SATYRICON (no) - Satyricon (2013)
Label : Roadrunner Records
Sortie du Scud : 9 septembre 2013
Pays : Norvège
Genre : Black N' Roll
Type : Album
Playtime : 10 Titres - 51 Mins
Ses longs cheveux noirs de jais tombaient sur des épaules couvertes par un perfecto en cuir mal entretenu. Son visage luisait d'un reflet blanc laiteux qui lui donnait un air de statue de cire, un air malade. Un regard sadique, une coupe de barbe très VILLAGE PEOPLE et un anneau dans la narine droite étaient finalement les seuls éléments à rendre ce visage humain. Cet acteur de choix n'était pas très bavard, dialoguait par le biais d'un vague murmure anglophone que son accent norvégien rendait presque inaudible.
Satyr et moi, nous sommes totalement satisfaits de la direction qu'on va donner à SATYRICON. Ce nouvel album sera un changement de style et de direction.
Difficile pour autant d'oublier ces quelques mots quand on considère The Age Of Nero comme une sorte d'aboutissement musical pour un groupe qui n'aura cessé de prendre le Black Metal à rebrousse-poil depuis Rebel Extravaganza et ses aspérités post-industrielles.
Frost, en plus d'être un batteur d'excellence est un personnage magnétique. Son antipathie repousse, sa froideur débecte mais son aura est une sombre grâce venue d'ailleurs. SATYRICON est venu d'ailleurs. Ceux qui pensaient avoir tout entendu sur The Age Of Nero, album franchement controversé (que votre serviteur a copieusement encensé à l'époque, non sans en avoir une vision identique aujourd'hui) vont se gargariser de voir la tombe du duo suffisamment vaste et profonde pour y accueillir deux coffres en sapin.
On peut être d'accord ou pas d'accord avec le virage Black N' Roll emprunté par les Norvégiens, mais ce serait faire preuve d'une mentalité étriquée que de renier l'aigre-douceur vampirique d'un "K.I.N.G.", d'un "The Pentagram Burns", d'un "Fuel For Hatred" ou d'un "The Wolfpack". Voyez-vous, j'ai adoré la rigidité cadavérique de The Age Of Nero. La logique voudrait qu'avec ce huitième album qui va encore plus loin, je sois en proie à une rigidité phallique. Rien de tout ça.
Est-ce que SATYRICON a rendu l'âme ? Je n'en sais rien. SATYRICON a, en tout cas, rendu sa foi, renié ses dernières racines Black Metal, effacé d'un simple revers de manche l'ombre de virilité d'un "Commando", le même souffle qui faisait du précédent effort un opus certes différent, mais aussi captivant. Les quatre premières notes de "Voice Of Shadows" sont celles de "When The Saints Go Marching In". Cette petite musique que tout le monde a déjà fredonnée, c'est ça la cuvée 2013 ? Satirique ? Infâme ? Sans âme. D'une faiblesse rythmique abyssale, d'un flegme et d'une nonchalance à en maudire les notions de vitesse universelles, Satyricon, emmené par les médiocres "Tro Og Kraft" et "Our World, It Rumbles Tonight" s'enterre dans une apathie que "Nocturnal Flare" viendra timidement arroser. C'était sans compter sur le cynisme de "Phoenix", un titre portant un nom ô combien symbolique dont le contenu en dit long sur les pérégrinations du duo. Ils auront beau nous servir dans la foulée un "Walker Upon The Wind" légèrement plus tourné vers le Black Metal, on n'oubliera pas de sitôt ce morceau à la silhouette Post-Rock qui offre à Sivert Høyem (ex-MADRUGADA) une chance unique de coucher sa voix ténébreuse et limite sensuelle sur un rythme expérimental dont il parfait la moindre note. Au-delà du message que cherche à faire passer SATYRICON sur ses intentions (le phœnix renaît de ses cendres et cet album est à son image : une renaissance et pas une résurrection), cette composition très particulière sera à mon goût la plus intense de cette œuvre. La seule à sortir de cet ersatz pathétique de Black N' Roll post-digestif. L'embellie durera le temps de "Nekrohaven" avant de retomber dans des travers proto-atmosphériques irréguliers, dignes du personnage de musicien évolutif et créatif maladroitement interprété par Frost en interview.
Merci SATYRICON. Merci pour ce que tu as donné au Black Metal durant tant d'années. L'essentiel aura été qu'on parle de toi. Cette façon un peu particulière de faire sa publicité, de trahir une institution aussi respectée et surveillée que le Black Metal aura agi, et avec quel succès ! Jusqu'à aujourd'hui. Aujourd'hui tu as fait le choix de franchir un mur, un de plus qui t'empêchera de revenir en arrière. J'écris ces lignes en écoutant "Natt". C'est une chanson émouvante tu sais, une belle chanson hors de son contexte. Et j'ai l'impression que personne ne pouvait t'empêcher de faire ce que tu avais à faire. Tu l'as fait. Maintenant bon vent.
Ajouté : Dimanche 15 Septembre 2013 Chroniqueur : Stef. Score : Lien en relation: Satyricon Website Hits: 7708
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