NECROPHAGIA (FRA) - Frank "Killjoy" Pucci (Juin-2012)
Rencontre au Hellfest édition 2012 avec Killjoy, leader de NECROPHAGIA, qui, mine de rien, écume la scène depuis maintenant 30 ans. Une interview entre Metal et horreur – le sieur étant un fanatique du genre – au cours de laquelle il parle de ses petits collègues sans langue de bois.
Line-up : Frank "Killjoy" Pucci (chant), Scrimm (guitare), Abigail Lee Nero (guitare), Shawn Slusarek (batterie), Damien Matthews (basse)
Discographie : Season Of The Dead (Album, 1987), Ready For Death (Album, 1990), Death Is Fun (Compilation, 1994), Holocausto de la Morte (Album, 1998), Through The Eyes Of The Dead (Vidéo/VHS, 1999), Black Blood Vomitorium (EP, 2000), A Legacy Of Horror, Gore, and Sickness (Compilation, 2000), Cannibal Holocaust (EP, 2001), The Divine Art Of Torture (Album, 2003), Goblins Be Thine (EP, 2004), Nightmare Scenarios (DVD, 2004), Harvest Ritual Volume I (Album, 2005), Still Wrists And Casket Rot (Live, 2006), Deathtrip 69 (Album, 2011)
Metal-Impact. Il y a quelques heures vous vous produisiez sur scène. Pour beaucoup de musiciens, c'est la partie la plus agréable du « job ». Et en ce qui te concerne ?
Frank "Killjoy" Pucci. Quand tu joues dans un festival comme le Hellfest, cela te permet de toucher un large public, mais, d'un autre côté, tu n'es pas forcément accompagné de ton propre ingé son ni de tes décors de scène. Or, il me semble important pour NECROPHAGIA d'être en mesure de développer tout le côté visuel qui va avec sa musique. Sur scène, tu retrouves certes une énergie particulière mais je me sens un peu frustré, lorsque je me produis dans un festival, de ne pas pouvoir mettre notre musique en images, d'autant que, étant fans d'horreur, notre musique est très « imagée ».
MI. Comment se porte ta voix alors que cela fait maintenant 30 ans que tu la tortures ?
Killjoy. Je n'ai jamais eu de problème avec. Lorsque je ne chante pas, je la préserve : je parle doucement, rien à voir avec ma voix sur album.
MI. Un nouvel album, Whiteworm Cathedral, devrait sortir sous peu – vous en avez d'ailleurs joué un morceau tout à l'heure. Concernant la date de sortie, tu exprimais quelques incertitudes...
Killjoy. En effet. L'album devait initialement sortir pour Halloween 2012, mais nous n'avons pas été en mesure de tenir les délais.
MI. Votre précédent album, Deathtrip 69, date de 2011. Vous ne vous avez pas habitué à une telle productivité...
Killjoy. Cela ne se commande pas. J'étais particulièrement inspiré. Une fois Deathtrip 69 achevé, je n'ai pas souhaité partir en tournée, j'avais besoin de mettre sur le papier tout ce que j'avais dans la tête. Et si d'ailleurs, nous avons pris du retard sur la sortie de Whiteworm Cathedral, c'est que j'avais trop d'idées et que j'ai du me contraindre à un moment de dire stop.
MI. A quoi faut-il s'attendre sur ce nouvel opus ?
Killjoy. C'est un retour aux sources, avec une musique brute, plus d'acoustique ni d'intros, même si nous gardons les samplers. Sur Deathtrip 69, il y avait des morceaux comme « A Funeral For Solange » ou « Death Valley 69 », qui nous éloignaient de notre registre traditionnel. Le risque, c'est que si tu fais trop de morceaux de ce genre, ça en devient prévisible et c'est ce que nous ne voulons pas.
MI. Quelle est l'importance des paroles pour toi ?
Killjoy. Elles sont très importantes pour moi. Je commence d'ailleurs par les lyrics et la musique doit ensuite s'y adapter.
MI. N'as-tu jamais été tenté par un concept album, comme KING DIAMOND par exemple ?
Killjoy. Pas vraiment. Chez KING DIAMOND et MERCYFUL FATE, il y a par exemple de bonnes idées, de bons concepts mais je trouve que, musicalement et textuellement, en cherchant à tout prix à relier les titres entre eux, chaque titre pris en lui-même perd de son impact. Je ne suis donc pas dans l'optique de développer un concept album, à une exception près, même si ce n'est pas un concept à proprement parler, puisque mon side project Black Metal, HAXXEN, tourne autour de la vie d'Aleister Crowley.
MI. En matière d'horreur, tu es plus influencé par les films que par des écrivains comme Poe ou Lovecraft...
Killjoy. Mais cela ne m'empêche pas de beaucoup aimer Lovecraft : d'ailleurs, sur notre nouvel album, nous avons un titre inspiré de la nouvelle La maison de la sorcière. Il m'est aussi déjà arrivé de reprendre des trucs chez Jack Ketchum et Clive Barker mais il est vrai que l'inspiration me vient plus naturellement à travers les films.
MI. Te souviens-tu de ton premier film d'horreur ?
Killjoy. Je me souviens à 5 ans avoir vu un film de la Hammer avec Christopher Lee avec des yeux rouge sang, qui m'a terrifié. Peu après, ont suivi Black Sunday et La nuit des morts-vivants et le mal était fait...
MI. En tant que fan de films d'horreur, dirais-tu que le gore est plus efficace que la peur ? Que de montrer les choses est plus terrifiant que de les cacher ?
Killjoy. Je suis partagé. Trop de gore tue le gore, le spectacle finit par perdre de son impact et de son intensité, car le spectateur finit par être désensibilisé. C'est plus efficace dans un film avec un bon scénario et une bonne atmosphère. C'est le cas avec des réalisateurs comme Mario Bava et Dario Argento.
MI. Pour toi, le gore est-il exclusivement sérieux ou peut-il aussi être grotesque, voire fun ?
Killjoy. Je préfère quand c'est sérieux et du moment où ça reste de la fiction. Je n'aime pas les trucs à la Face à la mort (ndi : film de 1978, s'inscrivant dans la mouvance de Mondo Cane et nous offrant un voyage autour du monde d'images de violence et de mort). Parce que j'écris des textes sur l'horreur, certains pensent que ça m'intéresse alors ils m'envoient des vidéos d'accidents de voiture, de cruauté sur animaux, mais ce n'est définitivement pas ma came...
MI. Quel est selon toi la décennie d'or du film d'horreur ?
Killjoy. Les années 70-80. Je pense que les films français de genre aujourd'hui, avec des titres comme Haute Tension, Martyrs, A l'intérieur, sont les dignes successeurs de la grande époque du cinéma de genre italien (ndi : Killjoy évoque également Kidnappés, qui en fait n'est pas français, mais espagnol).
MI. Tu as eu l'occasion de voir ces films qui ont fait sensation comme A Serbian Film et The Human Centipede ?
Killjoy. Oui. L'idée derrière The Human Centipede est vraiment originale et le docteur flippant, mais je pense qu'il en montre trop peu, ils auraient dû enlever les pansements.
MI. Tu as été impliqué dans un certain nombre de projets vidéos, voire cinématographiques avec August Underground's Mordum. Est-ce une expérience que tu envisages de renouveler ?
Killjoy. Je ne me considère pas comme un acteur. Par contre, je souhaiterais réaliser. J'ai deux scripts sous le coude depuis pas mal de temps déjà mais j'attends d'en avoir fini avec la musique pour me lancer car je ne tiens pas à faire deux choses en même temps.
MI. Tout cela est-il déjà programmé ?
Killjoy. Non, car cela change tout le temps. Il m'arrive de me réveiller le matin et d'avoir envie de tout arrêter, puis une nouvelle idée de compo me vient et je ne peux pas la laisser inexploitée, d'autant que je n'envisage pas d'intégrer du Metal dans mes futurs films d'horreur. A mes heures perdues, j'ai d'ailleurs d'ores et déjà composé de la musique de film d'horreur.
MI. Outre le nouvel album, un DVD est aussi en préparation, Gospel Of Gore. A quoi faut-il s'attendre ?
Killjoy. Après Through The Eyes Of The Dead, j'ai eu envie d'aller plus loin et de proposer ce qui peut se faire de plus extrême en matière de clips vidéos et je pense pouvoir dire que, dans l'ensemble, nous y sommes parvenus. C'est Jim Van Bebber, un bon ami à moi, qui s'est chargé de la réalisation : c'est un réalisateur talentueux, à qui l'on doit The Manson Family, mais aussi les courts Roadkill, My Sweet Satan.
MI. Que cherches-tu à provoquer chez celui/celle qui visionne ces vidéos ?
Killjoy. La musique, en général, est inoffensive. Une de mes grandes influences est Wendy O Williams (ndi : du groupe Punk THE PLASMATICS) : elle ne cherchait pas à choquer pour choquer, elle voulait déranger, en se masturbant avec une masse, en détruisant des voitures, en risquant sa propre vie pour faire ses vidéos. Notre objectif est de repousser les limites de ce que tu peux ou ne peux pas montrer.
MI. Aucun tabou donc ?
Killjoy. Non. A l'exception près, comme je te le disais tout à l'heure, que je tiens à rester dans le domaine de fiction ; en outre, qu'elle soit réelle ou simulée, je m'interdis toute représentation de cruauté sur un animal. Pour moi, un animal est ce qu'il y a de plus innocent, car il ne fonctionne qu'à l'instinct.
MI. Nous voilà arrivés à ma dernière question, à laquelle ne te sens pas obligé de répondre. Penses-tu que Rob Zombie est meilleur musicien ou meilleur réalisateur ?
Killjoy. Meilleur musicien. Ne te méprends pas sur ce que je dis : je n'ai rien contre Rob Zombie, c'est quelqu'un que j'apprécie. Mais je ne suis vraiment pas partisan des remakes : pourquoi refaire quelque chose qui a été fait ? Nous avons déjà Quentin Tarantino qui repique les idées des autres, nous n'avons pas besoin d'un autre réalisateur qui nous propose du réchauffé. Cela ne veut pas dire que certains films ne gagneraient pas à être refaits, avec un budget plus important et un meilleur développement de l'histoire. Mais ce n'est définitivement pas le cas pour Massacre à la tronçonneuse, La colline a des yeux ou Halloween.
MI. Pour la dédicace, plutôt que le traditionnel CD, je te demanderai de choisir entre deux DVD que j'ai amené avec moi : Le jour des morts-vivants de Romero ou Frayeurs de Fulci ?
Killjoy. Mon choix est déjà tout fait. Je ne suis pas fan de Romero : j'aime La nuit des morts-vivants et Martin mais ses suites ne m'ont pas convaincu et ça n'a fait qu'empirer depuis, il associe son nom à tout et n'importe quoi...
Ajouté : Mardi 19 Mars 2013 Intervieweur : Le Comte De La Crypte Lien en relation: Necrophagia Website Hits: 13257
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