OTARGOS (FRA) - Dagoth (Mars-2013)
OTARGOS, désormais valeur sûre de la scène Black Metal Française (mais plus si Black que ça, vous comprendrez en lisant la suite…) était de passage à Lyon pour participer aux côtés de 6 autres groupes à la première édition du VORMELA BLACK FEST. C’est donc Ulrich, alias Dagoth (chant/guitare), qui m’a accueilli dans les coulisses du CCO, histoire de faire un point sur les douze années de carrière qui viennent de s’écouler, de rentrer un peu plus dans le détail de leur philosophie et de parler de la suite du programme pour le groupe Bordelais...
Line-up : Dagoth (chant et guitare), VOiD (guitare), XXX (basse), Thyr (batterie)
Discographie : Conqueror, Conqueror... Destroyer (demo – 2002), Codex 666 – Infernal Legions Strike (EP – 2004), Ten-Eyes Nemesis (album – 2005), Spawn From The Abyss (compilation – 2006), Kinetic Zero (album – 2007), Fuck God–Disease Process (album – 2009), No God, No Satan (album – 2010), Heretic Live (live album – 2011)
M-I Interviews du groupe : OTARGOS (FRA) - XXX (Mai-2009), OTARGOS (FRA) - Dagoth (Mars-2013)
Metal-Impact. Douze ans déjà qu’OTARGOS existe... Quel regard portes-tu sur le chemin parcouru jusqu’à présent ? Es-tu satisfait du parcours de ton groupe depuis ses débuts ?
Dagoth. Oui, douze ans, effectivement... Satisfait, oui et non. Je pense que comme chaque groupe, on s’est souvent dit qu’on aurait dû faire ça, et pas ça. Actuellement, on est à l’heure où le groupe vit un changement de direction, au niveau de l’orientation, des visuels...
MI. De l’orientation musicale ?
Dagoth. Effectivement, on change quelque part de registre, mais on ne va pas faire non plus de la Pop (rires). Il y’a vraiment un gros changement par rapport à ce qu'OTARGOS était avant. Je te parlais des visuels tout à l’heure, tu verras ce soir. (ndi : XxX, bassiste du groupe, rentre dans la pièce et s’assoit sur un fauteuil près de nous). Je pense qu’on a évolué avec nous-mêmes, car quand on a commencé, on était plutôt ados mine de rien. On a commencé en étant assez classiques dans l’interprétation, pour finalement se tourner vers des choses plus personnelles.
MI. Ce qui frappe directement à l’écoute de votre musique, c’est cette approche sèche et radicale. On sent cependant que vous ne reniez pas un certain sens de la mélodie et de la subtilité qui me rappelle les récentes productions de WATAIN par exemple. Tu peux nous parler de vos influences ?
Dagoth. Je pense qu’elles sont assez diverses, car il y’a ce qu’on écoute, et ce qu’on fait, même si on est plus axés sur la composition. Personnellement, j’écoute principalement des vieux trucs, des SLAYER, des METALLICA, etc... et assez peu de Metal extrême récent, à part quelques groupes comme BEHEMOTH. Mais j’avoue rester assez cramponné à ce que j’écoutais plus jeune. Après, mon influence old-school ne se ressent pas dans ce que j’écris pour OTARGOS. Par exemple, je suis un grand fan de SCORPIONS... et on ne fait pas vraiment du SCORPIONS ! On est dans une mentalité où on préfère prendre les choses telles qu’elles sont, on évite de se dire en composant que telle chose est trop extrême, l’autre pas assez... D’où le fait que notre musique évolue ! Les derniers albums étaient assez Black Metal, et le prochain, tu verras, est vachement plus ouvert musicalement, avec pas mal de registres assez Heavy et Death. Du coup, le côté Black Metal hyper malsain est un peu passé à la trappe, d’une part parce qu’on en avait envie, et d’autre part, parce qu’on n’aime pas faire toujours la même chose. Notre dernier album (ndi : No God, No Satan) était assez brut, pauvre en arrangements. Et du coup, pour le prochain, j’ai pas mal travaillé sur la production et la diversité des compos.
MI. Tu me parlais de votre dernier album studio, No God, No Satan, qui date de fin 2010... Des projets à venir pour la suite ? Tu évoquais un prochain album studio...
Dagoth. Eh bien... Le prochain album est déjà enregistré ! On n’a pas encore de date prévue précisément, mais on pense le sortir vers la fin de l’année 2013, en septembre si possible. On profite de la tournée pour présenter le nouveau matériel, la setlist est majoritairement composée de titres du prochain album. Ce sont vraiment des dates intéressantes pour nous, et on tenait à présenter de nouveaux trucs au public, la nouvelle image du groupe... Du coup, on a mis au placard tout ce qui est corpse-paints et autres...
MI. Ah bon, vous ne vous maquillez plus ?
Dagoth. Eh nan, c’est fini (rires) ! C’est depuis assez peu en fait...
MI. Ça y’est, c’est la maturité ?
Dagoth. Ouais ouais, je pense qu’on peut dire ça comme ça. J’ai plus envie d’être apprécié en tant que musicien qu’en tant que... (Il hésite)
MI. ... bête de cirque ?
Dagoth. C’est quand même un peu extrême de dire ça, car je respecte quand même les groupes qui se servent de corpse-paints, qui jouent beaucoup sur l’image. Mais nous, on a plus envie de tout attacher à un visuel, une image. Tu vois, on a eu pas mal de retour des derniers concerts et on nous a dit que ça mettait vraiment plus en valeur la musique, et c’est ce que je recherche.C’est quand même un peu extrême de dire ça, car je respecte quand même les groupes qui se servent de corpse-paints, qui jouent beaucoup sur l’image. Mais nous, on a plus envie de tout attacher à un visuel, une image. Tu vois, on a eu pas mal de retour des derniers concerts et on nous a dit que ça mettait vraiment plus en valeur la musique, et c’est ce que je recherche.
MI. Maintenant, parlons intellectuel... Votre philosophie est peu commune pour un groupe de Black Metal... Ni dieu, ni diable ! Est-ce pour vous un moyen de vous extirper de la masse, de paraitre plus original sur le plan purement artistique? Ou bien est-ce que cette devise, si tu me permets d’appeler ça ainsi, régit vos vies en tant que personnes, et non en tant que membres d’OTARGOS ?
Dagoth. Il y’a une part des deux. Je vais parler en mon nom car c’est moi qui écris et compose... Effectivement, ce sont mes convictions. Je n’ai pas envie d’appeler ça une philosophie de vie, c’est con dit comme ça. On a commencé dans ce milieu là, j’étais ado, dans mon trip pseudo-sataniste, fan de DARK FUNERAL, EMPEROR, tous ces groupes là... Et vient le moment où tu t’intéresses philosophiquement à ce que tu dis, et où tu te rends compte que ça ne te correspond pas, tout simplement. Je respecte tout à fait les groupes qui ont choisi ce chemin. Etant scientifique, la religion, le Bien, le Mal, etc... C’est du vent à mes yeux. Pour revenir à ta question, oui, nous nous sommes dirigés vers cette idéologie pour affirmer notre identité. Mais nous n’avions pas en tête de faire un coup commercial ou un buzz. C’est vraiment pas évident d’être dans un tel milieu, et de dire quelque chose qui va à contre-courant de ce que pense tout le monde dans cette communauté, sachant que musicalement, OTARGOS se rapproche beaucoup de tous ces groupes. Ce n’est pas un coup commercial, car ça serait mal joué (rires). Ce sont réellement nos convictions. Je ne crois ni à Dieu, ni au diable, je crois en la matière. Philosophiquement, on ne se considère pas comme un groupe de Black Metal, et c’est pour ça qu’on veut faire prendre une nouvelle direction musicale à OTARGOS. Je me sens de plus en plus proche de groupes de Death Metal...
MI. D’ailleurs, ça s’entend dans votre musique, surtout sur le dernier album...
Dagoth. Tu verras, c’est encore plus net sur le prochain (rires) !
MI. Les paroles que tu écris s’attaquent beaucoup à la futilité humaine, à sa faiblesse... Ton opinion est-elle si pessimiste que le laisse paraître tes textes ?
Dagoth. Ah putain, ouais (rires) ! Pour moi, on est rien, on ne sait rien, on ne saura jamais rien et on ne va nulle part. Notre existence n’est qu’un clignement d’œil. Je n’ai pas cette vision égocentrique, comme quoi l’Homme serait au centre de l’Univers. J’en ai rien à foutre de mon prochain, comme de ce qu’il va se passer plus tard. Je m’intéresse à ce qu’il se passe autour de moi, et c’est pour ça que la religion, je ne peux pas (Le lien de cause à effet ?). C’est l’Homme qui a créé les dieux pour se rassurer.
MI. En 2009, un collègue vous avait interviewés, et lors de cet entretien, vous aviez déclaré, je cite, qu’« OTARGOS se dresse au dessus des croyances et des religions ». Voulez vous dire par là qu’OTARGOS est supérieur à la religion, dans la mesure où l’idéologie que vous prônez mériterait plus d’attention que les autres religions ?
Dagoth. Alors là, c’est le paradoxe de la non-religion qui serait une religion dont tu me parles ?
MI. Oui, c’est exactement ça !
Dagoth. Je ne sais pas si tu connais un peu, mais c’est comme dans le jeu Warhammer 40000. C’est un jeu de plateau où ils ont éradiqué toutes les religions, et ce mépris vis-à-vis de la religion devient lui-même une religion... Pour ce qui est de ta question, quand on a dit ça, ce n’était pas pour dire que nous sommes au dessus de ça, mais tout simplement qu’on s’en branle. OTARGOS est basé sur l’antithéisme, c’est aussi simple que ça. Notre but n’est pas de dire aux autres groupes qui prôneraient l’idéologie sataniste « ouais, c’est de la merde ce que vous dites ».
MI. Vous êtes actuellement en tournée avec ANAAL NATHRAKH... Tout se passe comme vous le souhaitiez ?
Dagoth. Eh bien, jusque là, les dates étaient vraiment supers. J’espère que ca sera le cas ce soir aussi ! Les mecs sont cool et très sympas avec nous, et scéniquement, c’est un truc de dingue (rires) !
MI. Un mot à dire sur le Vormela Black Fest, où vous allez jouer ce soir ?
Dagoth. On est un peu déçus de passer un peu tôt. On passe vers 18h30, quelque chose comme ça. Ceci dit, c’est pas plus mal, comme ça on pourra profiter de l’ambiance et de tout le reste (rires) !
MI. Pendant qu’on est sur les concerts, parlez-nous de votre rapport à la scène...
Dagoth. On aimerait en faire plus (rires) ! Sérieusement, on aime énormément jouer en live. C’est très important pour nous, car la scène régit d’une certaine manière le mode de composition, dans la mesure où on veut écrire quelque chose qui sera intéressant joué en concert. Pendant le processus de compo, on essaye de garder le plus possible à l’esprit que ça devra être joué sur scène. Et puis tout simplement, jouer sur scène, on adore ça. J’attache beaucoup d’attention au rapport avec le public, avec les fans, c’est primordial.
MI. Vous avez tourné avec de nombreux groupes tous plus prestigieux les uns que les autres tels que DARK FUNERAL, WATAIN... Êtes-vous spécialement fans de ces groupes précisément ?
Dagoth. Très bonne question ! Pour DARK FUNERAL à l’époque, (ndi : OTARGOS a tourné avec DARK FUNERAL en 2006), ouais carrément ! D’ailleurs, c’était pas ici qu’on avait joué avec eux ? (ndi : du fond de son siège, XxX dit que c’était au Transbordeur, autre salle Lyonnaise) Bref ! Oui, en effet, c’était vraiment une référence pour nous ce groupe là, mais bon, maintenant, on s’en foutrait un peu de tourner avec DARK FUNERAL... Après, le schéma est connu de tous, il y’a ceux qui tournent avec d’autres groupes parce qu’ils sont fans de ces groupes là en particulier, et il y’a ceux qui utilisent la notoriété d’un gros groupe pour se faire connaître. Après, eh bien, que dire pour WATAIN.... je vote blanc (rires) ! Musicalement, ouais, humainement, non.
MI. Pourquoi, ce sont des cons ? Ca m’embête d’entendre dire ça d’un de mes groupes fétiches (rires) !
Dagoth. Non non, pas du tout. Mais OTARGOS et WATAIN ne sont pas du tout dans le même monde, c’est tout. Comme je le disais tout à l’heure, musicalement c’est vraiment bon, j’aime beaucoup. Après, nous, on n’a rien à dire à ces gens là.
MI. Y’a-t-il d’autres groupes avec lesquels vous souhaiteriez tourner ?
Dagoth. Maintenant, on aimerait tourner avec des groupes de Death... La plupart des groupes de Black sont hyper ancrés dans leur truc, dans leur philosophie, ils sont sincères dans ce qu’ils font, mais à côté de ça, ils sont nazes. On n’est pas vraiment dans leur délire... A moins que ce soit nous qui soyons insociables (rires) ? L’ambiance avec WATAIN par exemple, c’était vraiment lourd, pas chaleureux. Je suis certain que tourner avec des groupes de Death Metal, ça serait vraiment plus bon enfant, plus amical, sans aller non plus jusqu’à la fête à la saucisse ! Des groupes comme BENIGHTED, c’est vraiment plus agréable à côtoyer...
MI. D’ailleurs, j’ai croisé Julien (ndi : chanteur de BENIGHTED) tout à l’heure...
Dagoth. Oui, il fait un guest avec nous ce soir, sur un titre du prochain album.
MI. La réputation d’OTARGOS est faite en France, le public vous apprécie. Qu’en est-il à l’étranger ? D’ailleurs, il me semble que vous avez tourné très loin, jusqu’au Brésil...
Dagoth. Partout où on est passés, on a toujours eu de bons retours. Honnêtement, je pense que les retours sont toujours meilleurs à l’étranger. En France, on a une réputation assez partagée. On nous a pas mal craché dessus vu qu’on faisait pas mal de pubs, de promos, tout ça. Les gens nous prenaient pour des vendus, essentiellement les vrais blackeux, les puristes, qui nous reprochaient de ne pas avoir de pochettes en noir et blanc par exemple. Le plus amusant dans tout ça, c’est qu’on ne s’est jamais revendiqués groupe de True Black Metal. A la limite, on était méprisés par le public qui ne nous intéressait pas. Et on est toujours méprisés par ce public ! Et puis bon, c’est connu, plus tu es apprécié, plus tu es détesté...
MI. C’est sur... Regarde ce qu’il se passe avec GOJIRA depuis qu’ils sont signés sur Roadrunner !
Dagoth. Bin ouais, mais je trouve ça vraiment cool pour eux ! Après, d’aimer ou pas la musique, c’est encore autre chose. Ce n’est pas normal de critiquer un groupe pour ce qu’il a fait pour essayer de faire valoir et connaître son groupe, on ne peut pas reprocher ça.
MI. Le line-up d’OTARGOS est très stable depuis ses débuts. Une telle cohésion est-elle importante à vos yeux ?
Dagoth. Oui. C’est quand même plus sympa de bien se connaître et de bien s’entendre pour évoluer dans le bon sens. Même si on n’a pas les mêmes caractères et comportements.
MI. Vous êtes signés depuis 2010 chez Season Of Mist. Qu’est-ce qui vous a amené sur ce label plus que sur un autre et est-ce que tout vous convient dans la relation aussi bien du point de vue humain que de celui du business ?
Dagoth. C’est vraiment du tout bénef’ pour nous, car c’est quand même un assez gros distributeur international et qui est basé en France. On entretient globalement de bons rapports avec eux.
MI. Que pensez tu de la scène Black Metal actuelle de l’hexagone ? Y’a-t-il des groupes en particulier que vous soutenez et que vous appréciez ?
Dagoth. C’est évident, il y’a de bons groupes. Mais bon, je ne suis peut être pas le meilleur pour répondre à ça, vu que je ne m’intéresse pas énormément à toutes les nouveautés... Tous les groupes Français qui marchent le mieux, genre ANTAEUS, tous ces trucs là, c’est pas ma came. Mais sinon, j’ai eu un coup de cœur pour NECROBLASPHEME, même si on ne peut pas dire que ce soit vraiment du Black Metal.
MI. Des coups de cœur musicaux que tu voudrais partager ? Fais nous rêver !
Dagoth. REGARDE LES HOMME TOMBER (rires) ! C’est un groupe dans lequel je chante. Au passage, on fait la première partie d’ENSLAVED la semaine prochaine à Paris. Mais ouais, écoute, c’est un bon groupe !
MI. Tradition oblige, je vous laisse le mot de la fin...
Dagoth. Tout simplement, on est très contents de jouer, ou rejouer, du coup je ne sais plus, ici ce soir. Ça va être sympa, l’intervention de Julien. On va présenter comme expliqué tout à l’heure le nouveau OTARGOS, et j’ai envie de dire à ceux qui ne sont pas contents... Pas de bol (rires) !
MI. Merci pour cet entretien en tout cas...
Dagoth. Merci à toi !
Ajouté : Vendredi 05 Avril 2013 Intervieweur : Hizia Lien en relation: Otargos Website Hits: 14059
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