Qu'est ce qui explique qu'un groupe comme SKANNERS, avec ses trois décennies de loyaux services, ses six albums studio, son line-up plutôt stable et son Power Metal discipliné, ne soit jamais sorti de son anonymat transalpin ? Epineuse question à la réponse d'autant plus incertaine que la performance enregistrée sur Factory Of Steel en 2011 met tout le monde d'accord. A l'écoute de ce très bel opus, on imagine facilement que le pendant italien d'ACCEPT, de RAGE, d'HELLOWEEN, méritait une carrière au moins auréolée d'un disque référence. Quid de The Magic Square (1996) ou de The Serial Healer (2008), qui se sont épanouis dans l'obscurité ? Leurs apparitions aux côtés de MOTÖRHEAD, SAXON, MANOWAR, DIO après la sortie de Pictures Of War en 1988 seraient-elles ce point d'orgue vieux de bientôt un quart de siècle ? Beaucoup de ceux qui découvriront le groupe au travers de ce full-lenght ne pourront s'en satisfaire.

Alors mieux vaut tard que jamais et considérer avec du retard Factory Of Steel comme une sortie extrêmement accomplie. SKANNERS est une machine à tubes, ce qui doit être gratifiant pour une formation de Power Metal traditionnel. On en arrive à cette déduction après seulement neuf minutes de jeu, quand se sont succédées dans l'harmonie la plus totale "Never Give Up" et "Iron Man". La vitesse d'exécution est supersonique, mais que dire de ce sens du refrain imparable que les Italiens développeront tout au long de ces 42 minutes ? Si vous aimez le Power Metal pour ces refrains à reprendre à l'unisson, ces refrains qui fédèrent, qui abattent les frontières, alors vous prendrez cher, guidés dans votre quête du mémorable par un Claudia Pisoni en état de grâce. C'est une véritable découverte, et je parle moins du style musical performé que du groupe, qui possède cette énergie communicative, cette clairvoyance dans le jeu, ce talent dans l'écriture, autant de facteurs qui rendront Factory Of Steel un peu plus brillant à l'instant T. Et paradoxalement, SKANNERS est un combo totalement enraciné dans la caricature, que ce soit quand ils pondent l'inévitable power-balade "Story Of Sound" ou encore l'hymne "We Rock The Nation", qui fait très ACCEPT dans l'esprit avec son riff sec et limite teutonique ! Aucun temps mort, aucune faiblesse, les morceaux s'enchaînent les uns après les autres avec panache mais sans vraie continuité. Leur indépendance manifeste entache légèrement la cohésion affichée par cet album mais sans entamer son engagement de tous les instants. Un fil conducteur n'aurait pas été de trop, principalement pour satisfaire ceux à qui ce côté serial-songwriter pourra déplaire, même si je pense que devant le travail effectué, les avis seront quasi-unanimes pour dire de cette œuvre qu'elle ne dépareille pas dans le paysage Power Metal européen. On pourra éventuellement reprendre à l'ordre "When I Look In Your Eyes", au romantisme inadapté et au déroulement étrange, mais pas plus.

Des imperfections minimes qui ne nuiront jamais à Factory Of Steel. On préfèrera retenir de cette performance calibrée à la fois l'authenticité de leur Power Metal et cette capacité à écrire tube sur tube, même si au final, il s'en dégage des nuances easy-listening. Pas de prise de tête, pas d'intellectualisation futile, le Metal pour le Metal, c'est le credo des groupes les plus efficaces de cette planète, et c'est également celui que reprend depuis trente ans SKANNERS, avec l'inefficacité inexplicable qu'on lui connaît désormais. A découvrir urgemment !