VORKREIST (FRA) - A.K. (Sept-2013)
La scène Death / Black en France n'a jamais brillé par la quantité des formations, mais bien par leur qualité. Et dans le cas de VORKREIST, il est aussi question de longévité. Avec 14 ans de carrière au sein du groupe derrière lui, A.K., le guitariste de la formation parisienne m'a accordé un entretien à l'occasion de leur passage durant la deuxième édition du Black Arts Ceremony. Ainsi est venu le temps de tisser un bilan, et débattre aussi bien de la négativité avec laquelle est perçu le groupe, que d'établir un minimum le plan de bataille pour le futur de VORKREIST.
Line-up : Saint Vincent (chant), A.K. (guitare), EsX (guitare), Narcotic (basse), D. Terror (batterie)
Discographie : Sermons Of Impurity (demo - 2001), Sabbathical Flesh Possession (album - 2003), Sublimation XXIXA (album - 2006), Sickness Sovereign (album - 2009), Sigil Whore Christ (album - 2012)
Metal-Impact. Ca fait maintenant 14 ans que VORKREIST existe. La foi et la passion sont-ils toujours intacts au sein du groupe ? Quel est le regard que tu portes sur votre carrière pour le moment ?
A.K.. Alors bien évidemment, je pense qu'il est nécessaire de conserver intactes cette passion et cette foi pour continuer à faire avancer ce truc qui nous prend du temps. Qui nous raccourcit nos années, et qui sans doute, nous brule un peu de l'intérieur. Et puis bon, on a encore envie de le faire. Des fois, je me demande si ça ne serait pas un peu comme coucher toujours avec les mêmes filles. Au bout d'un moment, on prend l'habitude, et on ne sait plus trop pourquoi on couche avec elles. En fait, je crois que nous avons toujours besoin de le faire, besoin de VORKREIST. On n'a peut être plus cette énergie juvénile de nos débuts, mais cette entité dont je suis le seul rescapé, cette aventure, elle vaut le coup d'être continuée. C'est certain. VORKREIST reste quelque chose de très fort pour tous ceux qui y sont passés : pour preuve, nous ne sommes brouillés avec aucun ancien membre du groupe.
MI. Votre dernier album en date, Sigil Whore Christ, est sorti l'an passé. Comment se sont déroulés sa composition et son enregistrement ? Vous vous étiez donné des objectifs précis suite au petit succès qu'a connu Sickness Sovereign dans le milieu ?
A.K.. Alors déjà, même si les critiques de Sickness Sovereign ont été élogieuses, il y'en a eu très peu. On était alors signés sur Trendkill Records, et le label avait fait très peu de promo pour l'album lors de sa sortie. Mais peu importe, je m'étais déjà exprimé là-dessus, je ne vais pas y revenir. Pour revenir au début de la question, par rapport à la composition de Sigil Whore Christ, étant le principal compositeur du groupe, mon but était d'entériner définitivement le fait que nous avions un nouveau chanteur (ndr : Saint Vincent) qui avait rejoint le groupe juste avant l'enregistrement de Sickness Sovereign. Avec Sigil Whore Christ, nous voulions repartir sur quelque chose d'un peu plus catchy, plus teinté Death, mais tout en gardant une "forme" adaptée au chant de Saint Vincent, très visqueux et rampant.
MI. Quel est le bilan pour le moment par rapport à Sigil Whore Christ ?
A.K.. Je suis extrêmement satisfait de ce disque. C'est un peu fastoche de dire ça, mais c'est le meilleur album de VORKREIST. C'est toujours le dernier le meilleur de toute manière. Mais en toute honnêteté, si on se revoit dans un an ou deux, je te dirais que l'album en cours est le meilleur. Commercialement, nous avons tous conscience que ça n'a pas été un immense succès commercial. Les critiques ont beau être très bonnes je pense que... (ndr : il hésite) je pense que cet album n'arrive peut-être pas au bon moment dans notre carrière. Sans doute est-ce dû au fait que le Black/Death, plus que présent sur Sigil Whore Christ, n'est pas un genre qui marche des masses en ce moment. C'est comme si t'étais obligé de choisir ta chapelle : le Black à fond ou le Death à fond. On nous a souvent reproché d'avoir le cul entre deux chaises : "Faudrait savoir les gars ! Vous faites du Black ou du Death ?". A mes oreilles, la question sonne faux. Chez VORKREIST, ce sont deux genres qui se marient très bien et qui arrivent à une certaine osmose. En revanche, si je devais étiqueter notre musique, je dirais tout simplement Black/Death. Mais si j'ai envie de faire le chieur, je te dirais plus Black/Death ou Death/Black d'un album à l'autre.
MI. Vous exprimez votre haine et votre mépris des religions ouvertement dans votre musique. Avez-vous l'impression que la musique de VORKREIST représente comme vous le souhaiteriez ce que vous êtes et ce que vous pensez ?
A.K.. Manque de bol, ce n'est pas moi qui m'occupe des paroles, je ne suis pas le plus apte à te répondre. Pour l'aspect conceptuel, je peux néanmoins t'affirmer que l'écriture des textes se fera toujours à partir d'une opinion et d'un avis communs à tous les membres du groupe. On a cette volonté de faire des paroles peut-être un peu primaires, sans être dans le délire dans lequel on était à 15 ans et demi, "on est les messagers de Satan !". L'idée est de revêtir une approche un peu Punk, un peu premier degré de cette rébellion que nous avons encore en nous.
MI. Mais tu n'as pas peur d'être ridicule, en continuant à véhiculer un message aussi simpliste et vu et revu dans le Black Metal ?
A.K.. C'est intéressant comme question... Je pense que le grandiose, c'est osciller entre le ridicule et une certaine forme d'honnêteté. Et du coup, je me dis qu'écrire des textes qui ne partent pas dans les milles métaphores est une bonne manière de traduire l'énergie brute que veut dégager VORKREIST. On ne veut pas rejouer les mêmes combats antichristianistes. On cherche à trouver où le contentement spirituel a pu échouer. Le confort promis par le spirituel - disons plutôt le religieux - à complètement échoué, et nous restons dans un monde où les gens ne vont pas bien. Tu peux demander à n'importe quel pharmacien, il te dira qu'il bat des records de vente d'antidépresseurs. Et l'alcoolisme se porte très bien, il me semble. Je ne pense pas qu'une quelconque félicité promise puisse arriver ici bas.
MI. L'Eglise Catholique Polonaise vous a mis dans une liste des groupes les plus dangereux pour le Christianisme. Comment avez-vous interprété ça ?
A.K.. Bin... c'est que ça doit surement être vrai (rires). C'était vraiment difficile d'interpréter ça sérieusement. Ce devait être un de ces name-droppings absolument absurdes, dans lesquels ils dénoncent tous les noms les plus connus : il y'a une quinzaine de noms, ça va de MORBID ANGEL, à MARILYN MANSON, en passant par VORKREIST, BEHEMOTH, BELPHEGOR... Le label Agonia sur lequel nous sommes signés est polonais, ils ont certainement pu accéder plus facilement à certains noms de groupes. En ce qui nous concerne, il y'a "kreist" dans le nom du groupe, et ça a suffi pour que l'on se retrouve là-dedans. Mais bon, on est assez flattés quand même. Disons que ces gens que nous n'estimons pas forcément et qui déclarent officiellement nous haïr, c'est dans l'ordre des choses, d'une certaine manière. Et d'un autre côté, c'est une bonne nouvelle, parce que ça veut dire que nous existons même pour eux. Comme un respect irrespectueux.
MI. On en parlait tout à l'heure, mais à priori, on cataloguerait VORKREIST dans le registre Death/Black Metal. Quels sont les groupes de cette scène que tu apprécies ?
A.K.. Il y'a bien un groupe qui m'a toujours bluffé, qui m'impressionne et me fout des claques encore aujourd'hui, c'est ARKHON INFAUSTUS. Ils ont toujours mélangé le Death et le Black, mais sans donner une alchimie ratée. Les deux s'alternent dans leurs morceaux, et au final, se complètent.
MI. Ce soir, vous vous produisez au Black Arts Ceremony, et vous êtes relativement hauts sur l'affiche. J'imagine qu'il y'a une certaine fierté à en tirer...
A.K.. Bien entendu, mais on aurait été encore plus fiers d'être plus haut. Cela dit, c'est vraiment pas mal, on est très contents. Je suis allé faire un tour dans la salle, qui a l'air très sympa. L'affiche de ce soir est bien, c'est cool. On avait déjà eu l'occasion de jouer avec ACHERONTAS, et honnêtement, autant sur disque, il y'a vraiment des supers trucs, autant sur scène, j'avais trouvé ça chiantissime à en mourir. Alors, peut-être que c'est plus pareil, on verra bien. GOSPEL OF THE HORNS, FROSTMOON ECLIPSE sont aussi des supers groupes que j'aime beaucoup. Mais j'avoue ne pas vraiment avoir écouté les autres.
MI. Quel est votre rapport avec la scène ? Comment vous préparez vous pour un concert ?
A.K.. Chacun a ses petits trucs, ses petites habitudes. Il se passe à chaque fois, et pour nous tous, une espèce de switch. On est les mecs de la vie de tous les jours, et sur scène, on a cette énergie qui se dégage, qui nous met dans un été d'esprit tout à fait différent. Bien sûr, il arrive que la sauce ne prenne pas lors d'un concert, mais il n'y aucun problème, on assure quand même le taf. Nous ne sommes pas une machine bien huilée qui donne le même show au millimètre près tous les soirs. Mais si ça prend entre nous et avec les gens qui sont en face de nous, on peut arriver à faire quelque chose de très intense, violent, où ca sent la bière et l'animal. C'est l'objectif pour le concert de ce soir, c'est l'objectif pour chaque concert de VORKREIST. Mais bon, on ne baise pas toujours nos meufs de façon magistrale tu vois. Des fois, c'est magique, des fois non. Il peut aussi arriver qu'il y'ait tous les éléments pour que ça fonctionne, mais que ce soit décevant. Je pense que c'est un peu comme l'amour...
MI. Quel est le meilleur souvenir que tu as avec VORKREIST ?
A.K.. Justement, c'est essentiellement, voire exclusivement des concerts. Mais s'il ne fallait en choisir qu'un seul, ça serait peut-être ce truc assez dingue qui s'était passé dans une salle pas terrible, à Padoue, en Italie. C'était la dernière date de notre tournée avec HORNA et BLACKLODGE en 2007. Et il y'a eu ce feeling complètement taré. Nous étions en train de jouer "Void Of Grace", et les mecs des premiers rangs s'étaient emparés des barrières de sécurité, et ils tapaient en rythme sur le sol. J'ai un vague souvenir, parce qu'on était très saouls sur scène de m'être jeté dans le public en jouant de la guitare. La véritable osmose, le truc très intense.
MI. Y a-t-il un projet de nouvel album en cours ?
A.K.. On ne s'arrête jamais de composer. J'ai commencé à mettre quelques riffs, des embryons d'idées, des structures de côté pour le moment. Pour le prochain, l'idée c'est que l'album soit vraiment le fruit d'un travail collectif, que tout le monde compose. J'aimerais vraiment que ce soit un travail de groupe.
MI. Ma question traditionnelle : tes cinq albums cultes !
A.K.. Alors, bien sûr De Mysteriis Dom Sathanas de MAYHEM . Et ensuite, In The Nightside Eclipse d'EMPEROR, Misery Is A Butterfly de BLONDE REDHEAD, Remué de DOMINIQUE A et Fighting Spirit de MANU LE MALIN.
MI. Nous avons fini. Un grand merci pour ta disponibilité !
A.K.. Merci à toi, c'était cool.
Ajouté : Mardi 25 Mars 2014 Intervieweur : Hizia Lien en relation: Vorkreist Website Hits: 10267
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