Qui ne connaît pas NEHEMAH de nos jours, grand groupe de Black Metal français dont le succès copieusement gagné en a fait un des fers de lance du renouveau du Black Metal hexagonal à l’orée des années 2000. Considérablement influencés par la scène scandinave du début des années 90, NEHEMAH souhaitait faire montre de ses prédispositions obscures et abandonner à la face du monde une ondée de noirceur. Pourtant, de 1992, date de formation de la bande de Corven, le chemin fut constamment semé d’embûches, avec comme seul bagage une démo sortie en 1995 Light of The Dead Star. L’an 2000 sera celui du renouveau du trio Black, avec un premier opus déclenchant une réaction enthousiaste unanime, bientôt suivie par un second opus Shadows From The Past… qui lui aussi allait faire parler de lui.
S’inscrivant dans la lignée des glorieux prédécesseurs nordiques (MAYHEM, BURZUM, BATHORY), Corven et ses sbires signent là un concept album consacré à de sombres créatures femelles issues de la mythologie ou simplement historiques. Pas étonnant de plus que le symbole du combo soit un corbeau alors que d’un point de vue visuel, le front cover, en totale adéquation avec le propos, explicite, est superbe, à la fois fantomatique et réaliste. Si le premier opus fut une réussite en France et en Europe, conquérant même les pays germaniques, ce second album étala toute la face obscure des compositions de NEHEMAH. Ces huit morceaux sont inquiétants et travaillés, dépouillés d’artifices mais remarquablement bâtis, titres majestueux, sombres, de glace comme en témoigne «The Thousand Tongues of Medusa» ou «Warlock», deux brûlots intemporels et cauchemardesques. Pas étonnant non plus de retrouver une spéciale dédicace à la scène scandinave des années 90 sous la forme du titre «Sonner Av Den Fimbulvetr», brûlot véloce, bestial et jouissif et pour le coup interprété en norvégien. La mystique et glaciale «Shadows From The Past…», hymne vespéral côtoyant la personnification de la Mort avec la sépulcrale «Selbmord», NEHEMAH sait tout faire, du Black violent, sans grâce, aux titres plus sublimés.
Les riffs, reconnaissables d’entre mille et notamment avec des lignes de basse grasses et froides, les passages acoustiques, les harmonies, le tout mixé à des blast beats défiant la vitesse du son font de ces titres des exemples même d’excellents titres de Black Metal pur jus. Quelques samples et effets parsemés ici et là (croassements de corbeaux, vent qui souffle sur les plaines désertiques d’Elysion, carillons lugubres) véhiculent l’ultime touche de noirceur à ces titres. Avec en prime une production sombre et obscure perpétrée par Ludovic Tournier (IMMORTAL, HYPOCRISY…), le trio marque là encore pus de points et montre en quelque sorte la voie à d’autres formations de Black, genre appréciée et respectée de par la France. Shadows From The Past ne souffre que de peu de défauts, infimes, cette œuvre noircie par les fumées nauséabondes et de souffre des Enfers ne pourra que déchaîner les passions parmi les hordes de fans de Black Metal.