Avant même de s’étendre sur les raisons qui font de ce WhoCares un objet rare et intéressant, il est bon de rappeler les origines d’un duo autrefois réuni sous le nom de BLACK SABBATH en 1983, lorsque Ian Gillan (DEEP PURPLE) avait rejoint le plus célèbre inventeur de riffs Heavy Metal de toute la planète, à savoir Tony Iommi. Ainsi, nos deux compères, qui ne se sont jamais perdus de vue, ont remis le couvert en 2011 à des fins caritatives, dans le but de faire reconstruire une école de musique dans la ville de Gyumri, bourgade arménienne sévèrement secouée en 1988 par de terribles tremblements de terre. Comme ça, vous savez tout, et la démarche de ces deux papys du Metal paraît plus qu’honnête.
A la base, seul un single est sorti (le 24 Mai 2011) sous le titre « Out Of My Mind », mais une fois lancés, Iommi et Gillan, sous la gouverne du label earMusic, ont décidé de publier un riche et double album, non pas constitué de nouveaux titres, mais revenant sur leurs carrières respectives, et parfois croisées. L’occasion est trop belle, pour les admirateurs, mais aussi pour tout fan de Metal qui se respecte, de découvrir des tranches de vie parfois oubliées de Iommi ou Gillan, des titres sous-estimés, ou des bœufs insoupçonnés.
Votre serviteur n’étant pas un adepte du « track by track », il va se permettre pour une fois une exception. Car même si WhoCares propose quelques passages fort dispensables, il mérite toutefois qu’on s’attarde en détail sur chaque chanson, au moins pour l’anecdote qu’elle révèle … Alors c’est parti.

« Out Of My Mind »
C’est le fameux single, joué par un line-up de rêve : Tony Iommi (guitares), Ian Gillan (chant), Jason Newsted (ex-METALLICA, basse), Mikko Lindström (HIM, guitares), Jon Lord (DEEP PURPLE, claviers) et Nicko McBrain (IRON MAIDEN, batterie) ! Sans surprise, voilà un titre efficace qui sonne comme du BLACK SABBATH et présente un Nicko McBrain encore plus Heavy qu’avec la Vierge de Fer.

« Zero The Hero »
On raconte que ce titre serait le meilleur et le plus représentatif du BLACK SABBATH avec Ian Gillan. Issu du fameux Born Again (Août 1983), ce Heavy « Zero The Hero » rappelle que l’intronisation de Gillan ne fut pas la meilleure idée de Iommi à l’époque. Mais aussi que l’esprit de Ronnie James Dio (parti après l’album live Live Evil en 1982) devait encore hanter les nuits du brun guitariste.

« Trashed »
Extrait d’un album solo de Gillan (Gillan’s Inn en Avril 2006), « Trashed » met en scène Tony Iommi (guitares) mais aussi la section rythmique de DEEP PURPLE, à savoir Roger Glover (basse) et Ian Paice (batterie). Une sorte de DEEP SABBATH ou BLACK PURPLE si vous préférez ! Pas désagréable mais quand même assez répétitif, « Trashed » révèle sans ambiguïté que la façon de chanter de Ian Gillan évoque celle de Bruce Dickinson (IRON MAIDEN). Ou l’inverse ?!!!

« Get Away »
Le temps d’une chanson, Ian Gillan s’est invité sur l’album Etsi M’Aresei du chanteur grec Mihalis Rakintzis. « Get Away », pas Metal pour un sou et carrément exotique, fait office de récréation mais sans grand intérêt, finalement …

« Slip Away »
De nombreuses fois, Tony Iommi et Glenn Hughes (BLACK COUNTRY COMMUNION, ex-TRAPEZE et ex-DEEP PURPLE) on tenté de collaborer sur un même album. Ce qui devait être une aventure solo de Iommi en 1986 avec le père Hughes au chant devint malheureusement, sous la pression de la Warner, un album de BLACK SABBATH, Seventh Star, à la grande colère de Glenn. Heureusement, l’album Fused en 2005 permit à Iommi d’inviter à nouveau le bassiste / chanteur à la voix d’or. « Slip Away », titre inédit issu de ces sessions d’enregistrement, sonne comme du SOUNDGARDEN (ça tombe bien, les Cornell et compagnie n’ont jamais caché l’influence de Iommi). Bien loin de l’univers de Glenn Hughes, mais à découvrir quand même.

« Don’t Hold Me Back »
Voici venue une ballade fort agréable, tirée du Toolbox de Gillan en 1991. Le genre de titre que n’aurait pas renié David Coverdale et son WHITESNAKE version Restless Heart. Un titre plein de classe, avec un Gillan en grande forme, accompagné par Steve Morris (guitares), Brett Bloomfield (basse) et Leonard Haze (batterie). Excellent !

« She Thinks It’s A Crime »
Ce morceau funky et tranquille, que l’on peut entendre sur One Eye To Morocco (2009) de Ian Gillan, voit le chanteur du Pourpre Profond évoluer dans un registre un peu différent. Mais c’est tout …

« Easy Come, Easy Go »
Quand AIRBOURNE rencontre Ian Gillan !! Ce morceau sans prétention mais carrément Rock témoigne de l’unique duo entre REPO DEPO et Ian Gillan enregistré en 1994.

« Smoke On The Water » (Live)
C’est LE titre qui justifierait à lui seul l’acquisition de WhoCares. Imaginez le morceau au riff le plus célèbre de toute l’histoire de la musique, accompagné de cuivres, d’un orchestre philharmonique, et sur lequel intervient le grand, l’unique, le magique … Ronnie James Dio ! Tirée du Live At The Royal Albert Hall (2000) de DEEP PURPLE, cette version revisitée de « Smoke On The Water » sonne à la fois groovy et grandiloquente. Un grand moment, magnifié par la présence vocale de Dio.

« Holy Water »<br< C’est la face B du single « Out Of My Mind », interprété par Ian Gillan, Tony Iommi, mais aussi Steve Morris (guitares), Michael Lee Jackson (guitares), Rodney Appleby (basse), Randy Clarke (batterie) et Jesse O’Brien (claviers). Introduit par des airs de Duduk (le fameux instrument redécouvert dans le « Gladiator » de Ridley Scott), « Holy Water » fait davantage penser à du DEEP PURPLE « light », de par l’orgue de Jesse O’Brien et les intonations atypiques de Gillan.

« Anno Mundi »
Voilà un morceau qui permet de rappeler que le BLACK SABBATH version 1990 (album Tyr) ne méritait pas un traitement si défavorable. Tony Martin assurait au micro, Cozy Powell était à la batterie, Neil Murray (ex-WHITESNAKE) tenait la basse, et les compos n’avaient rien à envier à celles qui viendraient sur le prodigieux Dehumanizer (1992) avec Dio. A noter que Tony Martin, dont le timbre évoque par instants celui du lutin, ferait des miracles aujourd’hui dans n’importe quel combo de Heavy Metal mélodique. Qu’est devenu ce chanteur ?! …

« Let It Down Easy »

Comme « Slip Away », « Let It Down Easy » aurait du figurer sur le Fused de Tony Iommi. On reconnaît la voix de Glenn Hughes, qui se marie bien avec la rythmique grasse de Iommi.

« Hole In My Vest »

Il s’agit simplement de la face B du single « Nothing But The Best » de Ian Gillan, sorti en 1990. Typiquement Hard Rock dans l’approche, « Hole In My Vest » fait la part belle aux talents guitaristiques de Steve Morris.

« Can’t Believe You Wanna Leave Me »
Initialement compose par Lloyd Price et interprété par Little Richard, ce morceau forcément Blues a été repris par le tandem Ian Gillan / Roger Glover en 1988 sur le disque Accidentaly On Purpose. A noter la présence au piano du grand Dr John, dont le talent a déjà éclaboussé les albums d’Eric Clapton, Bob Seger, Lou Reed, Ringo Starr ou encore John Mayall. Quand on vous dit que le Hard Rock vient entre autres du Blues, en voici la preuve !

« Can I Get A Witness »
Avant de rejoinder DEEP PURPLE à la fin des années 60, Ian Gillan officiait dans un groupe de Rock’n’Roll, THE JAVELINS. Aucun témoignage discographique de cette époque n’existait … jusqu’en 1994 ! Gillan et ses copains se sont réunis pour enregistrer Sole Agency And Representation, qui contient cette rigolote reprise de Marvin Gaye.

« No Laughing In Heaven »
Ce morceau légèrement ennuyeux enregistré sous le nom de GARTH ROCKETT AND THE MOONSHINERS dissimule en fait Ian Gillan et ses habituels acolytes. Sa rythmique répétitive transforme vite « No Laughing In Heaven » en moment le plus faible de WhoCares.

« When A Blind Man Cries »
Quel sacrilège ! Proposer une version acoustique de ce titre de DEEP PURPLE partait d’un bon sentiment. D’autant que Gillan est accompagné de son fidèle guitariste Steve Morris. Mais on lui préfèrera 100 fois la version qu’il avait enregistrée avec le regretté Jeff Healey (ce guitariste blond et surtout aveugle que vous pouvez apercevoir dans le film « Road House » avec Patrick Swayze) et Jon Lord. Dommage.

« Dick Pimple »
Plaisant, Rock, sympa, mais à des années lumières de tout ce que le Pourpre Profond générait il y a 20 ans. Ce titre inédit de DEEP PURPLE avec son line-up actuel confortera à jamais les irréductibles comme votre serviteur : DEEP PURPLE sans Ritchie Blackmore ne peut pas prétendre à s’appeler DEEEP PURPLE. Un point c’est tout !