Y’a-t-il encore une problématique de la scène bruitiste en France ? Doit on encore douter du potentiel de nos groupes face à leurs homologues allemands ou américains ? Une ébauche de réponse a déjà été donnée par COMITY ou encore PSYOPUS, locomotives d’un renouveau expressif, petits frères avides d’indépendance et de reconnaissance. Le reste de l’énigme, c’est la forêt cachée par l’arbre. Une fois scié, la verdure respire et se montre sous ses plus beaux atours.
De cette végétation, DOWN TO EARTH est issu. 10 ans à traîner leurs guêtres sur les scènes de l’Hexagone ont apporté au combo de La Rochelle une envie, une qualité d’interprétation, une précision dans les attentes et l’exécution. En plus d’être des instrumentistes tout à fait compétents, ils se révèlent d’habiles compositeurs, toujours en quête de l’émotion parfaite pour l’instant, mais sans rien calculer, juste naturellement.
L’écoute de Room For The Three Of Us vous remettra en mémoire les noms de prédécesseurs connus, de DILLINGER à UNSANE, et même à l’occasion de passages atmosphériques, le souvenir des magiques MILK vous caressera l’épaule comme une brise.
Mais le vent souffle aussi pour détruire, et les DTE savent faire parler la poudre, comme sur « Hawaii Turbulent », ou « Relief », séismes contrôlés destinés à une frappe chirurgicale, qui ne fait mal que là ou c’est important. On pense aussi parfois à HELMET lorsque l’ensemble se veut carré, voire, si l’on m’autorise la comparaison, à un late HÜSKER DÜ/early SUGAR, pour la science de Bob MOULD à combiner mélodies pop et agression sonore. « Marmalade » évoque même le spectre de TOOL dans sa recherche d’ambiances feutrées et de violence latente. Les accélérations heurtées de « 00:05:00 » ont comme un air de FUGAZI, et même la voix semble sortie du gosier énervé de Ian MacKAYE. L’album se clôt sur la douce rêverie « Umbrella », ou le groupe de veut cajoleur, sur fond de solo presque jazzy.
DILLINGER ESCAPE PLAN, UNSANE, MILK, HELMET, HÜSKER DÜ, TOOL, FUGAZI, le tout dans la même chronique.
Et pourtant, lorsque le CD se termine, on sait qu’on a écouté un groupe à l’identité propre et forte.
Je vous souhaiterais bien bonne chance messieurs. Mais la chance n’a rien à voir là dedans.