style musical très hermétique. Le jazz thrash progressif, et ça n’est pas une blague. On a retrouvé sur le premier album, un certain JASON McMASTER au chant, qui plus tard sèchera les cours pour aller traîner sur les bancs du troquet glam DANGEROUS TOYS. Sur l’album concerné, RON JARZOMBEK est à la guitare, transfuge de S.A SLAYER, autre groupe méconnu, mais moins recommandable.
Les critiques à l’époque, ne comprirent pas ce qui leur arrivait. Dans une ère troublée par l’opulence orgiaque de productions made in TAMPA, atterrit cet ovni musical, plein de finesse et d’intelligence, qui détonne sévère au milieu du gros bourrin qui tache. Et pourtant, il pourrait s’agir du meilleur album de Thrash de tous les temps. Je m’explique.
Le Thrash est mort de n’avoir pas su évoluer, ou d’avoir mal combiné ses sonorités de base avec une influence extérieure. Le Thrashcore par exemple, était beaucoup trop réducteur pour intéresser les masses. Le Thrash-funk est arrivé trop tard. Le Thrash lyrique n’a eu quand a lui, qu’un seul représentant, CELTIC FROST, groupe maudit. WATCHTOWER, c’est le meilleur du Thrash, joué par des jazzmen en furie. Ils renvoient à eux seuls 99% des musiciens du cru a leurs chères études classiques. Oui, du Thrash-jazz messieurs dames, c’est possible, et c’est magnifique. Des le morceau d’ouverture, le plus atypique, le ton est donné. « Intruments Of Random Murder », fout les jetons, parce qu’on se demande pourquoi personne n’a fait ça avant (à part MEKONG DELTA, je vous l’accorde, mais pas poussé à ce point), et surtout si les musiciens viennent bien de la même planète que nous. Alan TECCHIO, on connaît. Il nous avait déjà prodigué ses sages conseils techno dans HADES (dont le If At First You Don’t Succeed est une pure merveille, mais j’y reviendrai…), et repartira plus tard former NON FICTION, auteur d’un In The Known époustouflant. Mais les autres on découvre ! Et la, c’est la claque. « The Eldritch », deuxième morceau, est ce qui pourrait se rapprocher le plus du Thrash classique. Mais dès « Mayday In Kiev », et son intro basse/batterie syncopée, sa rythmique bancale en ternaire, sans compter sa montée en sextolets, on sait qu’on est dans une autre dimension. Ces gens la ne composent pas, ils cisèlent des pierres précieuses que seule l’oreille éduquée peut saisir dans toute sa beauté. Car le binaire si cher à la Bay Area ou à la Germanie profonde, ici on ne connaît pas. Et c’est encore plus tangible sur « The Fall Of Reason », bijou de mélodie pure, mélange de patterns rythmiques en ¾ ou 5/4, noyant l’auditeur sous des flots d’incertitudes, le poussant à se demander en lui-même : « Et si je n’avais rien compris ? ». Et ça continue. « Control And Resistance » vous achève par sa toile tissée de notes que même un VAN GOGH de la six-cordes ne saurait embellir. Tout cela, en conservant un riff thématique facilement mémorisable. Possible ? Possible ! « Hidden Instincts » muscle un peu le propos, et sonne presque hardcore par rapport au reste, mais hardcore dans un langage WATCHTOWER, ça signifie 145 changements de rythme au lieu de 500. Puis on se dit qu’en approchant de la fin, les meilleures cartouches ont été tirées. Mais pas du tout. Car voila « Life Cycles ». Et là, on pige. RUSH !!! Mais bien sur, si RUSH s’était décidé à durcir le propos et à pousser sa technique à bloc, il aurait enregistré un album de cette trempe. Les changements d’atmosphère, le brio des musiciens, le don inné pour la mélodie, tout vient de là ! Et Control And Resistance de finir sur le titre le plus ancien, « Dangerous Toy » (tu l’as dit JASON !!), qui ferait passer ATHEIST pour une réunion de vieux bluesmen asthmatiques. Ca louche dur vers UZEB, le bassiste envoyant ses derniers complexes d’infériorité au placard, et le batteur décidant décidemment que jouer sur 20 toms, c’est plus drôle que 5. Alors vous l’aurez compris. C’est clair maintenant. CORONER, ATHEIST, MEKONG DELTA, VOÏVOD. Et maintenant WATCHTOWER. Les thrashers n’aiment pas les bons musiciens. Ni la mélodie, ni l’originalité. Ils ont préféré laisser crever ces groupes qu’ils ne comprenaient pas que de faire l’effort de les analyser. Peut être par peur. Peut être par mépris. Sinon comment expliquer que SODOM ou KREATOR soient toujours là 20 ans après alors que ceux là soient morts et enterrés depuis trop longtemps. Et à peine, voire pas du tout réédités.
L’histoire est mal faite. Elle se répète. Elle bafouille. Peu importe. « Plus une chose est difficile, plus elle exige d'art et de vertu. » disait ARISTOTE. Il devait écouter WATCHTOWER, c’est certain.
Ajouté : Mardi 24 Octobre 2006 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Hits: 20461
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