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THE PINEAPPLE THIEF (uk) - Bruce Soord (Mars-2013)


THE PINEAPPLE THIEF est le projet d’un seul homme, Bruce Soord qui, à force d’abnégations et de persévérance a réussi à abattre des montagnes pour émerger sur la scène internationale. Le bougre a connu des années très difficiles, seule sa passion et sa foi dans THE PINEAPPLE THIEF l’on guidé afin de mener son aventure jusqu’au bout ! Un vrai sacerdoce qu’il a mené en solitaire ! Car le garçon est un véritable homme orchestre très doué, capable de tout faire ou presque. L’histoire commence en 1996, lorsqu’avec Neil Randall il décide de créer VULGAR UNICORN, une expérience qui ne s’avérera pas concluante et qui lui laissera un goût amer ! C’est seul qu’il décide de poursuivre l’aventure. Notre ermite baptise son nouveau gang THE PINEAPLE THIEF et s’enferme dans son studio pour composer ce qui allait devenir Abducting The Unicorn. Il trouve très rapidement un deal avec un petit label du nom de Cyclops Records qui va lui permettre de s’exprimer en toute liberté. Il va d’ailleurs mettre toute son énergie afin de concocter son premier méfait qui sort en 1999. Fait très rare, il joue de tous les instruments et s’occupe aussi du mixage et du mastering ! Le méfait sort en 1999 et malgré une distribution très discrète, il lui permet de se créer un petit cercle de fans très dévoués. La Hollande sera un des premiers pays à l’adopter. Il enchaine immédiatement avec une deuxième galette 137 qui, cette fois-ci, sera enregistrée avec l’aide d’un producteur. Le résultat sera significatif, les morceaux seront plus sophistiqués et la production nettement supérieure, Bruce Soord continuant d’assurer toutes les parties musicales seul. Il en sera de même pour le troisième opus, Variation On A dream, qui sera la meilleure vente du label. Cette fois-ci, THE PINEAPPLE THIEF se doit de donner des concerts et Bruce Soord va se mettre en quête de musiciens pour l’accompagner. THE PINEAPPLE THIEF devient dès lors un véritable combo, une décision qui sera fondamentale pour la suite de l’aventure. 12 Stories Down sort en 2004 mais le son n’est pas à la hauteur des espérances de Bruce suite à un mastering catastrophique, la distribution sera arrêtée immédiatement. Notre ami reprendra le projet entièrement durant de long mois. Au final, le résultat sera 10 Stories Down qui déboulera dans les bacs en 2005. 2006 sera une année importante pour le combo, Bruce s’attaque à l’enregistrement de Little Man, un opus fort émotionnellement suite à un drame personnel qui le traumatisera à jamais .C’est à cet époque qu’il sera remarqué par Steven Wilson qui, dès lors, deviendra un fan absolu de THE PINEAPPLE THIEF. D’ailleurs, il sera d’une aide précieuse pour la suite du déroulement de la carrière du gang. Les lascars signent en 2008 avec le label Kscope qui va véritablement leur permettre de prendre leur envol. Tightly Unwound sort la même année et montre une métamorphose musicale vers un style nettement plus rock ! Mais le choc va se produire deux ans plus tard avec Someone Here Is Missing, une vraie pépite progressive rock à tendance Metal qui crée la surprise par sa qualité. Le doute n’est plus permis, THE PINEAPPLE THIEF vient jouer dans la cour des grands aux cotés de PORCUPINE TREE, ANATHEMA et consorts. Les anglais se sont même permis le luxe de travailler avec Storm Thorgerson, un monstre sacré du graphisme qui a œuvré pour LED ZEPPELIN ou PINK FLOYD pour n’en citer que quelques uns. La pochette sera une véritable réussite ajoutant du mystère autour du groupe. Ils enregistreront d’ailleurs une reprise de « money » en 2011, petit hommage en passant au Flamand Rose. La tournée européenne sera une réussite et nos britishs en profiteront pour sortir un Ep, Someone Here Is Live, qui sera un témoignage des plus efficaces de leurs concerts. Conscient qu’ils sont cette fois soutenu par une maison de disque qui croit en eux, ils enchainent avec All The Wars qui ne fera que confirmer que leur mutation vers un Pop Rock Alternatif. Là encore c’est un vrai succès. Profitant de leur passage à Paris au Batofar en ce samedi pluvieux de mars, c’est après une balance interminable que votre serviteur a pu s’entretenir avec Bruce Soord, leader et créateur de la formation britannique THE PINEAPPLE THIEF afin d’en savoir un peu plus sur le parcours chaotique de cette nouvelle révélation de la scène Metal Progressive. Rencontre avec un musicien fatigué mais heureux de jouer dans la capitale.

Line-up
: Bruce Soord (Chant, Guitare, Clavier), Steve Kitch (Clavier), Jon Sykes (Basse), Keith Harrison (Batterie)

Discographie : Abducting The Unicorn (1999), 137 (2001), Variations On A Dream (2003), 10 Stories Down (2005), Little Man (2006), What We Have Sown (2007), Tightly Unwound (2008), Someone Here Is Missing (2010), All The Wars (2012), Built A World Ep (2012), Magnolia (2014)

Retranscription / Traduction : Erick Laulit

M-I Interviews du groupe : Bruce Soord (Mars-2013), Bruce Soord (Sept-2014)



Metal-Impact. Nous sommes à quelques heures de ton concert sur le Bateau Phare, comment se passe la tournée européenne ?
Bruce Soord. Les concerts se déroulent très bien et c’est un réel plaisir que de revenir en Europe et rencontrer nos fans une nouvelle fois. Mais il est vraiment agréable de revenir en France et spécialement à Paris. Tu sais, même si nous sommes ensembles depuis quelques temps, il faut dire que je fais ça depuis 11, 12 ans maintenant. Mais ma première fois à Paris l’année dernière fut extraordinaire, un grand moment qui m’a marqué.

MI. Ton dernier show à Paris était en ouverture de INME, t’en souviens-tu ?
Bruce. C’est vrai, c’est drôle mais il est très difficile d’être promu en tant que tête d’affiche d’une tournée si tu n’as jamais joué auparavant, et notre unique moyen d’y participer fut en tant qu’invité sur celle-ci. C’est donc très appréciable de revenir en tant que headliner sur ces dates.

MI. Pour tous ceux qui ne vous ont jamais vus en live, comment décrirais-tu le groupe sur scène ?
Bruce. Je dirais que nous sommes un groupe de rock qui suscite l’excitation avec des influences de Metal alternatif. Nous sommes très différents d’autres formations car notre son est plus rock, nous prenons un énorme plaisir à être quatre sur les planches, nous dégageons beaucoup d’énergie et je viens de réaliser il n’y a pas très longtemps que les performances scéniques sont aussi importantes que le temps passé en studio.

MI. Ces deux dernières années ont été intenses, tu as fait beaucoup de tournées. Cela a t’il eu une influence sur ta façon d’écrire les chansons ?
Bruce. Oui, absolument. Quand tu montes sur scène, que tu communies avec ton public et ressens ses réactions, cela modifie ta façon d’aborder l’écriture des chansons car, dans les premiers temps, je ne me préoccupais pas du tout des concerts, je faisais ce que je désirais en studio. Maintenant je me demande si cela va fonctionner sur scène, désormais je me pose sincèrement la question de savoir si je vais avoir l’envie de jouer les titres devant un public. Alors oui, ceci a définitivement changé ma façon de travailler.

MI. All The Wars est sortit l’année dernière et aujourd’hui, vous sortez un nouvel Ep Built The World, d’où viennent ces trois nouveaux titres ?
Bruce. Nous avions ces morceaux depuis notre dernière session d’enregistrement pour All The Wars mais nous les avions mis de coté. Cependant nous avons toujours chéri l’idée d’en faire un Ep à cette période de l’année et le label a toujours envisagé cette sortie et la promotion liée au projet, et ce dès le départ. Au final, tout s’est passé comme c’était prévu.

MI. En comparaison de vos six précédents albums, il y a une énorme différence. Comment expliques-tu cela ?
Bruce. C’est une évolution naturelle que je n’ai pas initiée sciemment mais je sais que la sonorité est devenue plus juste, plus lourde et je pense, comme je te l’ai dit précédemment, que c’est une des résultantes de l’augmentation de nos performances live. Quand à moi, personnellement, je préfère jouer des arrangements avec toujours plus d’énergie et c’est pour cela que je sens que nos albums et ce qui est décrit dans nos chansons est plus fort.

MI. Penses-tu déjà à votre prochain album ?
Bruce. Oui, oui j’y pense actuellement.

MI. Tu veux dire que tu es en train de l’écrire ?
Bruce. Oui, j’ai déjà composé trois morceaux en fait, car le nouvel opus sera dans les bacs en mars 2014 si tous va bien. Cela ne nous laisse donc pas beaucoup de temps pour les enregistrer, les arranger et les peaufiner. Il faut que tout soit prêt pour janvier de l’année prochaine. Donc dès que cette tournée est terminée, je me remets à la tache.

MI. C’est un bouleversement important par rapport à la liberté dont tu jouissais chez Cyclops Records, maintenant tu as des délais beaucoup plus stricts ?
Bruce. C’est parfaitement exact.

MI. Ressens-tu de la pression ? Est-ce devenu plus difficile d’écrire face à des contraintes plus importantes ?
Bruce. Non, au contraire, je pense que c’est devenu plus simple car c’est très satisfaisant. Lorsque nous descendons de scène ou rentrons de tournée, j’ai tellement d’énergie que tout coule de source. Je me souviens, au début, on remettait tout en question car nous ne possédions qu’un nombre restreint d’auditeurs et nous ne vendions pas beaucoup de disques en fin de compte. Ça me fait penser à « Year Zero » que j’ai écrit il y a longtemps et qui abordait des sujets similaires, les raisons pour lesquelles je fais ça. C’est vraiment une chanson sur le fait d’abandonner. Je suis donc très content de revenir dans des endroits tels que Paris pour ce show et espérer voir une foule survoltée, vraiment tout cela ne rend les choses que plus faciles en termes d’écriture.

MI. C’est en quelque sorte votre première tournée en tant que tête d’affiche en Europe ?
Bruce. C’est par conséquent essentiel pour nous.

MI. Cela change-t-il quoi que ce soit d’être tête d’affiche sur la tournée ?
Bruce. Le show est certainement plus long ainsi cela nous procure le temps de nous approprier la scène. Si tu prends en considération la soirée, tu sais que les gens viennent te voir. Tu leur dois donc un bon spectacle afin qu’ils rentrent chez eux satisfaits. Dans cette optique c’est à ce moment-là que l’on ressent un peu plus de pression.

MI. Qu’est-ce qu’on bon concert pour toi ?
Bruce. C’est l’énergie, la communion avec son public, il y a quelque chose d’électrique et la dernière fois qu’on était à Paris c’était réellement magique. Lorsque tu es sur scène devant la foule, tu sais quand le public ne fait qu’un avec toi ou quand il se cantonne à juste être poli. Quand les fans sont connectés avec toi et que tu ressens ça, c’est très positif. Du coup, on se donne à fond et après on se congratule en se serrant les mains car nous sommes heureux d’avoir donné une bonne prestation.

MI. J’ai appris que tu allais enregistrer un nouvel album qui devrait sortir en juin avec un autre musicien, qui est cet inconnu ? Personnellement je pense à Steven Wilson ?
Bruce. [Rires] ... Et non ce n’est pas Steven Wilson, tout le monde nous rabâche les oreilles avec Steven Wilson mais ce n’est pas lui. C’est une personne très connue mais je n’ai pas l’autorisation de Kscope pour en parler pour l’instant, ça sort en juin normalement.

MI. C’est un album ou un Ep ?
Bruce. Oui, un opus entier, c’est un peu hard, agressif, avec beaucoup de guitares et je joue à peu près tout dessus.

MI. Ce n’est pas un groupe ?
Bruce. Non, c’est moi et le chanteur qui est invité.

MI. Alors se seront uniquement vos deux noms sur la pochette ?
Bruce. Oui, que nos deux noms.

MI. Pourquoi entretenir le mystère autour de ce special Guest ?
Bruce. A propos de ? ... [Rires]

MI. Tu ne veux pas dire qui est ce mystérieux inconnu ?
Bruce. Je n’en ai pas le droit. Kscope a une ligne directrice liée à ce projet et je ne suis pas autorisé à divulguer quoi que ce soit car ils ont une annonce officielle de prévue. Mon dieu, je crois que cette idée est née il y a quatre ans. C’est Kscope qui avait une certaine conception des chansons à inclure sur ce cd, ils me les ont confiées et j’ai donc écrit, produit et enregistré ces morceaux mais ils n’ont jamais trouvé le chanteur adéquat et je ne voulais pas chanter dessus car ça n’aurait été qu’un autre album de PINEAPPLE THIEF. L’affaire était donc en attente. Heureusement, on a récemment fini par trouver la perle rare qui collait parfaitement à l’esprit de la galette.

MI. Ca va donc être une grosse surprise dans très peu de temps ?
Bruce. Oui très vite. (nldr : Il s’agit de Jonas Renkse (KATATONIA) le projet se nomme : Wisdom Of Crowds).

MI. D’accord on ira se tenir au courant sur ton site web. Beaucoup de choses ont changé depuis votre signature avec le label Kscope comparé à Cyclops Records ?
Bruce. Oui, c’est comme s’il y avait eu un avant et après Kscope. Comme tu l’as souligné, nous étions chez Cyclops Records, et à cette époque personne n’avait entendu parler de nous. On a eu la chance de croiser Steven Wilson qui travaillait pour Kscope et qui leur a parlé de nous. Depuis, nous sommes plus médiatisés et les gens se déplacent à nos concerts. Au début, tout le monde croyait que nous avions commencé en 2007 avec Kscope et non pas en 1999 avec notre ancien label chez qui nous avons sortis de nombreux cd.

MI. Vous avez fait un grand nombre de disques auparavant ?
Bruce. Oui, six albums avant je crois.

MI. Six !? C’est énorme, le changement a été radical depuis votre arrivée chez eux ?
Bruce. Oui, nous avons été très chanceux de signer avec un label tel que Kscope.

MI. Sur le dernier album tu es accompagné par le grand orchestre symphonique de Prague, est-ce que c’est plus difficile d’adapter les morceaux dans ce cadre bien précis ?
Bruce. Non, ce que je veux dire c’est que j’ai toujours utilisé des cordes et ce depuis le début de ma carrière. C’était des samples de cordes certes. Mais ce n’était donc pas vraiment difficile d’écrire pour un orchestre mais plutôt d’emmener tout ça à un nouveau supérieur où l’on pouvait utiliser la section de cordes au complet ! J’avais également un arrangeur sonore à qui j’ai donné des idées de bases parce qu’il savait composer pour un orchestre et il est parvenu à le faire sans aucun problème, dirons-nous. Mais lorsque j’écris, je ne pense pas à ce que donnera le résultat final. Je ne compose pas dans l’optique d’utiliser un orchestre mais je me dis qu’au final, avec un orchestre, cela pourrait être parfait. Mais à la fin tu réarranges la chanson pour pouvoir te servir d’une guitare acoustique et de voix.

MI. C’est pour cela qu’il existe une édition limitée avec de nombreux morceaux acoustiques ?
Bruce. Oui, plusieurs versions acoustiques. C’était si facile à faire car tous ces morceaux ont été composés sur des guitares acoustiques au départ.

MI. C’est aussi la raison pour laquelle il se dégage une impression de calme sur All The Wars ?
Bruce. Oui, c’est vrai.

MI. Etait-ce planifié ou juste un concours de circonstances ?
Bruce. En fait, l’album studio commence par « Burning Pieces » qui est une chanson qui envoie du lourd, mais tu veux parler des titres acoustiques peut-être.

MI. Non, je faisais référence à All The Wars !
Bruce. Ah oui d’accord ! Non pas du tout, ce n’est pas réfléchi, c’est juste ce qui semblait le plus juste à faire.

MI. Vous n’y avez pas pensé alors ?
Bruce. Non, c’est littéralement ce que tu ressens, c’est juste des compositions qui sortent des tripes.

MI. La pochette de Build A World est très étrange, qui a réalisé la photo ?
Bruce. Ca a été fait par la même personne qui avait conçu la pochette All The Wars, il se nomme Mark Mawson. C’est juste une expérience, c’est de la peinture à l’huile plongée dans le l’eau et ensuite tu la laisses se disperser et tu peux voir les différentes couleurs à travers cette lumière, c’est beau. Pour cette fois, ça a pris l’apparence de champignons et c’est juste une image magnifique pour moi. Nous aimons tous sa pertinence car ça représente quatre formes séparées et très différentes les une des autres qui représentent le groupe.

MI. Pour All The Wars on dirait de la fumée, vous avez utilisé le même principe ?
Bruce. Oui, beaucoup de personnes ont des sentiments opposés, par rapport au résultat. C’est une sorte de pochette au dessin abstrait, c’est pour faire réfléchir, aucun indice n’est donné quant à sa signification.

MI. Oui mais pour toi, elle possède une signification ?
Bruce. La raison pour laquelle nous avons choisis cette image pour All The Wars, c’est que cet album traite des conflits qui existent au sein d’un couple, l’amour et ses problèmes. Nous parlons des antagonismes ainsi que les regrets et ce qui s’y rapporte. En la regardant, tu peux te dire que se sont de belles couleurs mais aussi que se sont différentes teintes incarnant le combat qui nous oppose tous pour la domination du monde. Le tout ressemble à une sorte d’explosion, certains disent que ça ressemble à une méduse et toutes ces diverses explications, cette multitude de sens concernant ce dessin traduisent parfaitement l’esprit de cet album.

MI. C’est un album concept en fait ?
Bruce. C’est un album concept dans le fait que ce soit concentré sur des émotions qui sont importantes, c’est à propos de l’amour et du temps que l’on gâche à se déchirer au sein d’un couple.

MI. Tes textes sont-ils autobiographiques ?
Bruce. Oui je pense que c’est ça, et ça l’est car je n’arrive pas à insérer mes émotions dans un morceau si ce n’est pas issu de ma vie privée. Je ne peux donc pas réussir à chanter des textes avec lesquels je ne me sens pas connecté, donc tout que ce que j’écris est basé sur des expériences personnelles vécues.

MI. Tu ne chantes pas des thèmes basés sur les dragons et l’héroic fantasy ! [Rires] ...
Bruce. Non, non rien de tel... [Rires]

MI. Tu as commencé en 1999 totalement seul ?
Bruce. Oui, c’était à l’époque une aventure solo...

MI. Et tu as réalisé plusieurs opus en faisant tout par toi-même !
Bruce. Oui, parfaitement.

MI. Qu’est-ce qui t’a poussé à travailler de cette manière ?
Bruce. Je m’en souviens. Je n’avais aucune attente particulière. J’avais passé un certain temps auparavant à jouer dans des groupes, Et j’avais seulement envie de faire mon truc. Je désirais écrire des chansons et posséder le contrôle total sur la sonorité produite et je ne pensais même pas qu’un jour ça sortirait sous forme de cd ou être là aujourd’hui. Alors après 12 ou 13 ans, être encore en train d’écrire et de jouer c’est une surprise parce qu’au départ, je n’avais pas la moindre idée de ce qui allait arriver.

MI. Beaucoup de combos sont issus d’une bande de copains qui se sont rencontrés au lycée mais pas toi, tu aimes travailler seul ?
Bruce. Oui. J’ai toujours écrit en solitaire mais c’est un peu diffèrent maintenant qu’on a le groupe avec lequel je tourne. Mais dans les débuts, j’étais énormément seul. Tu fais un concert et tu repars seul vers l’écriture du prochain album, c’était donc une vie très solitaire.

MI. Que t’ont apporté toutes ces expériences et ces années de solitude ?
Bruce. Ce qui fut le meilleur c’est d’enfin revenir sur la route et de rencontrer les personnes qui écoutent TA MUSIQUE. Je n’avais jamais réalisé que tous ces fans avaient étés avec moi et m’avaient accompagné durant toutes ces années sur ce long chemin. Alors, oui c’était très sympa.

MI. Depuis que tu as changé de maison de disque ta musique a évolué, penses-tu que cela t’a fait perdre des fans et gagner des nouveaux ?
Bruce. Indubitablement, oui. Dès la sortie de l’album on savait que nous allions perdre une partie de notre public et le nombre de nouveaux fans que nous allions attirer. C’est très difficile à vivre. Je pense que tu ne peux jamais réellement échapper à la réaction du public, même si tu t’appliques de ton mieux, tu finiras toujours par l’apprendre à tes dépends. Ce n’est jamais agréable de savoir que des gens t’appréciaient jusqu’à un certain point puis te disent qu’ils n’aiment plus ce que tu fais à présent. Mais tu dois faire ce qui te plait, c’est ça le truc.

MI. Je suppose que ce fut un choix cornélien ?
Bruce. Oui, mais je n’étais pas forcément conscient de cela. J’écrivais ce que je désirais exprimer, ce que je ressentais être bon et tout le monde ne partage pas cet avis. Alors, non, ce ne fut jamais une décision murie de ma part, je ne me suis pas assis en me disant je vais écrire un album Rock et de me débarrasser de l’ancienne couche psychédélique plus douce appartenant à l’univers de PINEAPPLE THIEF d’avant et d’adopter une structure redéfinie plus rock’n’roll. Ce n’était pas réfléchi de ma part, c’est uniquement quelque chose que j’ai fait tout simplement. Mais qui sait ce que nous réserve l’avenir ? Je pourrais parachever le cycle que j’ai commencé et revenir à mes influences du début, c’est là que réside toute la beauté et l’excitation de cet art. Tu ne sais pas vraiment où tout cela finira par te conduire.

MI. Tu ne sais pas comment sera le prochain opus, s’il sera dans la même veine ou diffèrent ?
Bruce. Non, c’est le fait de laisser mon esprit vagabonder et aller là où il me dit d’aller. Il y aura certainement des guitares au son lourd car nous possédons désormais un format bien déterminé. Nous avons une sonorité propre constituée de guitares et de cordes. C’est ce qui permet à la passion de continuer à être présente dans chacun de nos titres. Je n’ai pas à réfléchir sur le prochain album et à envisager qu’il soit Rock ou encore essayer de faire du MUSE ou quelque chose qui leur ressemble. C’est là que se trouve toute l’excitation, bon sang à quoi ressemblera-t-il ? Et au jour d’aujourd’hui, je n’en ai aucune idée.

MI. Steven Wilson adore PINEAPPLE THIEF. Il fait souvent référence à un album sorti il y a six ans Little Man ! Est-ce un album important pour toi ?
Bruce. Ah. C’est une question pertinente. Le problème avec Little Man, c’est qu’à la moitié de l’écriture ma femme et moi avons perdu notre enfant. Il est décédé, il était prématuré, il a vécu 10 jours puis s’est éteint. Car tout ce j’écris est autobiographique, et c’est pour cela que lors de la seconde partie de Little Man tout devient plus sombre. Ce n’est pas que j’ai écrit à ce propos mais mes sentiments à ce moment étaient...

MI. C’était une période très douloureuse !
Bruce. Oui. C’est quasiment comme s’il y avait eu un avant et après. Avant, j’écrivais et parlais de sentiments inhérents à l’arrivée d’un enfant au monde, c’était très joyeux et après je ne parlais plus que de mes émotions vis-à-vis de la perte de ce même enfant. Pour ces raisons, c’est un album intense. Mais je sais qu’il fait référence à Little Man et aussi plus particulièrement au titre « Snow Drops ». En fait c’est vraiment spécial pour moi de savoir que Steven Wilson l’a écouté et apprécié. Je pense que nos fans lui ont surement fait parvenir une copie de ce morceau.

MI. Mais désormais c’est un ami ?
Bruce. Oui, c’est un de mes meilleurs amis.

MI. Est-ce qu’il te soutient ?
Bruce. Oui. Oui. Je n’ai rien à dire. Il est parfait.

MI. Comment se passe ta relation avec Steven, est-ce qu’il te donne des conseils ?
Bruce. Tout le temps. Tout le temps !!! En fait, je l’ai rencontré il y a quelques jours à Amsterdam. On s’est retrouvés bêtement à jouer le même jour, on était littéralement à deux pas l’un de l’autre. Autant te dire que ça ne sentait pas bon pour nous car tout le monde est partit voir le concert de Steven Wilson ! [Rires] ... Mais il m’a envoyé un texto me demandant si c’était possible qu’on se voie et qu’on bavarde un peu ce qui m’a fait plaisir. On peut rien dire concernant Steven Wilson, il a toujours été merveilleux avec nous.

MI. Tu penses travailler avec lui dans le futur ?
Bruce. Tu sais il ne faut jamais dire jamais. Mais ça se sera totalement à l’initiative de Steven, il fait tellement de choses à la fois que je ne sais pas comment il arrive à gérer tout ça. Beaucoup de personnes me demande si c’est possible mais...

MI. Penses-tu inviter de nouveaux guest sur les prochains albums et si oui quel genre de musiciens inviterais-tu ?
Bruce. Oui, car j’ai toujours désiré avoir plusieurs chanteurs à mes cotés car mon style de chant est très prononcé et facilement reconnaissable. Tu vois, j’aimerais chanter comme Dave Grohl mais je ne peux tout simplement pas chanter comme lui, si j’essayais je serais le nouveau Billy Corgan en plus chétif ! [Rires] ... J’aimerais aussi avoir de nouveaux guitaristes en invités, oui se serait vraiment pas mal du tout.

MI. Une collaboration avec RUSH, ça te plairait ?
Bruce. Oui, oh mon dieu, oui. Je vais d’ailleurs aller les voir au mois de mai, ils sont actuellement en tournée et je ne les ai jamais vu en concert. On a évolué entant que groupe et ils ont toujours eu une grande influence pour nous. J’avais une cassette vidéo d’un de leurs lives qui m’a beaucoup inspiré, je le regardais en permanence lorsque j’étais gosse.

MI. Quel est le premier album qui t’a donné l’envie de devenir musicien ?
Bruce. Le premier album qui m’a fait prendre conscience et m’a donné envie de jouer de la guitare fut Tales And Mystery Of Imagination de THE ALAN PARSON PROJECT qui est sorti en 1976. C’est un pur album Pop/Rock, c’est une œuvre concept en hommage à Edgar Alan Poe. Je devais avoir 12 ans et je me suis rendu chez un ami et sa mère a mis le vinyle sur une chaine hifi très très onéreuse à l’époque. Je frétillais lorsque le couvercle s’est abaissé et lorsque j’ai entendu le cliquetis du bras. C’était juste un nouveau monde qui s’ouvrait à moi. C’était Waoh, c’est ça la musique ! Ce fut la pierre angulaire de mon architecture musicale. Et peu de temps après avoir écouté ce disque, je suis sorti m’acheter une guitare.

MI. Comment c’est passé ton travail avec Storm Thorgerson (PINK FLOYD, LED ZEPPELIN, PETER GABRIEL, DREAM THEATER) ?
Bruce. ... Il est à l’origine de la pochette de Tales And Mystery Of Imagination de THE ALAN PARSON PRJECT.

MI. Je suppose que c’était un peu comme un rêve de collaborer avec lui ?
Bruce. C’était tout simplement hallucinant qu’il ait décidé d’accepter de travailler avec nous car il était évident qu’on ne pouvait pas se permettre de l’engager, de plus il travaillait sur la cover du nouveau MUSE, celle de BIFFY CLYRO aussi et d’autres projets qui disposaient de très gros budgets. Et en fait, il nous a dit qu’il aimait notre musique et donc il a décidé de baisser sa rémunération pour faire l’artwork de Someone Here Is Missing et on a donc eu notre pochette. D’autant plus que j’ai participé à l’élaboration de cette image. J’ai ajouté les post-it qui la compose, ce qui est particulièrement rare car Storm Thorgerson ne laisse jamais un groupe travailler à la conception du projet sur lequel il travaille. Ce fut spécial.

MI. Ca veut dire que tu as envie de travailler à nouveau avec lui ?
Bruce. J’adorerais. Mais pour le moment il n’est pas en grande forme en fait et l’année passée, j’ai collaboré avec son équipe qui fut vraiment très pro. On ne sait jamais. (Storm Thorgerson est décédé le 18 Avril 2013).

MI. En novembre dernier, tu as mis en ligne un live uniquement disponible en téléchargement...
Bruce. C’est vrai, oui. Je pense que pour PINEAPPLE THIEF, ce sont les performances live qui nous ont pris du temps à améliorer. Alors maintenant, nous désirons que nos fans viennent nous voir sur scène car c’est un show totalement diffèrent de ce que nous faisions auparavant. Si tu nous avais vus il y a deux ou trois ans, c’était carrément un autre groupe sur scène.

MI. Quels sont les différences notables ?
Bruce. Nous avons décidé de regarder les autres groupes et avons remarqué qu’il n’y avait pas cette étincelle, cette magie chez nous qui les caractérisait. Nous nous sommes donc assis et avons récapitulé tous ce qui fonctionnait chez eux et avons commencé par investir dans un meilleur équipement, choisis de passer plus de temps à répéter et acquérir ce niveau de professionnalisme qui nous faisait défaut. Je crois que c’est à la suite d’une sortie de concert que nous avions complètement raté que nous avons eu le déclic, nous nous somme dis soit on fout tout en l’air soit on le fait correctement. Alors on a juste pris la décision de le faire convenablement. C’est dur tu dois juste travailler d’avantage afin de progresser sur scène.

MI. Tu as beaucoup utilisé ton studio d’enregistrement pour All The Wars ?
Bruce. Oui, nous enregistrions les guitares, les voix ainsi que les percussions dans mon studio puis nous allions les enregistrer de meilleure façon au studio pro du label.

MI. Vous avez enregistré une partie des titres dans une chapelle en Angleterre ?
Bruce. Oui, la chapelle à Lincolnshire, c’est un endroit magnifique. C’est un studio d’enregistrement résidentiel avec un cottage sur le coté, de nombreux grands groupes ont joués dans cet endroit. Les gros studios se font une concurrence féroce depuis un certain temps et il est donc beaucoup plus facile d’obtenir des rabais aujourd’hui, contrairement aux années 70/90 où il fallait négocier les contrats avec des sommes à six chiffres. Je ne sais pas si tu as vu le documentaire fait par Dave Grohl (FOO FIGHTER) sur Sound City, mais c’était un temple de l’enregistrement dans lequel de grands albums furent composés et enregistrés qui a maintenant fermé ses portes. C’est principalement dû au téléchargement qui permet de travailler à la maison grâce à des systèmes performants, les studios sont aussi équipés de nouvelles consoles ultramodernes, ce qui a tout changé au niveau des coûts.

MI. Tu penses que les nouvelles technologies ont contribué à la fin de l’industrie de la musique ?
Bruce. C’est vrai que maintenant tu peux composer et enregistrer sur un Ipad, tu détiens beaucoup plus de potentiel avec un Ipad ou un Smartphone qu’avec mon studio personnel de 1999 où j’ai enregistré Abducting The Unicorn, ce qui est une chose positive somme toute. Mais je pense qu’il y a là une perte de romantisme aujourd’hui car chacun peut enregistrer ailleurs que dans un studio classique. Quand nous étions jeunes, on devait économiser jusqu’à atteindre la somme nécessaire puis se rendre au studio d’enregistrement, c’était la seule et unique façon de faire un disque.

MI. Tu veux dire par là que trop de gens font de la musique ?
Bruce. Oui, mais que les meilleurs arrivent au top !

MI. C’est donc plus difficile d’y parvenir ?
Bruce. Difficile ? Hum... C’est plus simple de sortir un album et d’être écouté, mais il est devenu plus dur d’être remarqué par le public.

MI. Tu as l’impression d’aborder une nouvelle étape dans ta carrière de musicien ?
Bruce. Oui, parfaitement nous faisons quelques progrès qui s’inscrivent dans une évolution positive.

MI. Peut-on dire que vous êtes toujours un groupe de rock alternatif ?
Bruce. Oui, je pense car même si tu écoutes notre performance de ce soir, il y a peut-être des morceaux que tu ne qualifieras pas d’alternatif mais pour moi, ils le sont. Tous ceux que je joue représentent toutes ces influences de rock alternatif des années 70 avec lesquelles j’ai été bercé étant jeune, surtout quand tu prends en compte la structure des chansons, les cadences, la dynamique et les couches de cordes. Donc oui si quelqu’un écoutait l’album All The Wars je pense qu’il trouverait les sons issus du rock alternatif et je serais obligé d’acquiescer car effectivement, c’est un opus de Rock alternatif.

MI. C’est pourquoi il y a de nombreux titres plus longs qui dépassent les dix minutes sur tes albums, penses-tu en inclure sur le prochain ?
Bruce. Absolument. Oui, car ça résume simplement tout ce que j’écoute, j’adore une chanson rock de trois minutes trente si c’est très bien fait mais j’aime aussi les morceaux de rock alternatif de dix ou quinze minutes. Si elle est écrite pour être bonne durant ce temps et non pas juste faite pour durer quinze minutes.

MI. Quel est le meilleur compliment que l’on t’a fait à propos de PINEAPPLE THIEF ?
Bruce. C’est une question difficile. Quand tu sors d’un concert et que les gens te disent que c’est le meilleur concert ou qu’il est dans le top 5 des meilleurs concerts auxquels ils se sont rendus au cours de leur vie, alors qu’on doit encore s’améliorer sur scène, ça c’est un compliment.

MI. Est-ce qu’il y aura une édition limitée du prochain cd ?
Bruce. Oui, c’est certain car maintenant que nous bénéficions d’une meilleure couverture médiatique grâce à Kscope et que nous vendons beaucoup plus d’unités qu’auparavant, je pense qu’il y en aura une. De toute manière il y a toujours une édition limitée de nos jours, c’est presque obligatoire. Par exemple, si tu regardes la version collector du dernier AMPLIFIER, il y un livret de 50 pages magnifiques à l’intérieur et c’est une bonne initiative ! C’est vers cela que je tends.

MI. Tu es sur le même label qu’ANATHEMA et Steven Wilson, es-tu fière du chemin parcouru ?
Bruce. C’est un réel privilège d’être là.

MI. Pour finir, comment te sens-tu juste avant le concert de ce soir ?
Bruce. J’avais pour habitude d’être complètement pétrifié d’effroi, je me demandais pourquoi je faisais ça car je me sentais extrêmement nerveux avant chaque show mais maintenant, j’ai conscience que PINEAPPLE THIEF est au top et désormais nous sommes plus surs de nous et nous partageons de bons moments sur scène donc j’ai hâte de monter sur les planches.

MI. Quand je te regarde, tu parais serein !
Bruce. Oui.

MI. Merci beaucoup pour l’interview. Y a-t-il une chose importante que tu souhaiterais ajouter ?
Bruce. Je voulais juste dire que d’être en France et de voir des gens se déplacer à nos concerts représente beaucoup plus que ce que certains peuvent imaginer. Quand nous sommes sur scène et que nous voyons des sourires et des applaudissements, c’est incroyable et c’est un privilège de pouvoir vivre cela. Je tenais simplement à dire un grand merci à tous ceux qui nous soutiennent car sans eux nous n’en serions pas là.


Ajouté :  Lundi 14 Octobre 2013
Intervieweur :  The Veteran Outlaw
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