La vie est un éternel recommencement, un an après Hawkdope, le groupe de Stoner transalpin BLACK RAINBOWS sort Stellar Prophecy, son cinquième album.
Voila déjà neuf ans que ce power trio emmené par Gabriele Fiori (guitare, chant) nous régale avec sa musique Stoner perchée. Le groupe a commencé sa carrière avec des disques de pur Stoner oldschool. Mais le dosage de disto a augmenté avec le temps et sur les deux derniers disques, l'EP Holy Moon en 2013 et l'album Hawkdope l'an dernier, Gabriele Fiori annonçait clairement son intention de se concentrer sur le Heavy Psych. Cette orientation se confirme avec Stellar Prophecy. BLACK RAINBOW se tourne résolument vers un psychédélisme à forte teneur en fuzz comme savait si bien le faire MONSTER MAGNET au début de sa carrière.
Les habitués ne seront pas dépaysés, le nouvel opus reprend la même recette que le précédent, c'est à dire un subtil mélange d'agressivité rentre dedans, de plages contemplatives et psychédéliques, le tout noyé dans un océan de distorsion et de reverb. Pour épicer le cocktail, le trio s'est adjoint les services d'un clavier qui vient parsemer les préparations de nappes envapées. La section rythmique est assurée Alberto Croce (batterie) et Guisepe Guglielmino (basse), Dario Loca, bassiste sur Hawkdope, ayant plié les gaules.
Ce petit changement de line-up n'a pas d'incidence sur le son craché par les amplis du trio. Stellar Prophecy s'inscrit dans la droite lignée de l'album précédent, à commencer par une ouverture avec un morceau plutôt remuant, "Electrify" qui s'inscrit dans la même veine que "The Hunter" (Holy Moon) et "The Prophet" (Hawkdope). Guitare mordante, batterie excitée, chant agressif. Un peu de fuzz et de disto mais à doses homéopathiques, comme les prémices du déferlement qui se produit sur les pistes suivantes. Au fil de la tracklist, le psychédélisme prend le pas sur le reste et noie les morceaux sous des océans de distorsion. Des constructions savantes, très haut perché, où la musique se développe simultanément sur plusieurs strates successives. Le climax est atteint avec "Golden Widow", pièce mastoc de presque 12 minutes. Une intro qui rappelle le "Death's Face" de GLOWSUN débouche sur une construction hallucinée avec une rythmique déroulant sans fin la même litanie hypnotique sur laquelle la guitare et l'orgue tissent des motifs envoûtants. C'est long mais c'est bon comme une promenade au clair de lune pour digérer une orgie de space cake.
Donnant suite à ce morceau d'anthologie, l'album alterne savamment les ambiances. Du petit brûlot Rock et direct comme "Evil Snake", du space rock ("Keep the secret", "The Travel"), de beaux soli de guitare, il y en a pour toutes les humeurs !

Le disque est produit par Gabriele Fiori et le travail sur le son est remarquable : la superposition des couches d'instruments, le dosage du reverb, les différentes tonalités de la distorsion, la batterie très organique et savamment dosée, les insertions d'orgue, les samples. Mais surtout, Stellar Prophecy est un disque qui sonne très naturel, organique. C'est ce travail sur les ambiances et les variations qui évite au disque de tourner en rond avec une construction trop symétrique.

La seule symétrie qui soit à déplorer c'est celle avec Hawkdope dont Stellar Prophecy est une version bis. On cherche ce qui distingue les deux projets et on est bien en mal de mettre le doigt dessus. Même maquette, même climat, mêmes samples, même chant, mêmes solos : l'originalité n'est pas le point fort de ce projet qui ressemble beaucoup à un album qui rappelait déjà beaucoup l'EP précédent. On pardonne le sacrifice du renouvellement sur l'autel de l'approfondissement mais il faudra songer à faire un peu évoluer l'univers sur les prochains projets.