ENLARGE YOUR MONSTER. Voila un groupe au nom improbable qui me redonne la foi. La foi dans le Stoner. Cet album arrive à point nommé, pile au moment où je commençais à trouver que les projets Stoner tournent un peu tous en rond et ne veulent plus dire grand chose. Comme si les musiciens qui se revendiquent de cette scène avaient oublié de quoi il est question et choisissent le Stoner comme pierre d'achoppement alors qu'ils font tout autre chose. Il est loin le temps de Palm Desert, le temps où John Garcia et Josh Homme organisaient des sessions en pleine nature avec le vent et les cactus pour seuls témoins. Et bien ce Desert Rock primal, je l'ai retrouvé à l'écoute du debut album des lyonnais de ENLARGE YOUR MONSTER. En décembre 2015, il est encore possible de faire un album qui sorte des sentiers battus tout en livrant la quintessence du Stoner. Ce petit vent chaud et crissant, cette promesse, cette promenade.

Difficile de trouver de l'information sur l'existence ou les prestations du groupe avant 2015. Un EP 5 titres confidentiel, une date fin 2014 en ouverture de PLANET OF ZEUS, quelques extraits de concert sur Youtube... Mais il semble bien que 2015 soit une année de remise à plat importante pour la formation qui renouvelle son line-up, écrit de nouvelles chansons, sort une version extended de son EP éponyme en début d'année suivi en décembre de son debut album, Facing.

L'album suit le chemin emprunté par l'EP mais y ajoute une poignée d'ingrédients supplémentaires. Une guitare plus mordante, une batterie plus dynamique et une prod plus dense. Elle est bien organique cette prod. Elle place tous les instruments sur un pied d'égalité et met sur la voix un reverb discret. Tous ces ingrédients donnent au projet une sonorité Southern Rock imparable. Et de tous les instruments, la plus grosse signature du gang, c'est le chant grave et puissant de son frontman Philippe Badey.
ENLARGE YOUR MONSTER a réussi à composer un disque bourré de qualités et de quelques morceaux d'anthologie, du genre qu'on a envie d'écouter en boucle, comme "Brooklyn Hight" ou "Facing (My Monster)" avec son intro bien grasse et saturée au maximum, ses riff trainants comme des sirènes de train et le chant caverneux qui colle parfaitement à l'ambiance plombée.

Il y a de l'anthologie dans chaque chanson, le riff groovy à mort de "Brooklyn High" et "What if", l'intro sursaturée de "Facing" et "Watch out", le break de "Watch out" avec ce riff à la sonorité métallique qui vous prend par les tripes et vous force à grimper sur la table pour onduler du bassin comme un possédé. Et puis "le chien catin", dernière piste un peu Punk à la BERU, avec des paroles chantonnées graillonnées, qui tombe comme un cheveu sur la soupe, ou une manière de dire que les quatre lyonnais n'ont pas tout dit avec Facing.

Niveau influence, outre KYUSS et QUEEN OF THE STONE AGE, cette sonorité Stoner n'est pas très éloignée de celle des compatriotes de LOADING DATA sur l'album Double Disco Animal Style. Mais comme sur tout bon album, ces influences ne sont que des touches noyées dans la masse de vinyle d'une galette qui mérite de figurer dans la discothèque de tout amateur de Stoner couillu qui se respecte.