Encore un livre sur Charles MANSON ? Encore une énième étude comportementale et sociale sur l’impact du plus fameux « Tueur en série » encore sous les barreaux ? Quel intérêt ?
Que nenni, vous faites fausse route, car le propos ici n’est pas de livrer une nouvelle version sur les meurtres de Cielo Drive ou sur la tristement célèbre Family, mais bien d’étudier l’impact qu’ont pu avoir la personnalité, le charisme et la musique de MANSON sur le monde du Rock et assimilé post 70’s.
Et à ce titre, cet ouvrage se révèle diaboliquement bien construit. Et par pitié, prenez le nombre de pages comme un gimmick s’il vous plait, sous peine de passer à côté de l’essentiel.
Les théories sur notre barbu préféré n’ont pas manqué ces 40 dernières années. Et les auteurs n’en ont cure. Ils se contentent de brosser dans la première partie un récit des faits tels qu’ils sont censés s’être déroulés à l’époque. Peu importe les versions, peu importe la débâcle, il faut planter le décor. De cette portion de livre, vous n’apprendrez rien de plus sur Charlie, car les auteurs ont bien pris soin de garder le recul nécessaire pour rester objectif. Il y avait des filles, des chansons, du désert, une profonde misanthropie, et une dévotion quasi palpable. Nous n’avons pas connu les sixties, alors peu importe de savoir si oui ou non, ces meurtres horribles ont non seulement emporté des vies innocentes, mais aussi les espoirs d’une décennie d’amour, de fleurs, et de drogues bon marché. Savoir si Manson a bien tué les sixties n’est pas le propos ici.
Le but de cet ouvrage est donc de recenser et d’expliquer, souvent par les propos mêmes des principaux intéressés, toute l’influence qu’a pu avoir Charles Manson sur de très nombreux musiciens, des années après le carnage.
Et bien évidemment, à la lecture des nombreux chapitres consacrés aux artistes et aux groupes qui ont un jour été plus ou moins influencés par ce petit bonhomme débonnaire, on constate souvent qu’ils se situent dans une frange assez extrême…
De l’industriel au Metal en passant par le Gothique, le Hard Core ou l’EBM, les combos ayant intégré des éléments découlant du plus célèbres des non tueurs en série sont légion.
Mais les auteurs, loin d’être dupes, différencient bien les simples trublions et provocateurs profitant d’une imagerie sulfureuse pour vendre plus de disques ou attirer l’attention (lire pour ceci les lignes consacrés à GUNS’N ROSES, c’est franchement drôle…), et les groupes sincères dans leur démarche, et réellement fascinés par le monde de la Family et de son leader emblématique. Et si l’on retrouve pèle mêle des noms tels que Michael Moynihan (Déjà auteur des « Seigneurs Du Chaos », traité sur ce site) de BLOOD AXIS, Lydia Lunch, Monte CONNER, Throbbing GRISTLE ou SONIC YOUTH, pour la facette la plus expérimentale, il n’y a rien d’étonnant pour qui connaît un peu leur univers.
On est déjà plus surpris de voir figurer dans ces pages Henri ROLLINS, qui a même correspondu avec Charles, Phil ANSELMO, DEICIDE et DECAPITATED. Nos figures de proue métalliques ont aussi intégré, à l’occasion ou à de multiples reprises des références plus ou moins directes à MANSON dans leurs textes, voire dans leur musique par l’utilisation de samples, tirés du « procès » de la Family ou bien d’émissions et de films.
En ce sens, cet ouvrage est particulièrement passionnant, d’une part par sa construction habile, mais aussi de part son mélange entre analyse pure mais non dénué d’ironie et de détachement, et interventions directes des principaux concernés.
Et il apparaît que si certains sont parfaitement sincères, qu’ils soient purement naïfs ou vraiment investis, d’autres se contentent d’exploiter un filon de la provocation qu’on croyait complètement usé jusqu’à la corde.
Et on ressort de cette lecture en éprouvant une profonde sympathie pour un petit mec barbu, qui n’a pas eu une vie facile, et dont le seul désir était de réussir dans le monde de la musique. On en oublierait presque que de part son influence, des meurtres abominables ont été commis (tout du moins dans la version officielle, lire pour cela le chapitre consacré à la version officieuse des assassinats…).
Mais ce qui m’a le plus amusé, c’est de constater que MANSON continue de fasciner et d’influencer bon nombres d’artistes, grâce au peu de musique qu’il a pu produire, et à ses frasques.
Charles MANSON a eu sa revanche sur le Show Business par procuration. Il est bien devenu une star, comme il en avait toujours rêvé.
Putain, j’espère qu’il se marre bien du fond de sa cellule…