RIWEN (no) - The Cold (2015)
Label : Indie Recordings
Sortie du Scud : 28 août 2015
Pays : Norvège
Genre : Hardcore
Type : Album
Playtime : 12 Titres - 33 Mins
Que faire lorsqu'on est le chanteur d'un groupe culte de l'envergure de CULT OF LUNA, qui se met de lui même en sommeil ? C'est la question qu'à du se poser Johannes Persson, mais il est évident qu'il a rapidement trouvé une réponse satisfaisante.
Et à vrai dire, elle tient en une seule affirmation, brève et lapidaire.
"Il est temps de revenir à des choses simples, sauvages et rapides. Du Hardcore"
Dont acte. Et de Hardcore, il est question ici, mais par son versant le plus abrasif, aux confins du viril et du Crust, avec un son à décorner les bonnes soeurs. En gros, la puissance toujours, mais loin de la contemplation étirée des COL, en revenant aux bases de la brutalité, aux origines de chaos, DISCHARGE en tête de liste. L'approche nordique de la violence crue et sourde, avec toujours en exergue ce son épais et froid comme un vent glacial, qui gèle les joues et creuse les lèvres.
Une basse lourde qui traîne des pieds, des guitares méchantes et graves, une rythmique qui pilonne et qui détonne, cavalant comme elle marche d'un pas lourd, et évidemment le chant si caractéristique de Johannes, qui n'a pas changé d'un iota.
Alors Hardcore, oui, mais si parfois celui-ci se veut classique et somme toute assez Anglais, on n'oublie pas pour autant le Heavy bien tordu, flirtant avec la New York touch, comme si le fantôme de Peter Steele hantait les couloirs du studio.
"C'est une histoire simple et courte. J'en avais marre des grosses productions et des longues balances qui sont le lot quotidien de CULT OF LUNA. Alors je suis retourné à mes racines d'Uméa. J'ai écrit quatorze chansons en quatorze jours, sous l'inspiration de groupes de straight edge vegan que j'adulais quand j'étais gamin. JUDGE, BATTERY, INTEGRITY, ACME ou DAMNATION AD. Le but était de ne pas passer mille jours en studio à pinailler sur tous les détails, la destruction musicale devait être directe et live."
Alors avec l'aide de Fredrik et Christian, membres de TOTALT JÄVLA MÖRKER, deux autres flingués Punk Crustcore, l'homme s'est mis au boulot. Il a complété son line-up avec le guitariste Marita et le bassiste Christoffer, et il était fin prêt. La messe était dite, la brutalité la plus primale trouvait terrain d'expression.
Production mate et imposante, compos oscillant entre le bref et brutal et le long et pesant, toutes les composantes sont là, et vous n'avez plus qu'à ingurgiter cette symphonie de violence brève, mais concise. Même si tous les tics de son groupe d'origine ne sont pas oubliés, en version condensés (le très grondant et salement atmosphérique intermède "Daymares"), l'homme s'est concentré sur une diatribe directe et sans ambages, et le résultat est massif, véloce, glissant plus d'une fois des rochers Hardcore pour des rivages presque Crust ("Strife And Hate", pas aussi violent qu'URSUT, mais pas mal dans le genre DISCHARGE du nord de l'Europe).
Il a d'ailleurs émaillé ce premier effort de saillies dans le même genre, un peu plus longues parfois, et parsemées de breaks tendancieux ("Voices Of Revolt"), mais la plupart du temps, ce tempo véloce laisse la place à une tenue un peu plus stable, et moins épidermique ("Crucifix", entame qui explique tout sans faire de mystère, "I See War", sans fioriture et à la double grosse caisse suffocante), tout en n'occultant pas vraiment son passé d'homme de digressions.
Ainsi, le format long ne passe pas à la trappe, tout en gardant des dimensions plus humaines que celles traumatiques de COL. Même si "The Curlew" dépasse la barre des cinq minutes, et développe une jolie intro grouillante et acide qui s'étire sur plus de la moitié du morceau, on y retrouve des éléments de son groupe initial dans cette pesanteur mélodique et cette contemplation nihiliste d'un monde qui part à la dérive.
Un gros effort de production a été consenti malgré les standards qu'impose le style, et l'on sent bien cette basse en colonne vertébrale qui fait vibrer l'échine, chose rare dans ce créneau si abrupt.
On est parfois très loin du Hardcore comme le concevaient les idoles du vocaliste, et "Stalking A Wounded Wolf" a beaucoup plus d'accointances avec le Sludge, certes noir et serré comme les poings d'un révolté, mais tout de même Heavy et poisseux, dans la veine d'un EYEHATEGOD moins goguenard et plus volontiers Doom.
RIWEN a donc bien capitalisé sur la crédibilité et les fondations de son premier EP, et développe ses vues dans un contexte plus large, mais aussi emprunt de claustrophobie et d'aversion envers l'humanité. Le groupe (projet ?) ratisse plus large et ne se contente pas du minimum, tombant même à l'occasion dans un Chaotic Hardcore linéaire et oppressant ("Rise Up"), ne reniant en rien ses racines Post pour les adapter à un contexte clairement Core.
Et c'est au final "Dödens Källa" que revient l'honneur de construire un pont entre les deux univers de Persson, puisqu'il relie le rivage Post Hardcore lourd et insistant avec le présent Hardcore/Crust, en multipliant les fausses pistes, les contretemps, et les brutales accélérations qui vous font prendre quelques G. Et pour bien enfoncer le clou, une poignée de blasts agrémentent le tout d'une folie passagère aux accents Black, avant que les derniers instants ne laissent de lourdes percussions occuper l'espace qui n'était plus vide depuis longtemps.
Alors, de l'intérêt d'une telle réalisation, d'un tel projet ? Récréation, bouffée d'air frais, nostalgie ? Peu importe, et je peux comprendre qu'après des années à avoir arpenté de sa voix les longs corridors biscornus et iconiques du Post ténébreux au sein de CULT, Johannes ait ressenti le besoin d'une expression moins empesée, et plus viscérale.
Sans être un chef d'oeuvre, The Cold mérite bien son titre et reste solidement campé sur des positions Hardcore nordiques, citant les références de jeunesse de l'homme, tout en payant son tribut à DISCHARGE et autres chantres d'un Hardcore ténu et vénéneux.
Pas forcément un disque pour passer un moment agréable ou pour oublier son quotidien, ni vraiment cathartique, mais une bonne parenthèse qui propose des morceaux solides, travaillés mais gardant cette spontanéité glaciale inhérente aux racines du genre. Un break constructif en somme.
Ajouté : Jeudi 07 Avril 2016 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Riwen Website Hits: 5126
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