THE MURDER OF MY SWEET (se) - Beth Out Of Hell (2015)
Label : Frontiers Records
Sortie du Scud : 21 août 2015
Pays : Suède
Genre : Cinematic Metal
Type : Album
Playtime : 13 Titres - 71 Mins
Lorsque j'avais rencontré les charmants musiciens de THE MURDER OF MY SWEET, lors de la promo de leur premier album, Divanity, j'avais senti un gros potentiel en eux. Bien sûr, politesse promotionnelle oblige, ils s'étaient montré plein d'égards, et je dois avouer que mon regard était ostensiblement attiré par la belle Angelica, mais malgré ceci, leur discours était frais, leurs ambitions réelles, et leur motivation sans failles. Après un second effort aussi réussi, sinon plus que le premier, Bye Bye Lullaby, paru deux ans plus tard, mon impression se confirmait. Certes, ils avaient LA chanteuse ad hoc, belle, sexy et très talentueuse, mais ils avaient surtout la musique, ample, énorme, aux arrangements luxuriants, qui ne dissimulaient pas un manque d'inspiration.
Dieu sait si pourtant le Metal à tendance symphonique n'est pas ma tasse de thé... Mais leur mélange d'inspirations, leur énergie, leur capacité d'instrumentistes m'avaient convaincu de leur importance, moi qui pourtant fuit comme la peste NIGHTWISH, EPICA, WITHIN TEMPTATION et tous les chantres du style...
Cinematic Metal ? Si vous n'êtes pas initiés, c'est le créneau qu'occupent les TMOMS (pour les intimes), en gros, un mélange de gros Heavy, de Progressif, de Symphonique, avec une production évidemment larger than life. Si au départ je restais dubitatif sur cette étiquette qui me semblait un peu pompeuse à l'époque, et surtout floue, je dois avouer que cinq ans plus tard, j'ai enfin compris de quoi ils voulaient parler... L'explication claire et nette m'est parvenue aujourd'hui, sous la forme d'un troisième album, Beth Out Of Hell...
Angelica explique elle même la trame de ce concept album, puisque c'en est un, de plus de soixante dix minutes:
"Beth Out Of Hell est une histoire d'amour apocalyptique, celle de la fille de Lucifer qui tombe amoureuse de l'archange Michael. C'est la continuité des trois derniers morceaux de Bye Bye Lullaby, tout simplement. Cet album nous a demandé trois ans de travail, parce que nous souhaitions vraiment offrir à nos fans ce qu'ils méritaient"
Ce qu'ils méritaient ? Simple, un album qui risque dans les années à venir d'incarner le mètre étalon du Metal Progressivo-symphonique moderne. Tout ici est tellement énorme, de la production aux riffs, en passant par les structures, le chant d'Angelica, les mélodies, les arrangements, que je vois mal qui pourrait le surpasser, et comment. Si certaines oeuvres musicales par le passé ressemblaient fortement à des films musicaux, Beth Out Of Hell en est le parangon, en Dolby surround et 3D audio compris. Le travail accompli est impressionnant, sachant que ce n'est que le troisième album du groupe. Et son titre en forme de clin d'oeil n'est forcément pas gratuit. En faisant une référence directe au cult album du tandem Meat Loaf/Jim Steinman, THE MURDER OF MY SWEET assume l'héritage du pavé baroque et grandiloquent Bat Out Of Hell, et lui offre même un petit fils, des décennies plus tard.
Même emphase, même délire sans limites, même désir d'être plus grand, plus fort, plus pompeux que tout le monde, avec toutefois une grosse nuance, puisque le kitsch assumé de son modèle a été laissé de côté pour un aspect plus épique et dramatique.
Je ne discuterai pas ici de l'histoire, qui à son intérêt ou pas, mais qui verse dans l'éternel manichéisme de la lutte entre le bien et le mal et l'amour qui peut réunir deux extrêmes (en gros, un mélange de Twilight, Goethe et Roméo et Juliette), mais musicalement, la réussite est totale, et tellement euphorisante et variée qu'il m'est difficile de lui trouver des points faibles, malgré mon aversion au genre.
Outre le concept, la production, et les ambitions, un autre point commun que partage ce disque avec le modèle de Meat Loaf, c'est la durée excessive de certains de ses morceaux, qui paradoxalement, comme dans le cas du protégé de Steinman, sont pourtant les points forts du LP. "Requiem For A Ghost" et ses neuf minutes et trente secondes, et "Means To An End" qui lui dépasse de justesse les onze minutes sont de véritables opéras de poche, dans la plus grande tradition de QUEEN, MEAT LOAF, GENESIS et autres QUEENSRYCHE. Tout est passé en revue, de l'intro longue et ambiancée, aux longues digressions émotionnelles, en passant par la multiplication des couches de choeurs emphatiques et de soli inspirés. Son gigantesque qui envahit la pièce, Heavy bourru, qui parfois flirte avec la Pop, arrangements opératiques, accalmies mélodiques, et surtout, palette de variations très étendue de la part d'Angelica, qui prouve une fois de plus quelle grande vocaliste elle est.
Mais outre ces longs segments indispensables à tout concept qui se respecte, on trouve aussi tout du long des instants plus brefs, plus directs, qui n'ont rien à envier à leurs longs homologues.
Ainsi, "The Humble Servant" à tout du tube qui va faire craquer les radios Indie suédoises, comme d'habitude, "Tide After Tide", qui fait preuve d'une délicatesse bienvenue dans sa mélodie et son mélange de voix, le lyrique "World In Ashes" et ses violons synthétiques qui n'a pas peur de s'approcher très près du plafond de l'opéra, le très catchy et entêtant "Euthanasia" qui lui non plus n'a pas peur d'empiler les couches de guitares mordantes et les arrangements en arrière plan, ou même le très Heavy et sombre "Heaven Succumb", qui privilégie la pesanteur, les riffs plombés, et les claviers ténébreux et inquiétants.
Mais quoiqu'il en soit, vous trouverez dans chaque morceau de quoi vous satisfaire et rassasier votre appétit de grandeur, de mélodies amples, de structures à tiroirs et de flamboyance vocale et musicale. THE MURDER OF MY SWEET a soigné chaque détail de son troisième opus, et l'a conçu comme un blockbuster à écouter, mais un blockbuster de qualité, ou chaque note se justifie, et qui ne vous prend pas pour des imbéciles tout juste bons à être impressionnés par du gros son qui tâche.
Je ne sais pas si Beth Out Of Hell intègrera le panthéon des concept albums les plus importants de l'histoire de la musique, aux côtés de The Wall, The Lamb Lies Down On Broadway, Tales From Topographic Oceans ou 2112, mais on ne pourra pas reprocher au quatuor de ne pas avoir essayé. Il sera certainement traité avec condescendance, puisqu'il appartient à la sphère du Metal moderne, et je suis pratiquement sûr que les fans d'Operation Mindcrime et autres Metropolis Part 2 le bouderont avec mépris, mais je n'en ai cure, et je ne peux m'empêcher de craquer pour ce disque qui n'a pas hésité à tailler dans les grandes largeurs, au risque de se planter lamentablement... pour au final symboliser une vraie réussite.
Mais écoutez le, et vous comprendrez qu'il n'est rien de moins que le Bat Out Of Hell de la génération 2010, avec les mêmes travers, la même démesure, et le même talent dans l'outrance. Cinematic Metal ? Maintenant oui, j'ai enfin compris.
Ajouté : Dimanche 13 Décembre 2015 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: The Murder Of My Sweet Website Hits: 5148
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