JE TUE DONC JE SUIS : Ecrits et Dessins de Serial Killers (2009)
Auteur : Nicolas Castelaux
Langue : Français
Parution : 1er Décembre 2009
Maison d'édition : Camion Noir
Nombre de pages : 352
Genre : Plongée Dans L’horreur
Dimension : 15 x 21 cm
ISBN-10 : 2357790326
ISBN-13 : 9782357790322
Il y a plusieurs formes de lecture. Celle qui détend et permet de s’évader. Celle qui permet de se créer un personnage à part et d’oublier un instant sa condition de mortel.
Et il y a aussi celle qui vous fait plonger dans les entrailles de l’enfer. Pas celui de Dante, non, l’enfer terrestre, bien réel, sans porte de sortie à dessiner à la craie comme dans le Labyrinthe de Pan.
Car ici, les créatures ne sont pas imaginaires, elles sont de chair et de sang, rouge comme celui qu’elles ont répandu à travers les époques. De vraies bêtes sauvages, enfermées dans des cages dont la plupart ne sortiront jamais, si ce n’est dans une jolie boîte rectangulaire qui sera leur dernière demeure.
Le mythe des Serial Killer a toujours été source de fascination pour les écrivains, les cinéastes, les musiciens, spécialement ceux des scènes Black et Death Metal de Norvège et de Floride.
On ne compte plus les morceaux ou albums composés à la gloire des tueurs sanguinaires, du simple et vague « Serial Killer » de VIO-LENCE, jusqu’à l’album Dahmer de MACABRE, en passant par l’inspiration plus diluée dans le satanisme de combos tels DARKTHRONE ou MORBID.
Mais tout ceci s’apparentant plus à un Barnum uniquement destiné à illustrer d’images violentes une musique qui l’est tout autant, il convient d’approcher la légende de manière plus pragmatique pour pouvoir cerner au mieux tout le mal qui peut s’emparer du cerveau dérangé d’un Serial Killer.
Et la force de l’ouvrage de Nicolas CASTELAUX - célèbre peintre et illustrateur dont on peut trouver les œuvres sur le très célèbre Serial Killer Calendar aux USA – c’est de laisser la parole à ceux mêmes qui ont infligé les pires souffrances à leurs victimes, innocentes ou non selon le point de vue.
Fasciné par le versant le plus sombre de l’humanité, Nicolas a passé des années à établir un réseau de correspondance avec les tueurs en série encore à l’ombre des barreaux d’institutions pénitentiaires aussi tendres que St Quentin, si bien chanté par Johnny CASH, ou encore l’univers carcéral de Floride, un des plus durs que l’on puisse trouver.
Il nous livre ici les morceaux choisis les plus révélateurs (NDR : l’image est sciemment choisie !) des échanges épistolaires qu’il a entretenus avec des individus comme Issei SAGAWA, « Le Japonais Cannibale », Bobby Joe LONG, « Le violeur des petites annonces » ou encore David GORE, qui mérite bien son nom et n’a pas besoin de sobriquet tapageur.
Il complète son ouvrage d’extraits de mémoires, de lettres aux fans, de poèmes rédigés en prison, de courriers envoyés à la Police, la Presse, ou laissés bien en vue près d’un cadavre à titre d’avertissement, comme ceux du fameux B.T.K (Bind, Torture, Kill, Ligote, Torture et Tue, surnom que se donnait Dennis RADER) ou du Zodiac, seul tueur en série avec Jack L’Eventreur à toujours être en liberté.
On retrouve aussi parmi ce panel de gens charmants, Bard « Faust » EITHUN, ex batteur d’EMPEROR, qui massacra un homosexuel dans un parc de LILLEHAMMER, petite contribution « Métal » au cercle très fermé des tueurs en série (bien que Eithun n’ait commis qu’un seul meurtre, ce qui ne permet donc pas de le classer dans la même catégorie qu’un Bundy ou qu’un Gacy).
Avant d’aller plus loin, posons déjà des jalons. Ce livre n’est pas à mettre entre toutes les mains. La lecture de certains passages, dont la lettre d’Albert FISH (auquel MACABRE a bien sur consacré une chanson…) à la mère d’une de ses petites victimes, mais aussi le calvaire de 48 heures d’une victime de David GORE sont des passages dont on ne sort pas indemne. Il faut bien connaître l’univers si particulier de ces marginaux de la morale pour pouvoir entreprendre une lecture au premier degré. Car c’est de cela dont il s’agit, de premier degré. Rien n’est romancé ici, peut être certains détails sont ils exagérés par leurs auteurs pour assurer à leurs lecteurs un maximum de sensations, mais le fond reste désespérément réel…
Inutile de cherche la moindre trace de rhétorique soutenue, encore mois la manipulation subtile de métaphores. Tout est livré cru, sans pitié ni empathie.
Des premières sources, nous arrivons à remonter petit à petit les méandres des rivières menant dans l’antichambre de la folie. Grâce à cette collection de textes bruts, nous parvenons à entrer un peu plus dans le cerveau de ces monstres, sans pour autant parvenir à les comprendre. Nous pouvons tout juste toucher du doigt le processus qui les mène à accomplir de tels actes de barbarie, sans éprouver ni remords, ni compassion.
Et ce sont peut être ces témoignages là qui sont les plus dérangeants et les plus précieux. Parce que jusqu’au bout, certains assument leur fonction de destructeurs de l’humanité, sans peur de l’exécution ni de l’emprisonnement à vie. En témoignent leurs essais graphiques, souvent maladroits, mais terriblement concrets, dont le caractère grotesque ne fait jamais rire, bien au contraire.
Tous ces documents font de ce livre un document indispensable, car pur, malgré la censure exercée parfois par les instances judiciaires.
Nicolas, je vais donc m’adresser à toi, qui me ressemble un peu dans ta quête d’absolu. J’aurais aimé comme toi ouvrir ces lettres, découvrir de mes yeux ces mots couchés sur papier pour l’éternité. Car comme toi, je suis fasciné par l’horreur de la vie quotidienne. Par ceux qui ont refusé les us et coutumes de la société pour vivre à leur façon, sans crainte du jugement d’autrui, ou de Dieu.
La morale est telle qu’on la conçoit. Elle est là où on la place.
Certains te condamneront pour avoir osé livrer ces écrits sur la place publique, comme on châtiait les alchimistes, les scientifiques, les « sorcières », les hérétiques.
Ton seul tort est de nous avoir montré le monde tel qu’il est. Peuplé de samaritains et de bourreaux. Peuplé de victimes et de prédateurs.
Comme toi, je n’excuse pas le geste, mais j’accepte les mots.
Et pour finir, tu me permettras de citer Gerard Schaefer, « Le Boucher de Blind Creek » :
« Vous vous gavez de violence : de meurtre, de guerre, d’exécutions, de toutes sortes de désastres. Votre télé et vos films s’en repaissent. Vous réclamez des gros plans sur des meurtres, des vrais. Et vous oseriez me critiquer ? »
C’est aussi ce que tu pourras leur répondre.
Ajouté : Mercredi 12 Mai 2010 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Camion Noir Website Hits: 55916
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