EARL GREYHOUND (usa) - Suspicious Package (2010)
Label : Hawk Race Records
Sortie du Scud : 13 avril 2010
Pays : Etats-Unis
Genre : Rock / Blues
Type : Album
Playtime : 11 Titres - 45 Mins
Autant s'enfiler une pinte en écoutant DYING FETUS est un automatisme rentré depuis belle lurette dans les mœurs, autant avec ce Suspicious Package, il convient de
déguster un Earl Grey subtil et parfumé. D'ailleurs, EARL GREYHOUND est, comme son nom l'indique, une suggestion à lui tout seul. Ce trio de Rock américain formé dans le
Brooklyn new-yorkais s'est depuis longtemps évadé de cette prison de tôle et de verre, qui dissimule maladroitement une fourmilière humaine détestable, pour peu qu'on suive
leur exemple. Après un petit album, un live et un EP, le groupe s'est remis en ordre de marche pour proposer en 2010 un étonnant second opus, si loin et à la fois si proche
de la ligne éditoriale de ce webzine. EARL GREYHOUND, maillon réactualisé de la chaîne qui relie le Jazz au Crust, est un retour aussi inattendu qu'inespéré au cœur des
années 70, époque ô combien bénite pour le Rock végétal, fleurs dans les cheveux et herbe dans le papier à rouler.
On ne s'arrêtera pas sur leur look baba-cool, sur les coupes afro, sur les pantalons pattes d'eph', sur les chemises découpées dans une nappe vintage, mais plutôt sur leur
musique qui est une vraie escapade. Oui, EARL GREYHOUND aurait pu faire Woodstock. Ils ont juste quarante ans de retard, ce qui n'empêche pas l'auditeur lambda d'être
reconnaissant de ces "Oye Vaya", "Shotgun" et autres "Holy Immortality", aussi futiles que prenants. Emmené par l'exceptionnelle (et magnifique) Kamara Thomas et par
l'austère Matt Whyte, le disque se décompose en plusieurs instants de grande classe. D'un Rock un peu speed, un peu sur les nerfs ("Sea Of Japan"), on se rabat sur des choses
parfois moins volumineuses, plus éthérées, presque psychédéliques. "Black Sea Vacation" évoque un petit je-ne-sais-quoi de CREEDENCE CLEARWATER REVIVAL pendant que "Bill
Evans" est un charmant hommage au pianiste éponyme, qui a fait tellement pour le Jazz US. L'harmonie entre les voix de Matt et de Kamara est subtil, idyllique. C'est un
dialogue très intéressant entre deux timbres spécifiques qui collaborent avec tant de connexion qu'on a parfois l'impression d'entrer dans l'intimité du studio ("Out Of
Air"). Tout n'est pas inoubliable certes, mais l'exploit n'était pas aujourd'hui d'écrire un album abouti sur toute la ligne. L'exploit, c'est de sortir en 2010 une œuvre
comme celle-là, qui semble à peine forcer pour se rapprocher des plus grands groupes de Rock des seventies. Je suis persuadé que Donovan s'identifierait dans ce Suspicious
Package, au même titre qu'un BACHMAN-TURNER OVERDRIVE qui partage une chose essentielle avec EARL GREYHOUND à savoir le feeling ! Etonnamment, les trois pistes bonus en
marge de la tracklist classique assument ce décalage en offrant trois moments très différents. Un Rock totalement barré sur "S.O.S", un autre plus contemporain, plus Pop sur
"It's Over" et enfin, un dernier qui se rapproche beaucoup de celui des BLACK KEYS sur "I'm The One".
Ce patchwork habile et rafraichissant fait un bien fou, surtout pour le malheureux citadin que je suis. On redécouvre véritablement la notion de Rock N' Roll jazzy et funky
avec un Suspicious Package dont le seul défaut est finalement d'avoir été prévisible en arborant ce thème visuel verdoyant et cette imagerie Flower Power. Pour le
reste, qu'un jeune d'une vingtaine d'années puisse être sensible à ce travail tout autant qu'un mec qui a vécu ce mouvement de l'intérieur est un signe appréciable
d'ouverture qu'il convient de saluer. EARL GREYHOUND ou l'échappée belle.
Ajouté : Samedi 16 Novembre 2013 Chroniqueur : Stef. Score : Lien en relation: Earl Greyhound Website Hits: 7360
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