VADER (pl) - Tibi Et Igni (2014)
Label : Nuclear Blast Records
Sortie du Scud : 30 mai 2014
Pays : Pologne
Genre : Death Metal
Type : Album
Playtime : 10 Titres - 42 Mins
Strasbourg, cuvette de chiotte coincée entre les Vosges et la Forêt-Noire. Je te hais. Aujourd'hui, il fait 35° à l'ombre. Je regarde la pochette de Tibi Et Igni, nouvel album de VADER, il en fait 40. J'écoute "Go To Hell", il en fait 45. C'est ça, VADER ! Du culte, du culte, encore du culte. Un culte si suffocant qu'hormis peut-être deux albums légèrement, très légèrement en-dessous des huit autres (pour moi The Beast et Necropolis), jamais, en dépit des changements de line-up, des années de carrière, du côté légendaire qui, plus il devient légendaire, plus il est susceptible de s'effriter, jamais VADER n'aura réellement marqué le pas et défait sa réputation volcanique acquise comme une évidence avec The Ultimate Incantation en 1992 puis De Profundis en 1995. La suite, on la connait. Litany en point d'orgue, Impressions In Blood pas loin derrière, la remontada avec Welcome To The Morbid Reich, Tibi Et Igni pour actualité et toujours, toujours, comme une croute poussiéreuse qui refuse de décrocher du mur, Piotr "Peter" Wiwczarek en souverain pontife.
Injecté de sang frais avec l'apparition dans le line-up de Tomasz "Hal" Halicki à la basse (HERMH) et de James Stewart à la batterie pour épauler Peter et Spider (guitare), Tibi Et Igni, bien qu'étant le onzième full-lenght de la vaste discographie des Polonais, va parvenir à un renouvellement technique, rythmique et organique tout à fait vertigineux pour un groupe aussi rôdé et, disons le clairement, mené par un frontman qui, à bientôt 49 ans, aura bien mérité sa retraite. Rapidement, cet opus marque son besoin d'émancipation. Seulement vieux de trois ans, Welcome To The Morbid Reich semble bien dépassé face à la puissance du VADER 11.0. Aventureux, innovant, audacieux, le Death Metal des Polonais n'a franchement jamais sonné aussi caustique et orchestral. On parlerait presque de Death expérimental si la section rythmique, aussi broyante que bruyante, n'avait pas en permanence le dernier mot dans cette affaire. Jamais dans l'outrance, jamais dans l'ingérence, l'opus démarre dans un condensé de puissance granuleuse que le solo expéditif de "Where Angels Weep" ou les arrangements grandioses de "Go To Hell" nuancent. Des détails, si l'on considère l'humeur Rock N' Roll de "Triumph Of Death" (qui aurait plutôt dû s'intituler "To The Grave" vu la fréquence à laquelle Peter débite ces paroles) comme le symptôme artistique le plus délicieusement nocif de Tibi Et Igni. Et si à côté de ça, on repère aisément les morceaux plus fantomatiques (je pense surtout à "Abandon All Hope"), c'est surtout parce que VADER a eu l'excellente idée de pondre une composition graphique et théâtrale comme "Hexenkessel", laissant envisager qu'après BEHEMOTH, un autre nom ronflant de la scène polonaise est en train de céder à ces plantureuses sirènes orchestrales. Et le plus savoureux dans tout ça, c'est qu'en dépit de l'aversion manifeste que le public convaincu éprouve machinalement pour de tels compromis, le cas VADER ne va pas faire l'ombre d'un débat, tant l'omnipotence de Tibi Et Igni est inéluctable. Rector Orbis de sa génération, Peter, en leader incontestable, en tête pensante, en gourou du Death, de sa voix si facilement identifiable et pénétrante, va faire taire tout le monde, se permettant sur "The End" la facilité d'une narration. L'anecdote, dans cette histoire, c'est que jamais VADER n'aura signifié aussi clairement la fin d'un de ses albums depuis "The Final Massacre", ponctuant en 2000 un certain... Litany ! De la symbolique à l'état pure, à laquelle chacun jugera utile ou pas de croire.
Le plus ceci, le moins cela. Qu'importe. Tibi Et Igni est. Il respire, existe, et existera à jamais. Empreinte digitale dans la discographie du groupe, empreinte génétique dans l'ADN du Death Metal, ce onzième album studio de VADER frôle une forme d'excellence grasse et nerveuse qui force le groupe à se renouveler en permanence. Un jeu d'enfant. Un jeu de feu. Comme ce post-scriptum mystérieux laissé usuellement à l'attention des destinataires des messages secrets pour signifier une nécessité de destruction par le feu après lecture.
Tibi Et Igni, "à toi et au feu". Mais surtout à toi.
Ajouté : Lundi 10 Août 2015 Chroniqueur : Stef. Score : Lien en relation: Vader Website Hits: 5572
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