Après les échecs cuisants des deux derniers albums, Technical Ecstasy et Never Say Die!, BLACK SABBATH qui traverse une crise existentielle depuis plusieurs années essaye de se remettre sur les rails (de coke) avec un album qui réconcilierait le groupe avec son public. Malheureusement, le coeur n'y est plus vraiment pour Ozzy. Le chanteur sombre dans la dépression, passant ses journées à se défoncer tant et si bien que les trois autres musiciens décident de le congédier. C'est Bill Ward qui est chargé d'annoncer au chanteur qu'il n'a plus sa place dans le groupe et même si le batteur admettra "Il était allé trop loin... même pour nous", il ne se remettra jamais tout à fait d'avoir dû pousser vers la porte l'un des membres fondateurs. Ozzy parti, Tony et Geezer se mettent en quête d'un nouveau chanteur et finissent par jeter leur dévolu sur Ronnie James Dio, récemment renvoyé de RAINBOW par Richie Blackmore.

"Pour la première fois, Tony Iommi a face à lui une autre personnalité forte doublée d'un musicien doué pour rebondir sur les idées, les améliorer, voire même les refuser. Ce conflit volontaire relance la dynamique du groupe" (Guillaume Roos - La bête venue de Birmingham)

Cette nouvelle donne ne convient pas à tout le monde et Geezer Buttler quitte à son tour le groupe. Le départ du bassiste historique ne freine pourtant pas la construction du nouvel album, Ronnie Dio décidant de prendre en charge la basse en attendant de trouver un nouveau bassiste (Geezer réintègre finalement le line-up avant le début des enregistrements). Le mot d'ordre du nouveau SAB, c'est un retour aux sources. Finies les incartades Space Rock, Synthpop ou Jazz. Retour à un Heavy Metal classique où le côté mélodique serait accentué.
Geezer parti, c'est Ronnie Dio qui se charge de l'écriture des lyrics. Il donne à l'album une dimension épique, merveilleuse et romanesque bien plus optimiste et lumineuse que les textes des albums précédents. C'est la pâte Dio, à base d'arc-en-ciel, de licornes, de dragons et de chevaliers. Des textes pleins d'espoir, de poésie et de messages, comme l'épique "Neon Knights", le lumineux "Heaven and Hell" ou le mystique "Lonely is the World".

Heaven and Hell fait partie du haut du panier des albums de BLACK SABBATH. Il n'y a rien à jeter dans les huit chansons de la tracklist auxquelles le nouveau producteur, Martin Birch, donne une sonorité bien puissante, un son qui casse vraiment la baraque. Si Ronnie Dio a redonné à BLACK SABBATH un feeling tari depuis plusieurs années, le lutin apporte aussi une nouvelle voix. Car la technique vocale de l'américain est à mille lieux de celle d'Ozzy Osbourne et les chansons composées pour Heaven and Hell font la part belle à son chant habité. En jouant sur les variations de tessiture, les ruptures de rythme, les crescendo de furieux, le chanteur insuffle à ses parties une puissance inédite dans la musique du SAB. Le disque propose d'ailleurs quelques dialogues épatants entre le chant habité de Dio et la guitare de Tony Iommi, notamment sur "Die Young" et "Lonely Is The World" dont la courte introduction chantée laisse bien vite la place à un épilogue instrumental épique.

Bien plus cohérent que Technical Ecstasy ou Never Say Die!, l'album alterne des titres directs et rentre dedans ("Neon Knights", "Wishing Well", "Die Young", "Lady Evil"), des chansons épiques ("Children of the Sea", "Heaven and Hell") et une power ballade majestueuse ("Lonely Is The World"). Certes, toutes les pistes ne se valent pas et le disque souffre un peu du déséquilibre entre ses (très) grands moments et des chansons un peu plus banales comme "Wishing Well" ou "Walk Away" (ces chansons n'ont d'ailleurs jamais été interprétées sur scène).

Avec ce neuvième album studio, BLACK SABBATH a enfin retrouvé le bon chemin. Le succès critique et populaire sont immédiats et Heaven and Hell devient rapidement le plus gros succès commercial de BLACK SABBATH depuis Sabbath Bloody Sabbath.