EYEHATEGOD (usa) - Eyehategod (2014)
Label : Emetic Records
Sortie du Scud : 27 mai 2014
Pays : Etats-Unis
Genre : Sludge Core
Type : Album
Playtime : 11 Titres - 43 Mins
Je vous jure que je n'ai pas fait exprès... Si, c'est la vérité, c'est du hasard. Si aujourd'hui, je m'affaire à vous parler du grand comeback de EHG après avoir chroniqué le Down IV - Part II, c'est une pure coïncidence.
Qui par contre tombe à pic. Comme quoi, le temps fait parfois son affaire. Et la mienne.
Le temps justement. Celui qui nous séparait du dernier album d'EYEHATEGOD commençait à sembler un peu long. Certes, les sudistes n'ont pas la même pendule qu'Axl Rose, qui elle fonctionne un jour sur deux à rebours, mais leur montre à gousset doit tourner quand même au ralenti. Hey Jimmy, c'est bien beau de picoler avec Phil, mais tes autres potes commençaient à en avoir plein le cul !
Rien. Rien depuis Confederacy Of Ruined Lives, qui déjà, sentait la confession d'échec (personnel) à plein nez. Quatorze ans avec en guise de nouvelles, quelques bonjour et un coucou en forme de compilations et autres b-sides.
Putain, t'avais raison Nino. On dirait le sud. Le temps dure longtemps.
Des années sûrement.
Faut dire que s'envoyer des lignes et rouler des feuilles séchées, ça en prend du temps. Et passer par la case barreaux d'acier, paiement de caution et périodes de probation aussi. Le CV prend des airs de casier les gars. Il fallait redresser la barre. Alors Jimmy a posé ses baguettes, repris sa gratte, rassemblé ses troupes, et la joyeuse bande s'est mise enfin à composer. Un peu. Pas mal. Beaucoup. Pour finalement revenir, avec quelques minutes de retard. Mais le temps, une fois de plus, ne passe pas de la même façon en Louisiane. Surtout lorsque celle ci est à cent lieues des cartes postales verdoyantes vendues aux touristes égarés. La Louisiane d'EHG est glauque. Sombre, moite, sans appel, sans espoir. Pas de guide, mais un vieux labo planqué sous la cuvette de douche, et qui fournit toute la région. Ca arrose sec. Comme cet album éponyme. Et les carabins de l'enfer ont depuis longtemps trouvé une bonne recette pour couper la poudre. Elle dépote, flingue les neurones, mais à un sale goût de reviens-y, humectant la gnole maison.
Et question recette, EYEHATEGOD s'y connaît. Musicalement, c'est quasiment la même depuis le séminal In The Name Of Suffering, il y a vingt deux ans. Du Rock du marais, lourd, énorme, estampillé NOLA comme le diraient quelques journalistes en manque de formules. Et cette fois ci, une fois de plus, le mélange marche à fond. Et même si cette nouvelle livraison est entachée du décès de Joey LaCaze, mort de n'avoir pas pu respirer correctement, elle est du meilleur tonneau. Pure, mais souillée d'ajout divers (hydrocarbures, médocs), lourde dans les veines, et qui frappe directement au coeur. Merde, ça fait mal. Mais avec EHG, pas de surprises. On sait ce qu'on achète, et si on le fait, c'est qu'on aime planer en souffrant.
Dès les premières secondes, on redescend en terrain boueux familier. Larsen, distorsion au maximum, riffs tendus comme la corde de l'arc, mais au lieu de vous écraser la gueule à grand coups de citations de St VITUS, le quintette choisit l'option "accueil bordélique", et se la joue plus fast hardcore que jamais. Six cordes en roue libre, chant hurlé, drums sans bridage, les retrouvailles se fêtent dans le bordel. Ca promet.
Mais la nature, aussi dévoyée soit elle, reprend très vite ses droits. Et le "Bludge" (excusez ce néologisme, mais c'est le seul terme que j'ai trouvé pour décrire ces fondus) si cher au groupe revient au galop. Rythmique enclume, vocaux écorchés, riffs en fusion, qui soudaint lachent un lick délié, basse à la tonne, et la fumée envahit la pièce. Et "Trying To Crack The Hard Dollar" prend des faux airs de HELMET sous meth, combinaison fatale, limite overdose.
Pas de soucis, on connaît la formule, depuis In The Name bien sur, même si Dopesick s'autorisait une fracture plus brisée.
Si le UNSANE des jeunes années vous tailladait la peau à grands coups de lame de rasoir, si DOWN sait parfois repousser les limites de la bienséance, si CROWBAR reste synonyme de lourdeur, EYEHATEGOD symbolise le malaise, palpable, persistant. Et EyehateGod, l'album, pue à mort la réunion de malades qui cherchent leur catharsis en musique. Mais ne la trouve qu'un instant, avant de replonger.
Et si la longue litanie "Flags and Cities Bound" ressemble comme deux gouttes d'eau à l'introspection d'un pauvre type assis en cabane qui se demande comment il a encore pu atterrir là, si "The Age of Bootcamp" se finit en jus de boudin, c'est simplement parce que les chansons balancées ici ne sont qu'aveux, profession de foi, sans fard aucun, sans jolie conclusion pour rassurer le lecteur.
C'est un beau roman, c'est une belle histoire?
Mon cul.
EYEHATEGOD ne changera jamais. Ce nouvel album, arrivé sur le tard n'est que la confirmation du caractère nauséeux d'une musique dont les fondements n'ont pas bougé d'un iota depuis le début des années 90. Et pour quoi faire après tout ? Vous en connaissez beaucoup des groupes comme ça ? Vous iriez dire aux MELVINS de changer de disque ? A Phil d'arrêter de jouer les teigneux ? Non, vous fermez vos gueules, et c'est la meilleure chose à faire. EyehateGod, c'est un peu le Take as Needed For Pain de 2014, le Dopesick des années 2000. Un changement dans la continuité, mais tout sauf une routine. Car la vie de ces mecs en est loin, très loin. Leurs albums ont la production et le son de leur existence. Tordu, sourd, puissant comme une charge, épais comme une volute qui vous pique la gorge.
C'est la Louisiane les gars, bienvenue en enfer.
Ajouté : Mardi 01 Juillet 2014 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: EyeHateGod Website Hits: 12024
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