Laissez-moi voyager dans le temps. Laisse-moi respirer le bon temps.
Aux côtés de Syd, Django, grand Jacques, Janis, Bonzo, Dimebag et le Flow. .

Ces mots sont ceux de "Mélodie", ultime chanson du répertoire de Congo Square, second album proposé par les rockeurs français de PLEBE. Rien à voir avec PLEBE RUDE, encore moins avec les Californiens de LA PLEBE. Ceux-là sont bien de chez nous, et il faudra vraiment être sourd pour l'ignorer. Au-delà d'un hommage pour le moins explicite, ces mots sont également le leitmotiv d'un disque qui ne cesse de jongler entre différents portraits, le tout emballé dans un blister made in France. Les paroles, la production, tout a été fait en France, et si ce n'est pas toujours une sinécure que de faire du Rock dans ce pays et de s'en laisser féliciter, PLEBE aura eu les couilles de s'y risquer. Avec le succès qu'on lui reconnaitra légitimement.

Derrière l'exotisme extravagant de son titre, Congo Square n'a rien d'un Rock métissé dressé tel un pont entre France et Brazzaville. Vous n'y êtes pas. Si pont il doit y avoir, il reliera uniquement le Vieux Continent et La Nouvelle-Orléans, où se trouve le Congo Square, jardin ouvert dans le parc Louis Armstrong. Symbole. Et s'il tisse des liens étroits, ce sera modestement avec l'art des choses bien faites. Ça tombe bien, car cet opus est en réalité une toile d'araignée dans laquelle on se prend tel un moucheron inoffensif. Arquant ses grandes pattes musclées, PLEBE avance en terrain ami. Ce quatuor aura peut-être eu le tort de ne pas avoir pris beaucoup de risques, se déplaçant avec légèreté dans un registre qu'il maitrise assurément et le mérite qui est de leur entière responsabilité : la pertinence artistique de cet effort. NOIR DESIR peut continuer à vivre peinard dans nos souvenirs, PLEBE n'a rien d'un concurrent. Leur griffe est tranchante, teintée de sonorités toujours très Metal et de riffs écrasants. D'Heavy Rock ("Sort" et "Le Cinquième") à Speed Rock ("Délices I" et "Délices II"), la musique des français est un feu d'artifice qui pétille, se libère et se cabre. Avec à la clef quelques œillades, comme ce motif jazzy sur "Congo Square" (d'aucuns y verront un hommage à Armstrong) ou l'instru-"Mental", Congo Square fait le boulot avec panache, nous propulsant dans un monde feutré et calfeutré d'où la lumière ne jaillit que très peu. C'est aussi cette absence de luminosité, symbolisée par un déficit en un titre réellement fort, qui pénalisera à la longue cet opus. Il manque ce feu de Bengale, repère dans une tracklist nocturne tellement homogène qu'elle en est déroutante. PLEBE aura fauté sur ce point. Uniquement sur ce point. Tout le reste s'apprécie avec humilité et simplicité, deux traits de caractère qui auront forgé la personnalité de ce second full-lenght.

D'une solidité éprouvante, Congo Square aura réussi sa mission première : renouer avec un sens du Rock à la française, auréolé (et je voulais appuyer ce détail majeur sur la fin), d'un chant en français qui donne un relief hypnotique à des paroles qui ne se départissent jamais de leur poésie. Cet ultime paramètre sera la reliure de compositions à lire dans le sens d'un manifeste solennel, qui plaira assurément, et vous serez nombreux, à tout amateur de Rock / Metal sans peur et sans reproche.