ANOREXIA NERVOSA (FRA) - Mr Hreidmarr (Nov-2002)
En cette soirée d'Halloween, l'affiche de ce concert revêtait un intérêt particulier car quelques mois plus tôt et pour d'obscures raisons, le promoteur avait décidé de retirer certains groupes de l'affiche dont Anorexia Nervosa. Ce soir, le groupe est bien présent, donnant ainsi l'occasion à Metal-Impact de poser des questions sur le passé du groupe mais surtout sur son avenir. C'est le sieur Hreidmarr qui s'y colle et l'on ne peut pas dire qu'il soit avare en parole.
Line-up : Maître Stefan Bayle (guitars), Pier Couquet (basse), Nilcas Vant (batterie), Mr. Xort (keyboards), Mr. Hreidmarr (chant)
Discographie : Exile (1997), Sodomizing The Archedangel (1999), Drudenhaus (2000), New Obscurantis Order (2001)
Metal-Impact. "New Osbcurantis Order" est sorti voici quelques mois, quel regard portez-vous dessus avec le recul ?
Mr. Hreidmarr. Nous en sommes super content, je crois que c'est la première fois que cela nous arrive. D'habitude, la satisfaction n'est pas toujours au rendez-vous, avec le recul tu trouves des choses à modifier, des détails à revoir. Cette fois ci, nous avons passé pas mal de temps sur l'album afin d'obtenir un produit qui nous satisfasses pleinement. Nous sommes contents du résultat, bien sur cela ne peut jamais être parfait, c'est ce qui pousse à refaire un autre album, c'est toujours rechercher le coté ultime, la perfection.
MI. Combien de temps avez-vous passé sur "New Obscurantis Order" ?
Mr. Hreidmarr. A le maquetter, quasiment un an car nous faisons pas mal de boulot de pré-production. Stéphane (le guitariste) commence à jeter les bases des morceaux, ensuite on retravaille sur les arrangements, après nous réfléchissons aux parties de chants. Une fois que tout cela est fait, on bosse les chansons tous ensemble, voire si elles tournent bien, si elles passeront en live. Nous aimons bien que les titres puissent être interprétés en concert, que cela ne soit pas uniquement de la branlette de studio [Rires]. Après, nous avons passé trois mois en studio pour l'enregistrement.
MI. Quels sont les sujets abordées dans les textes de "New Osbcurantis Order" ?
Mr. Hreidmarr. Les sujets tournent toujours autour des mêmes thèmes mais nous n'y réfléchissons pas vraiment. Nous essayons de rester assez spontané, cela se rapporte à des choses proches de nous, que nous avons vécu, avec bien sur nos influences quelles soient littéraires ou autre. Après, les thèmes varient en fonction de toutes les périodes que nous avons pu traverser pendant la création de l'album. Par exemple sur "Drudenhaus", c'était quelques choses de plus hystérique, qui partait dans tous les sens. Sur "New Obscurantis Order", c'est plus concentré, il y avait une ligne directrice sans que cela soit un album conceptuel, tous les textes ont été écrits sur une période beaucoup plus courte. C'est plus cohérent, l'ensemble suit un cheminement.
Au niveau des textes, "New Obscurantis Order", est assez nombriliste. C'est des questions que je peux me poser, toutes sortes de réflexions sur le monde, sur tout ce qui m'entoure. J'essaye toujours de faire un travail de réflexions dessus, d'apporter quelques choses.
Cet album parle de trahison, de la condition humaine et à un certain égard de la dépasser même si pertinemment que c'est impossible. En fait, le thème principal c'est vraiment cette lutte entre l'aspect charnel de l'humain, le coté prison de cette condition et une volonté de la dépasser, une volonté absolu. Il y a aussi des choses très critiques par rapport au monde qui nous entoure, par rapport à notre société. Il y a un coté très cynique mais l'ensemble reste très vague. J'écris un peu comme de l'écriture automatique, je ne me pose pas de questions.
MI. La pochette de "New Osbcurantis Order" est un peu dans l'esprit de celle de Scorpions "Virgin Killer", elle semble avoir fait couler pas mal d'encre, y avait-il volonté de choquer ?
Mr. Hreidmarr. Non, pas du tout, nous nous en sommes rendus compte après, à la vu des réactions qu'elle a suscité. Quand nous avons décidé d'utiliser cette pochette, cela nous a semblé naturel, nous ne nous sommes posé aucunes questions. On adorait la photo, on adore le photographe. Nous étions tous vraiment d'accord sur le fait que cela représentait bien l'album, que c'était vraiment la pochette qu'il fallait. Après, nous l'avons transmise au label qui n'a pas tiquer non plus. C'est après le départ des premières copies promotionnelles, des affiches que nous avons commencé à sentir un début de polémique. Pas mal de gens on fait des réflexions. Nous nous sommes rendu compte à ce moment là que cette photo pouvait être mal interprétée. Il n'y avait aucune volonté de choquer. Le coté que les gens ont vu, je veux bien le comprendre mais je pense que c'est une mauvaise interprétation. Je pense que l'interpréter de cette manière, c'est déjà avoir l'esprit mal placé [Rires].
Cela me rappelle un peu la mentalité américaine de censure et d'hypocrisie, avec des gens qui vont censurer tout et n'importe quoi sous des prétextes un peu bidon. Je pense qu'il faut faire la part des choses. A part ça, nous n'avons pas eu plus de problèmes si ce n'est un peu avec les affiches (Ndlr: les affiches reprennent la photo de la pochette), où dans certaines villes le maire a refusé qu'elles soient collées.
MI. On vous a souvent taxé d'opportunistes et de n'être qu'une pâle copie de Cradle Of Filth, que pense-tu de ces dires ?
Mr. Hreidmarr. C'est vrai, au début on nous l'a souvent dit. Maintenant, c'est un peu fini. Il y a longtemps que l'on ne nous a pas fait la réflexion. J'étais partagé sur la question, d'un coté il faut forcément passer par là pour un groupe qui débute. Il y a toujours quelqu'un, un journaliste, n'importe qui pour faire des comparaisons avec un autre groupe parce qu'il faut des points de repères. Je pense que tu es obligé de débuter dans l'ombre de quelqu'un, même si cela ne ressemble pas, il y a toujours des rapprochements qui vont être fait. Les gens ont besoin de cela. Pour nous, c'était Cradle Of Filth, des fois Dimmu Borgir. Après, je me suis dis que cela allait s'arrêter tout seul, qu'au bout d'un moment les gens nous verraient pour ce que nous sommes, pas pour un clone de Cradle Of Filth. C'est ce qui s'est passé, après je trouvais cela un peu stupide car nous avions une démarche complètement différente.
Pour moi, le seul point commun, c'est qu'au niveau du look, il y avait des petits parallèles. Pour la musique, c'était influences Black Metal assez rapide avec du synthé et des voix criardes, donc Cradle. Je trouve que c'est un peu facile de faire ce genre d'association. Je veux bien reconnaître que sur "Sodomozing The Archedangel", il y avait des choses qui pouvaient faire penser à Cradle mais sur "Drudenhaus" ou sur "New Obscurantis Order" rien ne rappelle les Anglais. J'ai commencé à ce moment là à dire stop.
MI. Si demain, tu colles un plan ternaire dans un morceau, les gens diront Dream Theater.
Mr. Hreidmarr. Oui, tout à fait. Après, on peut toujours trouver des ressemblances avec tout et n'importe quoi. D'un autre coté, c'est à nous de nous affirmer et montrer que nous ne sommes pas un groupe de seconde zone, où un clone de tel ou tel groupe. Je pense que nous y sommes bien arrivé et maintenant cela ne pose plus de problème. [Rires]
MI. Alors, quelles sont vos influences principales ?
Mr. Hreidmarr. C'est assez vaste, il y en a beaucoup quand je les citent. Certaines fois, les gens disent "Ah bon, ils font partis de vos influences". Nous aimons pas mal de vieux trucs Carcass, Entombed (surtout les vieux), Candlemass, ce genre de choses, des trucs old-school. Idem pour le gothique, des groupes anciens And Also The Trees, Joy Division...
Evidemment, il y a des choses plus modernes, nous avons été pas mal influencé par les premiers Emperor, surtout au niveau aspect grandiose de la musique, mais aussi la musique classique pour tous les aspects orchestraux. Je pense que cela reste essentiellement des trucs old-school.
Pour ceux-là, je ne sais pas vraiment si ce sont des influences mais nous sommes restés bloqués sur des vieux trucs genre Mötley Crüe, Metallica, car un album comme "Master Of Puppets" a compté pour tout le monde. C'est un album de référence.
MI. La littérature est-elle une source d'inspiration pour Anorexia Nervosa ? Quels sont vos auteurs préférés ?
Mr. Hreidmarr. Alors là, c'est un vaste sujet. Encore une fois, il n'y a pas trop de trucs moderne. A la limite, quelques auteurs contemporains que j'aime bien mais sans plus où alors je n'aime pas toute l'œuvre, genre Ionesco. En fait, j'ai du mal à en trouver des modernes.
Pour les autres auteurs, c'est toute le vague romantique du XIX ème, qui nous a vraiment marqué (Nerval, Lautréamont, Musset etc...) Maintenant, je trouve que cela fait cliché de citer des auteurs comme Beaudelaire, bien que pour moi, il reste une référence.
Sade a été un grand choc. J'étais aussi bien branché par des choses beaucoup plus anciennes comme les chansons de gestes et les textes du Moyen-Age en vieux français. Je m'intéressais aussi pas mal à tout ce qui avait trait au règne de Charlemagne, tous les Carolingiens en fait. Pour nous, la base, si vraiment cela se ressent, même si maintenant nous essayons d'aller plus loin, de faire quelques choses de plus personnelle, cela reste la vague du romantisme noire du XIX ème et du Début du XX ème.
MI. Il est peut-être un peu tôt pour en parler mais avez vous déjà mis des idées de cotés pour le prochain album ?
Mr. Hreidmarr. Oui, nous avons déjà commencé à bosser dessus, nous avons déjà quelques morceaux de maquettés. Ce que je peux te dire, c'est qu'il n'y auras pas de virage à 360°. A la vue des nouveaux titres, il sera plus lourd, plus puissant avec des riffs plus pesant. Ce sera toujours aussi rapide mais avec un coté plus posé au niveau des riffs. Pour l'ambiance, il sera plus emphatique que "New Obscurantis Order" et moins fermé sur lui-même. Il aura un coté plus rentre-dedans comme "Drudenhaus", tout en gardant une base bien posé comme sur "New Obscurantis Order" en accentuant le coté Heavy.
MI. Que pensez-vous de la scène black métal française ainsi que du métal en général ?
Mr. Hreidmarr. En France, il se passe des choses actuellement. Il y a quelques temps, je trouvais qu'il ne se passait rien et maintenant ça bouge de tous les cotés. Je trouve qu'il y a une certaine saturation de la scène. Nous nous faisions la réflexion avec Stéphane, nous avons l'impression que le niveau a baissé. C'est peut-être du au fait que trop de petit labels ont signé des groupes. Beaucoup d'albums sortent de nos jours qui ne sont même pas dignes d'une bonne démo qui sortait il y a quatre ou cinq ans. Nous ressentons une certaine perte de valeurs de ce coté là. Quand nous avons commencé même si ce n'est pas vieux, sortir un disque représentait une étape importante. Les groupes ne font même plus de démos, ils se forment, vont en studio et sortent un CD. Ils appellent ça un album et on nous le vends comme un album. Pour moi, les ¾ des groupes de blacks français que j'écoute, c'est des démos, il y en des bonnes mais on ne peut pas les qualifier d'albums. Cela dit, il y en a qui sont vraiment très bien.
MI. Est-il prévu une suite au premier album de Count Nosferatu Kommando ?
Mr. Hreidmarr. En fait, je ne sais pas. Nous avons des morceaux à l'état d'ébauche mais comme nous travaillons de manière assez chaotique, je ne peux rien avancer. Je suis très pris par Anorexia Nervosa et le guitariste fait des études sur Paris. Nous aimerions faire des concerts mais il faut réunir un groupe, ce n'est pas facile car cela pose des problèmes de planning, de logistique…
Dans l'immédiat, je ne peux rien confirmer, si c'est dans deux ou trois ans, c'est inutile que j'en parle. J'aimerais beaucoup donner un petit frère à "Ultraviolence", faire de la scène avec CNK. Maintenant trop de paramètres entre en compte donc je ne peux rien affirmer.
MI. Penses-tu que les webzines peuvent jouer un rôle dans la promotion du Metal ?
Mr. Hreidmarr. Oui, je pense car Internet s'est vraiment généralisé. L'émergence des webzines correspond aussi un peu au déclin des fanzines papiers. C'est plus facile de nos jours de se connecter à Internet, les mises à jour sont plus régulières, le coût de revient est moindre. D'un autre coté, c'est quelque chose que je regrette car j'aimais bien les bons vieux fanzines bien destroy [Rires]. Je surf assez souvent, je consulte les news, les infos, je me rends sur les forums, c'est très pratique.
Maintenant, je me pose une question sans avoir la réponse. J'ai constaté en traînant sur les forums ou sur les sites que ce n'était pas forcément les mêmes personnes, les habitués du Net que tu croises aux concerts. Il y a certainement des gens comme moi qui font les deux. D'un autre coté, je trouve qu'il y a tout un monde Internet avec ses codes, ses habitués. La question est donc "Est-ce que tous ces gens sur Internet vont se rendre aux concerts, acheter les albums, ne vont t-ils pas préférer le télécharger sur Kazaa ?" [Rires].
MI. Je te laisse le mot de la fin...
Mr. Hreidmarr. [Longue réflexion…] Putain sur le vif je ne sais jamais. Je vais être obliger de partir car mes deux meilleurs amis, Jack et Jim m'attendent (Ndlr: Jack Daniels et Jim Beam)…
Ajouté : Jeudi 05 Décembre 2002 Intervieweur : Lord Natas Lien en relation: Anorexia Nervosa Website Hits: 29143
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