Le Ferrailleur me paraît plus petit que jamais ce soir, effet d’optique dût au peu de personnes présente à cinq minutes seulement pourtant du début des festivités. Déjà les lumières se tamisent, les badauds que nous sommes se tournent instinctivement vers la scène et assistent à l’entrée des musiciens de SOROR DOLOROSA.

Je vois déjà des mines interrogatives se dessiner sur les visages et pour cause, moi-même je suis dubitative face au frontman arborant une allure androgyne et se mouvant dans des balancements autistiques tels un camé. Une intro, qui m’a paru une éternité, sème dans son sillage des parfums de THE CURE et dévoile enfin le chant de Christophe Guenot. Là, surprise, tous les a priori s’envolent, une voix et une vraie, réellement maîtrisée et originale, sortant de ce personnage sans aucun effort, tout naturellement. On ne verra pas le set passer tant les morceaux se suivent parfaitement nous offrant des prouesses vocales et un jeu pointu. Le batteur, que dire de plus sur lui que ce beau spectacle qu’il nous a mis dans la vue, l’intrépidité de ses mouvements, la frénésie de chaque battement. Que pouvons-nous attendre du reste de la soirée quand dès lors nous avons pu savourer un grand moment musical ? Et bien évidemment ceux qui sont en tête d’affiche, mais pour ne pas nous soulager de suite et je dirais même pour nous torturer un peu plus ce sont LES DISCRETS qui vont prendre place. Torture ? Pourquoi ? Parce que tout simplement c’est à un frère siamois d’ALCEST que nous allons avoir à faire. Sur les quatre protagonistes pas moins de trois sont issus d’ALCEST alors allons nous avoir juste un échauffement, une mise en bouche ? Musicalement je dirais que oui. Même gratte lointaine comme un écho au creux d’une forêt. De très beaux échelonnages guitaristiques installent le décor si familier du genre. Malheureusement si l’un d’eux aurait dû rester discret (justement) c’est bien Fursy Teyssier (chant). Dès les premières vibrations de ses cordes vocales c’est tout le public qui s’est crispé. D’une fausseté à pleurer, il l’aura été quasiment jusqu’à la fin malgré les signes de détresse qu’il aura prodigué à l’intention de la table de mixage. Et pour couronner le tout et puisque se sont d’ex-membres d’AMESŒURS ils vont nous faire un massacre en reprenant « Gas In Veins » en le clôturant sur un chant aux effets robotiques dévastateurs comme pour cacher l’imposture. Alors est-ce parce qu’il ne s’entendait pas dans les retours ou est-ce parce que les arrangements masquent finalement très bien les imperfections d’un homme qui assure bien davantage à la guitare ? Un énième live nous permettrait peut-être de répondre à cette question, mais par pitié pas tout de suite, la déception fut assez grande de voir de si beaux accords pitoyablement piétinés.

Cette fois on se dit que ça va aller, que l’on ne peut pas être déçu, c’est pour eux, moi en tout cas, que nous sommes venus. ALCEST, comme on pouvait s’y attendre va ouvrir son bal avec l’un des plus beaux morceaux (« Autre Temps ») de son nouvel album Les Voyages De L’Ame. Tout est intact, le son est propre, la mélodie agit comme sur l’album, rien ne semblait pouvoir entacher la prestation, mais ça c’était sans compter sur un chant inaudible. Rebelote encore un souci de balance. Quand bien même le jeu est parfait, le chant lui manque cruellement et ALCEST sans la voix de Neige (chant) c’est plus vraiment ALCEST. Alors certes on aura parfois des bribes de ses couplets poétiques mais que trop peu. Et puis il n’aura pas été la peine de s’attendre à un quelconque effort ailleurs, le monsieur gardera du début jusqu’à la fin une attitude détachée voire même désintéressée. Dommage tout de même, sais-tu combien ceux qui sont venus ce soir encensent les merveilles que vous faites.

En bref, je reste amère d’un côté par la froideur d’un frontman qui a pourtant de l’or dans les doigts et la voix mais agréablement surprise par un combo totalement inconnu jusqu’ici, pour le reste, inutile de s’étaler.