BETRAYING THE MARTYRS (FRA) - Victor et Eddie (Fév-2010)
Raillés, méprisés, insultés… on ne peut pas dire que les BETRAYING THE MARTYRS laissent indifférent. Accusés d’être les créateurs d’une musique surfaite propulsée sur le devant de la scène par MySpace, d’arborer un look et une image définitivement hors du dress-code en cuir établi pour investir le cœur des puristes et de diffuser un message de paix et d’amour sur un son violent, nos amis font actuellement un sérieux buzz. Victor et Eddie sont revenus pour Metal-Impact sur ce succès nouveau sur les critiques et sur la création de leur premier EP avec une grande sagesse. Entretien.
Line-up : Eddie (chant), Victor (chant et claviers), Fabien (guitare), Baptiste (guitare), Valentin (basse), Antoine (batterie)
Discographie : The Hurt, The Divine, The Light (EP - 2009), Breathe In Life (Album - 2011)
M-I Interviews du groupe : Victor et Eddie (Fév-2010), Victor Guillet (Sept-2011), Aaron Matts (Juin-2013/ITW VIDEO)
Metal-Impact. Salutations messieurs. Je suis Stef. pour le webzine français Metal-Impact. Alors la première question qui me vient à l’esprit : BETRAYING THE MARTYRS est une toute jeune formation qui fait un gros buzz actuellement. Tout cela à dû être très soudain non ? Comment vous gérez chacun des emplois du temps qui se remplissent si vite ?
Victor. Salut Stef ! Eh bien en effet, c'est pas évident ! On a tous une vie à coté. Une grande partie travaille, l'autre fait encore des études... on a tous des vies de fous ! On donne tout ce qu'on peut pour gérer le groupe, composer, répéter 3 fois par semaine le soir après le taf, organiser des concerts, faire de beaux visuels pour être à la hauteur de ce nouveau succès qu'on a eu la chance d'avoir et l’exploiter un maximum afin de pousser le truc le plus loin possible. C'est un tout nouveau groupe, il y’a encore tout à faire, et c'est beaucoup de travail !
MI. Vous êtes catalogués ici et là comme un groupe labellisé « MySpace ». Dans le fond, c’est assez peu flatteur alors est-ce que vous acceptez d’être ainsi « rangé dans une petite boîte » ou au contraire, vous réfutez cette appartenance ?
Victor. Je pense que tous les groupes de cette nouvelle scène sont des groupes « MySpace » au commencement. Faire de belles photos, un MySpace qui envoie et balancer un mp3 enregistré dans la cave de papa ou dans la chambre d’un pote étudiant en école de son, tout le monde peut le faire. Tu n’es plus un groupe « MySpace » a partir du moment où tu créés un CD complet, que tu fais l'effort d’aller dans un vrai studio pour faire quelque chose de qualité, que tu es distribué, que tu te bouges le cul pour tourner un maximum et manger de la scène...
MI. Vous arborez quasiment tous les clichés de la scène « core ». Vous êtes jeunes, vous êtes beaux, vous êtes pour certains tatoués et percés, vous avez tous une image moderne et dynamique. Comment vous parvenez à encaisser les nombreuses critiques des « puristes » qui ne cautionnent pas toujours de faire du Metal et d’avoir une esthétique « in ».
Victor. Ça ne nous atteint pas du tout. On a l'habitude. Eddie avait déjà vécu ça avec DARKNESS DYNAMITE, moi avec THE BEVERLY SECRET. On comprend les mecs qui sont true Metal et qui galèrent à faire du Black Metal underground depuis des années sans avoir eu un succès extraordinaire… je comprends qu'on puisse être tout ce qu'ils rejettent et que ça énerve, un groupe de petits minets qui en 6 mois a un succès comme le notre... Mais c'est tout de même dommage qu'il n'y ai pas au moins du respect…
MI. Alors vous avez aussi une particularité, celle de combiner une musique très dure avec des paroles profondément positives et chrétiennes. J’imagine que là encore, ça vous a valu pas mal de critiques…
Victor. Pas tellement. C'est surtout sur notre look ou sur notre musique "à la mode" que l'on se fait critiquer. Le fait de défendre un message positif était très important pour nous, le soutien d'association, etc… Et je ne vois pas trop en quoi c'est critiquable... Après, le côté chrétien c'est très nouveau pour la France. Je suis d'ailleurs étonné que ça ai fait un tel buzz autour de ça. Pour moi qui baigne dans cette scène depuis des années, ça me paraissait naturel, je ne me rendais pas compte à quel point c'était nouveau en France.
MI. Personnellement, j’ai été très touché par votre travail pour plusieurs raisons. Je suis raide dingue de Deathcore qui est le seul style dont je ne me lasse pas. J’ai également reçu une éducation chrétienne auquel je me tiens encore aujourd’hui et pour finir je cherchais depuis longtemps une alternative valable aux formations de Deathcore américaines et à THE DEVIL WEARS PRADA. Nombreux sont ceux qui sont dans la même situation que moi. C’était important pour vous de répondre à ces diverses attentes du public ?
Victor. Dans un sens oui, on a surtout fait de la musique qui nous plaisait a tous… un mélange de nos influences avec un message qui nous correspondait. Ça à donné BETRAYING THE MARTYRS. Après si le public nous voit comme les dignes représentants de cette scène ricaine, ici en France, tant mieux ! C'est vrai que tout ces groupes restent nos principales influences.
MI. Je vais maintenant faire l’éloge de votre EP. Ma première réaction quand j’ai vu sa sortie : « enfin ! ». Beaucoup de monde attendait cet évènement. Ça vous a mis une pression supplémentaire ?
Victor. C'est certain ! Eddie et moi avions déjà acquis une petite notoriété avec nos anciens groupes. En montant un groupe tous les deux, on savait qu'on nous attendait au tournant. C'est pour ça que derrière, on s'est entouré de musiciens extrêmement bons et qu'on s'est investi comme jamais. Il fallait qu'on soit à la hauteur et qu'on ne déçoive pas.
MI. Justement, comment s’est déroulé le travail de composition ? Il y’a beaucoup d’influences diverses et variées alors comment on peut aussi brillamment caler des textes chrétiens sur des riffs Black qui sont deux choses totalement opposées ?
Victor. Un jour, on nous a catalogués comme faisant du White Metal et j'ai trouvé ça assez représentatif même si je ne suis pas trop pour les étiquettes. Les compositions se sont vraiment faites toutes seules, en repères, tous ensemble, chacun proposant ses idées. Il y’a eu tout de suite une alchimie et c'est allé très vite ! Le 1er morceau fut enregistré en janvier. On a composé le reste du CD en seulement deux mois, et nous sommes entrés en studio en avril pour enregistrer tout ça.
MI. On retrouve un vrai pro à l’enregistrement avec Stéphane Buriez aux manettes. Comment et dans quel esprit s’est déroulé la collaboration avec lui ?
Victor. Très bien. Il nous a très vite compris, il était très confiant vis-à-vis du projet et nous a beaucoup aidé. Il a su vraiment capter toutes nos attentes sur ce CD. Il a été très perfectionniste, n'a pas hésité à nous refaire enregistrer toutes les guitares parce qu'il n'était pas satisfait du son... C'était une très bonne expérience.
MI. Stéphane avait déclaré dans une récente interview pour Metal-Impact n’avoir aucune envie d’inclure des éléments Electro dans LOUDBLAST car je cite « LOUDBLAST c’est guitare, basse, batterie et chant ». Alors en studio, y’a-t-il encore des traces de cet esprit carré ou au contraire, a-t-il été vraiment réceptif à vos demandes ?
Victor. Bien au contraire. Pour nous, toute la partie synthé / orchestration / atmosphérique était très importante. On a pris beaucoup de temps au mixage là-dessus et Stéphane proposait beaucoup d'idées. Il connaissait nos influences et voyait très bien où on voulait en venir.
MI. On retrouve beaucoup de Black dans vos compositions, je pense à l’intro de « Out Of Egypt » qui sonne très « borgienne ». Techniquement, vous préférez l’appellation de « Christian Metal » mais avouez que vous pourriez aussi être classés dans la mouvance « Unblack Metal » non ?
Victor. Bien sur. Si nos paroles parlaient de Satan, de suicide, d'alcool et de sexe, certains passages ne changeraient pas tellement. Ce sont les paroles, l'image et le message qu'on fait passer à travers la musique qui la rend positive et qui fait que c'est du Christiancore.
MI. « Sortie d’Egypte », « Etre ton serviteur », ce sont des idées présentes dans l’Exode. Y’a-t-il un concept derrière cet album ?
Victor. Bien sur. Cet EP raconte l'histoire d'Abraham, un des premiers protagonistes de la Bible. Les paroles sont directement tirées et réadaptées de certains passage de la Bible et chaque chanson correspond à un épisode de la vie d'Abraham.
MI. Eddie, ton expérience au sein de DARKNESS DYNAMITE t’a t’elle influencée au moment de monter BETRAYING THE MARTYRS ou avais-tu déjà un projet solide et concret ?
Eddie. Oui, bien sûr. Mon expérience au sein de DARKNESS DYNAMITE m'a beaucoup influencé en remontant un groupe, tout comme une expérience professionnelle ou de la vie de tous les jours peut te faire évoluer. J'ai appris à composer avec un groupe, à savoir où aller en commençant une composition et à travailler mon chant sans m'éparpiller. Je travaille toujours là-dessus mais en montant BETRAYING THE MARTYRS, je savais où je voulais aller.
MI. Pourquoi avoir choisi de sortir un EP pour premier enregistrement ?
Victor. Un album, c'est beaucoup d'investissement, de temps et d’argent. Pour un premier CD, nous voulions sortir quelque chose vite afin de pouvoir tourner, faire des concerts, commencer à faire du buzz et faire parler de nous avant de sortir un album complet. C’est un nouveau concept que nous voulions lancer en France et nous voulions prendre la température avant de nous jeter à l'eau avec un full-lenght.
MI. Eddie, la gamme de chant est très variée. Un vrai travail à été effectué en amont de DARKNESS DYNAMITE pour proposer un équilibre cohérent entre chant clair et Death growls. Alors comment on arrive à trouver le juste milieu entre les deux ?
Eddie. On essaye juste de ne pas trop en faire. L'album sera assez différent de l’EP au niveau des chants. Je trouve petit à petit mon flow et mon style de chant, beaucoup moins cliché que du chant Black et Death et qui fait une grosse partie du style Deathcore. On veut juste évoluer sans renier une étiquette. On fait de la musique et on se fait plaisir en évoluant. Il en sera pareil pour ma voix qui reste un instrument au même titre que les guitares ou autres…
MI. Les breakdowns violents, la variété dans les vocaux, les riffs techniques, l’image véhiculée par le groupe : il serait idiot de ne pas vous répertorier dans la catégorie « Deathcore ». Quel est ta vision de cette scène en France ?
Victor. C'est une scène qui est arrivée bien trop tard et qui a évolué avec une trop grande différence entre les pays. A l'époque de DARKNESS DYNAMITE et de THE BEVERLY SECRET, début 2006, c'était vraiment l'explosion au Royaume-Uni. Même les Etats-Unis n'avaient pas vraiment de groupe de cette jeune scène Metal issue de l'Emo. Cette scène se déplace petit à petit dans d'autres pays, soit pour remplacer un autre style, soit pour évoluer. La France a beaucoup de retard là-dessus mais c'est super de voir de jeunes formations arriver aux quatre coins de la France. On montre que la musique extrême est tout de même présente.
MI. Par ailleurs, écoutes-tu beaucoup de Deathcore ? Si oui, quels sont tes formations favorites ? Si non, qu’est ce qui tourne le plus sur ta chaîne actuellement ?
Victor. Non, je n'écoute pas beaucoup de Deathcore ou groupes de Metal. Les gens sont généralement assez surpris de savoir ce que j'écoute. Ecouter d'autres styles me permet d'avoir une oreille fraîche et de composer des lignes de chant beaucoup plus abouties sur l'album avec mon flow et ma voix qui sera moins cliché ou semblable aux autres groupes à qui on est assimilés. En ce moment j'écoute beaucoup TAYLOR SWIFT, AU REVOIR SIMONE, KANYE WEST, GOERGE STRAIT, JAY-Z et INNERPARTYSYSTEM.
MI. J’ai ouï dire que Ferret Music (THE DEVIL WEARS PRADA, ZAO, LOVEHATEHERO, CHIMAIRA) vous faisait du pied ? Vous seriez intéressés par une signature sur un label aussi réputé et qui a eu beaucoup de grands groupes de Deathcore/Hardcore sous son commandement ?
Victor. C'est compliqué mais oui, on a eu des retours de pas mal de gros labels et autres nous concernant mais les labels attendent plus qu'un simple EP 5 titres et une dizaine de concerts à l'actif d'un groupe avant de se lancer dans une signature, surtout dans une période de crise, où manager un groupe venu d'Europe n'est pas évident et que les formations de notre genre ne durent pas très longtemps… ce qui est pénible au niveau des labels et de l’argent investi pour des promos à travers plusieurs pays…
MI. On va maintenant passer à la partie « spirituelle » de l’interview. D’ailleurs, ça me fais plaisir car je n’ai pas souvent l’occasion de parler avec des artistes engagés ou connaisseurs sur ce point. Quelle est la position religieuse et la confession des membres de BETRAYING THE MARTYRS ?
Victor. Partager quelque choses de fort et de sincère sans se soucier du reste, faire les choses pour nous avec passion.
MI. Es-tu un chrétien pratiquant ? Par quels gestes du quotidien exprimes-tu ton appartenance religieuse et quelle est ta relation avec Dieu ?
Victor. Tous les matins je remercie Dieu à voix haute en me levant pour le courage qu'il va me donner en cette nouvelle journée et le soir, je lis un passage de la Bible avant de dormir et prie pour ma famille et mes proches. J'essaye d'aller au moins une fois par semaine à l'église pour me ressourcer.
MI. La mode actuelle est à l’athéisme. Hélas, peu de gens sont vraiment athées, la majorité est plutôt « indifférente ». C’est souvent un choix par défaut motivé par le manque d’informations au niveau religieux. Partages-tu ce point de vue et si oui, qui est responsable de cet état des lieux.
Victor. Je pense que c'est juste l'évolution de la vie. L'éducation et les mœurs changent, la religion est de plus en plus laissée de côté, les gens ne vont plus à l'église et les chrétiens sont trop extrêmes. C'est parfois un dialogue de sourds. La faute à qui ? Ma famille n'est pas croyante donc pas pratiquante et leur avoir annoncé du jour au lendemain que j'allais à l'église, que je lisais la Bible était pour eux le signe d'un détournement de ma personne au sein d'une secte. La religion est parfois mal comprise ou mal cernée dans les pays européens mais chacun peux suivre une voie différente selon son propre choix.
MI. Tu es croyant. Tu es jeune. Les JMJ (journées mondiales de la jeunesse), t’en penses quoi ?
Victor. C'est trop extrême et ça me fait peur tous ces gens réunis entre eux. Je ne vais pas à la messe le dimanche, je n'aime pas ce côté « fanatisme de groupe » mais je ne critique pas ceux qui le font. Ça me met juste mal à l'aise et je n'ai pas besoin d'être en groupe de gens inconnus pour partager mes bons sentiments, mes prières ou mes joies de vivre.
MI. Ce n’est pas trop dur de faire partager une telle philosophie de vie quand en face, on a des grands groupes de Black ou Death Metal vieux de plusieurs décennies qui prônent l’annihilation des chrétiens ? La balance semble déséquilibrée non ?
Victor. Je fais tout simplement ce que j'aime. Encore une fois, ce n'est pas parce que tu joues un style de musique précis que tes paroles doivent être forcement en accord avec la brutalité. Musique violente n'a jamais voulu dire paroles violentes pour moi. J’imagine très bien un groupe qui parlerait d'animaux ou de cuisine, raconterait une histoire… moi j'ai choisi un texte positif pour m'exprimer au sein de BETRAYING THE MARTYRS et je le revendique haut et fort sans peur de me faire taper sur les doigts.
MI. A l’heure où je rédige ce questionnaire, nous sommes le 25 décembre, jour de Noël. Que symbolise pour toi cette fête ? Fête religieuse, fête familiale ou fête commerciale ?
Victor. J'ai passé Noël tout seul… ma famille habite loin. Je suis allé à l'église prier pour mes proches et pour des choses positives en ce début d'année 2010. C'est surtout l'occasion pour moi de faire un bilan sur l'année écoulée et sur ce que j'ai appris.
MI. Envisagez-vous maintenant une tournée pour promouvoir l’EP ou pensez-vous déjà à la composition d’un LP ?
Victor. Les deux ! On ne s'accorde pas de répit (rires) ! On compose déjà l'album qu'on enregistrera cet été, afin qu'il sorte pour début 2011 et parallèlement, on part en tournée européenne début avril pendant deux semaines pour montrer un peu ce qu'on sait faire hors-frontières ! De plus, notre CD est maintenant distribué dans toute l'Europe donc on va promouvoir ça dans les pays où nous sommes distribué.
MI. Quel est votre rapport avec la scène ? Le public est-il réceptif à vos messages ?
Victor. Tout à fait. Le public nous suit beaucoup en concert. Les kids sont très réceptifs, on partage beaucoup. Au delà de ça, on reçoit souvent des mails de fans adolescents un peu perdus nous demandant conseil pour leurs problèmes personnels, nous remerciant d'être là, nous questionnant sur notre foi, ce que l'on prône, les attitudes à adopter. On est vraiment content de pouvoir aider des jeunes un peu perdus qui cherchent à se créer une identité. On essaye vraiment de proposer un nouveau modèle pour les kids qui écoutent du Metal et on est très content que ça se passe comme ça !
Ajouté : Mardi 09 Mars 2010 Intervieweur : Stef. Lien en relation: Betraying The Martyrs Website Hits: 17688
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