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KORN (usa) - The Serenity Of Suffering (2016)






Label : Roadrunner Records
Sortie du Scud : 21 octobre 2016
Pays : Etats-Unis
Genre : Neo Metal
Type : Album
Playtime : 13 Titres - 49 Mins





"This place inside my mind, a place I like to hide, you don't know the chances. What if I should die?!"

Oui Jonathan s'est souvent caché dans les méandres de sa psyché, et oui, il a souvent dû se poser la question de l'existence de son groupe. KORN fut tout d'abord Korn, puis un leader, avant de rencontrer des problèmes, puis de devenir intouchable, de se regarder dans le miroir et de nous y voir de l'autre côté, d'oublier son nom avant de se rappeler qui il était sur la route de la globalité.
Une route qui fut très longue, difficile à gérer, comme tous les artistes pouvant se prévaloir d'avoir inventé un style à eux seuls. Appelez-le comme vous voulez, Néo, Adidas Metal, Nu Metal, après tout, peu importe l'emballage pourvu que l'ivresse soit à l'intérieur du flacon, petit génie malfaisant ou pas. On le sait, depuis The Paradigm Shift qui célébrait discrètement le retour dans le giron de Brian "Head" Welch, la raison semblait prendre le pas sur l'expérimentation, mais le corps était encore légèrement dans le coma, pas vraiment réveillé, mais plus non plus immergé dans une sorte de léthargie obsessionnelle pour la déviation qui avait entraîné les fans à pointer du doigt les accointances avec Skrillex.

En dehors de ces considérations, le monstre se relevait, pas fier, mais campé sur l'une de ses jambes. On attendait tous de le voir relever la tête, pour lire dans son regard les certitudes qu'on n'attendait plus depuis Issues ou Untouchables. Et les questions n'étaient plus de savoir si KORN était capable de nous étonner encore, mais juste de savoir s'il était en mesure de faire à nouveau du...KORN.
Alors Nick Raskulinecz a pris les potards en main en lieu et place de Don Gilmore, et s'est posé les bonnes interrogations. D'abord, où était donc passée la basse de Fieldy ? Enterrée dans le mix ou dans un passé que le quintette presque reconstitué ne parvenait plus à exhumer ? Les fréquences se mirent à onduler, et les cordes graves retrouvèrent leur place. Parce qu'il ne fallait pas rater ce "vrai" retour, puisque que le groupe avait promis des choses, et qu'il avait déclaré haut et fort que The Serenity Of Suffering serait :

"Plus Heavy que tout ce que les gens ont pu entendre de nous depuis très longtemps"

On ne plastronne pas de cette façon sans arguments, sous peine de passer pour des cons. Et Jon, Fieldy, Head, Munky, et Ray par extension sont tous sauf de gentils abrutis vivant sur une planète isolée. Ils ont un jour hurlé sur un séminal premier album qui imposait leur patte, leur son, et la douleur d'un chanteur qui s'il continue de puiser dans sa souffrance d'enfance la matière à vociférer sa haine, a au moins appris à la canaliser et la restituer de façon...impressionnante. Premier constat, il est certain que Davis n'a jamais chanté comme ça auparavant. Ses intonations sont rauques, profondes, et dignes d'un vocaliste de Death Metal qui aurait appris à faire la différence entre dégueulis comique et raclage typique de ce qu'on attend d'un gosier usé par le temps et les épreuves. Mis à part ça ? Des nouvelles du front ? Il est haut mais classique, et c'est peut être ça la surprise. D'ailleurs, le sacro-saint Rolling Stone Magazine ne s'y est pas trompé en qualifiant ce douzième album de "ridiculement Heavy" . C'est exactement ce qu'il est, et nous ramène de fait à l'époque charnière entre Issues et Untouchables. D'ailleurs, le clin d'œil est patent jusqu'à la pochette signée Ron English, qui à la manière d'un Derek Riggs sur la cover de Somewhere In Time de MAIDEN a semé des indices graphiques. Drôle ? En quelque sorte, mais rassurant, et honnête.

"[La tournée avec SLIPKNOT]...a rallumé quelque chose chez nous, et nous a rappelé des souvenirs. Ça nous a rappelé ce que KORN était. Je pense que tout ça est un voyage, et ce voyage nous a ramené aux temps où KORN jouait des choses plus Heavy"

Brian le dit, mais il le sait, et vous aussi, vous vous en rendrez compte. Vous le savez probablement déjà, puisque comme tous les fans et les curieux, vous avez découvert en amont les trois morceaux lâchés en avant-première et en vidéo pour annoncer le retour des géants.

Vous avez donc déjà écouté "Insane", "Rotting In Vain" et "A Different World", ce fameux duo avec Corey "Stone Sour" Taylor. Duo anecdotique d'ailleurs, et loin de restituer l'ambiance globale de cet album fatal. Sorte de crossover un peu simpliste des univers de KORN et de STONE SOUR, c'est de très loin un des points du talon d'Achille de l'album qui pourtant à les chevilles solides. Mais le mélange des voix ne produisant aucune magie particulière, et la direction du morceau étant plus que classique, on peut définitivement le ranger du côté des "plaisirs coupables", malgré une fin digne d'un leftover de SLIPKNOT période All Hope Is Gone. "Insane" et sa vidéo vintage magnifique est une entrée en matière au moins à moitié aussi tonitruante et convaincante que "Blind", avec un Davis au somment de sa forme vocale, et un des riffs les plus sourds et lourds de la carrière du groupe.

Quant à "Rotting In Vain", il fut single idéal pour des bandes sons cauchemardesques avec lesquelles on s'endormait à la sombre époque d'Issues. Mélodie certes facile, phrasé coulé, mais on y retrouve se scat insensé de John qui s'était tu il y a longtemps faute de rythmique à imposer. Une assurance ? Oui, quelque part, celle de pouvoir enfin reconnaître l'hydre sans avoir à la décapiter.

«Nous écrivions sur des ordinateurs depuis un moment. Mais Nick est arrivé et nous a dit, "Non, pas d'ordinateurs, vous allez juste jammer, on va faire ça à l'ancienne, comme un vrai groupe". Et moi je me disais qu'il devait dégager, que la tâche était trop dure. Mais finalement, en écoutant l'album, tu peux vraiment sentir qu'on a travaillé dur. Ça s'entend vraiment qu'on a joué comme un groupe".

Sérénité dans la douleur ? Travail de groupe ? Thérapie ? Pour un Jonathan qui se sent soulagé de souffrir, c'est un groupe uni que nous retrouvons, sur les instants les moins évidents de ce disque qui finit par surprendre là où on ne l'attend pas.
Sur "Need In Line" par exemple, bien que truffé de ces arrangements électroniques que le trio de base adore depuis trop longtemps. Morceau qui propose l'archétype de ce qu'on est en droit d'attendre d'un vrai combo de "Néo Metal", et dit sans avoir de haut le cœur s'il vous plaît. Un chant plus apaisé, un refrain catchy qui prend la tête dans le bon sens, et la retourne façon l'Exorciste sur des passages rappés bien ficelés.
Sur "Please Come For Me", qui suit plus ou moins le même chemin loin de la falaise, et qui se repaît d'un déhanchement funky brillant comme les paillettes des anciens survêtements de Jon. Encore des gimmicks électro, un Ray qui s'amuse beaucoup sur ses toms avant de se la jouer boîte à rythme sur les couplets, moins de trois minutes, et pourtant, une éternité de joie dans les oreilles.

Cette éternité ramasse les cailloux semés sur la route avec un "Take Me" qu'on croirait presque composé il y a quinze ans, malgré ses inserts inutiles de "Yo" très futiles. Mais cette syncope, ce refrain smooth qui présente le KORN le plus adaptable, et ces riffs dans les interstices entre la lumière du soleil et les ténèbres de l'aube pas encore née, font de ce morceaux un des pivots de l'album, avec en prime de fidélité des "Go !" rageurs poussées par un Davis fiévreux.

Plus long et plus torturé, "The Hating" lui aussi louche dans le rétroviseur, sans lâcher la pédale pour autant. Et après une intro subtile et minutieuse, les plus énormes guitares que le groupe a pu lâcher depuis leurs débuts résonnent d'une haine tangible. Lourd, oppressant, mais bénéficiant d'un refrain une fois de plus taillé dans le velours côtelé, c'est le véritable hit de ce disque qui navigue parfois à vue, mais sans jamais perdre le cap.

"Black Is The Soul" (dont l'amusant titre de travail "Mary Ellen Thrash", était inspiré du nom de la mère de Brian qui apportait des repas au groupe) enfonce un peu plus le clou en amont, et se perd même dans des considérations presque Indus, bien que proposant des lignes vocales centrales hautement harmoniques sur fond d'accords profonds plaqués avec certitude. Pont qui retrouve les tics symptomatiques, minuterie avant l'explosion de la bombe sur un quasi final qui ravage tout sur son passage de hurlements de démon. Du bon travail, pas forcément le plus créatif, mais l'un des plus efficaces. Demande on autre chose après tant d'années de carrière ?

Décision étrange d'avoir réservé à cette édition deluxe deux morceaux bonus qui auraient aisément pu remplacer quelques encombrements officiels...Les presque cinq minutes de l'étrange "Baby" aurait offert un interlude beaucoup plus menaçant et trouble que le duo convenu avec Corey Taylor, spécialement avec cette intro incertaine et ondulante, qui débouche sur un magma de riffs plombés qui fondent dans l'acide. Et "Calling me Too Soon", qui ferme cet album longue durée sur une note saccadée parfaite, était peut-être plus idoine que la fermeture officielle "Please Come For Me". Mais les choix sont ce qu'ils sont...

Le choix, KORN l'avait. Continuer une carrière en dents de scie, en publiant des albums à risque (The Path of Totality), des interludes pas vraiment convaincants (See You On The Other Side, Untitled Album), ou au contraire se poser les bonnes questions, et retrouver l'essence de ce qui faisait sa différence. Ils ont implicitement voté en s'en remettant au désir de leur producteur, ont resserré les rangs, et ont finalement presque réussi à enfanter d'un classique.
Pas exempt de défaut, pas au niveau d'un Life Is Peachy, ni d'un Follow The Leader, mais ce qu'ils ont accompli de plus réussi depuis...Untouchables.

"[La pochette] décrit le monde de douleur dans lequel évolue cet enfant. C'est plutôt sombre, mais plein de couleurs, avec beaucoup d'espaces négatifs. Si tu regardes d'un peu plus près, tu remarqueras plein de détails terrifiants."

Sombre mais coloré, la meilleure description possible de The Serenity of Suffering. Et le paradoxe de son titre trouve écho dans son contenu. Puisque sa musique est la plus terrifiante que le groupe a enregistrée et donc, le disque le plus rassurant qu'il a produit depuis des années.



Ajouté :  Lundi 24 Octobre 2016
Chroniqueur :  Mortne2001
Score :
Lien en relation:  Korn website
Hits: 8023
  
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