PRISTINE (no) - Reboot (2016)
Label : Pristine Music Production / Cargo
Sortie du Scud : 22 Janvier 2016
Pays : Norvège
Genre : Psychédelic Blues Rock
Type : Digital/LP/CD
Playtime : 10 titres – 45 minutes
Bon déjà, il en faut du courage et de l'abnégation pour vivre à Tromso, ville du nord arctique de la Norvège. Loin de tout, froid, tout ça n'est pas des plus réjouissant...Alors que faire dans ce cas, picoler jusqu'à se réchauffer et oublier la lande d'une blancheur immaculée? Aller hurler avec les loups, et attendre qu'ils répondent? Hanter les forêts en slip en arborant un corpse paint?
Tout ça semble plus ou moins viable, mais il existe une autre échappatoire proposée et vécue par un quintette local qui décidemment, sait mettre le feu à la glace et rompre l'ennui.
On connaît la passion nordique pour tout ce qui est vintage, je ne vais certainement pas encore une fois en énumérer tous les chantres ici. D'autant plus que j'ai mieux à faire, vous en proposer un autre et rajouter un nom sur cette liste qui commence à ressembler à un rouleau de sopalin qu'on dévide accidentellement. Mais une fois la musique entendue, je peux vous garantir que ce nom là, vous ne l'oublierez jamais...
Mené de front par une auteur/compositeur à la flamboyante crinière rousse, PRISTINE fait partie de ces groupes rares qui savent puiser dans le passé de quoi faire rougir le présent. Il faut dire qu'avec une front woman comme Heidi Solheim, on peut s'attendre à voir un joli tapis rouge de velours se dérouler sous vos pieds tant cette artiste incroyable exsude de talent par tous les pores.
Non contente de signer les textes et les musiques de son groupe, elle se permet de les incarner avec un talent vocal qui égale en émotion le grain bluesy de Janis Joplin, et la profondeur émotionnelle Soul d'Aretha Franklin. Le genre de chanteuse d'exception qui vous colle la chair de poule en quelques secondes, avec deux ou trois notes bien placées d'un voix incroyable. A partir de là, la musique n'a plus qu'a suivre en qualité, ce qu'elle se plaît à faire évidemment...
Soyons franc, Reboot est une gigantesque baffe musicale, une énorme secousse viscérale qui réincarne en 2016 l'esprit polyvalent des seventies, en se frottant à tous les courants en vogue à l'époque. Tour à tour Blues, Rock, Progressif, Southern, Psychédélique, ces dix morceaux sont autant de tours de magie qui vous envoûtent de leurs charmes et finissent par vous posséder. Un genre de vaudou par procuration, qui filtre par vos enceintes pour s'emparer de votre âme. Et l'âme de cet album est tellement riche que vous gagnerez au change en perdant la votre.
On imagine très bien à l'écoute de ce troisième album l'enfance de Heidi, passée à écouter pendant des heures les vinyles de son père, passant au gré des découvertes des BEATLES à GRAND FUNK, d'Aretha Franklin, à Joplin, FREE, DEEP PURPLE, et autres référence majeures d'une décennie incroyablement fertile. C'est ainsi qu'elle s'est forgé son identité d'artiste, et le moins que l'on puisse dire, c'est que tout ça n'aura pas été vain, mais au contraire très constructif. Et dès le premier morceau, "Derek", le feeling est là, Blues Rock en diable, strié d'interventions en solo brillantes, introduit par un harmonica possédé, et dominé par le chant velouté et diablement Soul de Heidi.
Mais ce qui distingue les PRISTINE de tous leurs frères d'armes vintage, c'est cette versatilité qui les fait évoluer d'un Rock carrément Bluesy à une Pop progressive pénétrante, en passant par des intermèdes Boogie, et des moments acoustiques délicatement intimistes.
Les cinq musiciens restituent toute la grandiloquence théâtrale des seventies en laissant parler leur nature intrinsèque, et nous irradient d'un orgue incandescent, de guitares damnées, d'une rythmique souple et libre, et surtout, d'une incarnation vocale qui laisse le souffle coupé.
Mais plus précisément, que contient donc cet album qui relève plus de la magie pure que du talent simple? La réponse est simple et complexe à la fois.
Car on y trouve de tout, mais joué à la perfection. Le registre est tellement large que je ne me sens pas capable d'en baliser les contours, alors je peux juste tenter d'en éclaircir quelques méandres.
PRISTINE est le genre de combo qui ose tout, et réussit tout. Quand ils se lancent dans un Rock furieux à la MC5 sur "Booty Call", on respire les effluves de l'usine General Motors du coin. Lorsqu'ils jouent l'intimisme Blues avec "The Middleman", on a le sentiment de retrouver le plus grand Led Zep sur scène, avec un featuring inopiné de tous les anciens YARDBIRDS venus tailler le bout de solo ensemble.
Quand ils s'abandonnent aux riffs doublés de l'orgue vicieux de "California", ils réinventent le Hard Rock de DEEP PURPLE en le faisant chanter par le doppelganger féminin de Robert Plant.
Et lorsqu'ils marient la Soul et la Pop progressive au Blues Rock, avec le sublime "The Lemon Waltz", ils touchent à la grâce pure et invitent Grace Slick, Janis J. et Kate Bush aux agapes du Zep et de LYNYRD SKYNYRD, pour un banquet dressé sudiste sur une table maculée de feeling.
A ce niveau là de perfection, les mots viennent à manquer. Pourtant, j'ai pris de plein fouet, comme vous, le déferlement vintage scandinave qui a vu des groupes extraordinaires inonder la planète de leur déluge revival. Mais c'est fois ci, quelque chose d'unique s'est passé. La communion entre le chant troublant et dramatique de Heidi et le background musical de son groupe est tellement fusionnelle qu'on ne sait quoi dire, surtout lorsque la dite communion se célèbre au son de morceaux anthémiques qui abordent tous les registres avec un panache incommensurable.
J'ai pris de face les nuances Blues Rock torrides de "Louis Lane", sans pouvoir les amortir, sans pouvoir éviter la violence de ces couplets gorgés de volutes de guitare malicieuses qui explosent sur un refrain habité par une vocaliste au talent sans équivalent.
J'ai bu à grandes gorgées la Soul bluesy de "Don't Save My Soul" comme la lie d'un calice bourbonné que Joplin aurait sans doute dégusté jusqu'à la dernière goutte. J'ai secoué ma tignasse sur la basse grouillante de "Derek" qui se met à la colle avec une batterie gluante, alors même que Heidi s'envole à des hauteurs stratosphériques. Oui, j'ai assimilé tout ça pendant des heures, et j'en suis ressorti...lessivé, mais tellement heureux que j'ai remis le couvert.
Mais je ne sais plus quoi dire et j'en ai ras le bol de réfléchir. Et puis il n'y a pas à réfléchir. Reboot est sans conteste l'album de Rock bluesy psychédélique vintage de l'année, et pourtant nous ne sommes pas encore au mois de février. Et si vous ne sentez pas quelques effluves du WHITESNAKE de "Ain't No Love In The Heart Of The City" dans l'intro de "All I Want Is You", je ne peux plus rien faire pour votre éducation musicale. Et si je compare PRISTINE à mon David Coverdale, voyez y un signe.
Un énorme signe même.
Ajouté : Lundi 25 Janvier 2016 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Pristine website Hits: 6309
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