Lorsque le – tristement – célèbre dictateur roumain Nicolae Ceaucescu fut exécuté en 1989, les habitants de Bucarest défilèrent dans les rues en scandant à l'unisson : « Drakula est mort ! Drakula est mort ! » Quel rapport entre les deux vous demandez-vous ? Dans un pays où a régné pendant de nombreuses années une dictature qui a laissé le peuple sans ressources vitales, il est normal que celui-ci considère le fautif comme un vampire. C'est dans ce climat propice à la résurgence des anciennes croyances populaires et du mythe du vampire que prend forme l'histoire de ce premier tome d'Aurélia...
Philip Mac Namara est un écossais en voyage sur les terres de Vlad Drakula. Au court de ses pérégrinations, il rencontre Aurélia, une jeune étudiante dont les origines tsiganes accentuent le côté mystérieux qui émane d'elle. Ensembles, ils partent sur les traces du célèbre Prince Dragon. Un périple qui les conduit des ruines de l'ancienne forteresse d'Arefu au palais touristique de Bran, en passant par le petit village de Sighisoara où l'on peut visiter la maison natale de Vlad... Mais ces hauts lieux touristiques ne seraient rien sans la dimension fantastique qui va de paire... Ainsi, les deux jeunes gens tombent nez à nez sur un loup qui pourrait être mi-homme mi-loup... Et cet étrange propriétaire de discothèque ne serait-il pas un vampire descendant de la lignée du Dragon ? Quant à ce professeur, Egon Radu, qui semble les suivre, est-il un ami ou un ennemi ? Autant de mystères qui s'épaississent au fil de l'histoire et qui paraissent avoir comme point convergent la belle Aurélia...
Le réveil d'une malédiction est le premier tome de la saga Aurélia servit par un trio plutôt bien inspiré. JM Beurq, en étroite collaboration avec Bruno Lapeyre qui est à l'origine de la légende d'Aurélia, nous concocte une nouvelle version de l'histoire du Prince des Carpates. Rythmée, parfois confuse (mais à l'image des idées du héros écossais qui s'entrechoquent dans sa tête au fil de l'aventure), l'intrigue pose tour à tour les protagonistes sur l'échiquier, nous révélant très partiellement leur but qui n'est peut-être pas celui que l'on veut nous faire croire... Car – et c'est en cela que ce premier opus est captivant – nous ne savons pas réellement où veulent nous mener les auteurs. Par ailleurs, on sent comme une légère dénonciation du tourisme « vampirique » qui se fait en Roumanie, attirant ainsi énormément d'occidentaux aisés... Un tourisme factice qui se joue des croyances ancestrales ? Un message subtilement glissé au détour des pages... Guillaume Berteloot est celui qui fut chargé de mettre en images ce scénario. Tâche dont il s'acquitte honorablement ! Au premier abord, le trait peut surprendre. On retrouve en effet l'atmosphère, le tracé et la mise en page des bandes dessinées qui se faisaient il y a plus d'une dizaine d'années. Loin de ce qui se fait actuellement. J'ai eu une vive impression de retour en arrière ! Peut-être est-ce la raison de ce choix de la part des scénaristes ? En tout les cas, le dessin s'accorde parfaitement à l'histoire et le choix des couleurs, ternes limite « passées » par l'âge, favorise l'immersion dans ce premier tome. Et si vous désirez vous plonger un peu mieux dans cet opus, écoutez l'album The Nephilim de FIELDS OF THE NEPHILIM ; la voix grave et puissante du chanteur ainsi que les arpèges aériens appuyés par une ambiance éthérée achèveront de vous transporter sur les traces d'Aurélia et du Prince des Vampires...<br< Un premier volet à découvrir sans a priori, dans l'attente d'une suite qui promet d'être ensorcelante...