"Harnessing Ruin" est le sixième brûlot d’Immolation. Il sera controversé notamment sur le choix du son mais cet album reste reconnaissable de leur style qui se peaufine de galette en galette. Entretien avec leur leader Ross Dolan qui nous parle donc de leur dernier album…

Line-up : Thomas Wilkinson (guitare), Robert Vigna (guitare), Ross Dolan (chant, basse), Craig Smilowski (batterie)

Dicographie : Dawn Of Possession (1991), "Stepping On Angels... Before Dawn" (1994), Here In After (1996), Failure For The Gods (1999), Close To A World Below (2000), Unholy Cult (2002), Harnessing Ruin (2005), Shadows In The Light (2007)

M-I Interviews du groupe : Robert Vigna (Déc-2002), Ross Dolan (Fév-2005), Tout le groupe (Juin-2007)


Metal-Impact. Avec le recul, comment percevez-vous "Unholy Cult" qui est pour moi votre album le plus malsain ?
Ross Dolan. "Unholy Cult" fut à son époque notre plus bel achèvement et un album dont nous sommes toujours extrêmement fiers. Il a totalement déterminé le parcours qui nous a mené où nous sommes et a réellement posé les bases pour le nouvel album "Harnessing Ruin" que ce soit musicalement ou textuellement. Nous avons beaucoup tourné pour le dernier enregistrement et nous espérons en faire autant pour le nouvel album également.

MI. Peut être que je me trompe mais sur "Unholy Cult", planait déjà l'ombre du 11 septembre et j'ai l'impression que c'est aussi un peu le cas sur ce nouvel album "Harnessing Ruin" ?
Ross. Tout à fait !!! Cet album a pris un tour différent car nous nous sommes éloignés des thèmes religieux et nous sommes plus concentrés sur ce qui se passe dans le monde à l’heure actuelle parce que c’est vraiment ce qui était dans l’esprit de tout le monde ; enfin, en tout cas des nôtres. Nous étions très motivés pour écrire sur le monde actuel et les nombreux mauvais côtés de ce que nous voyons tout autour de nous. Donc cet album est très actuel, très réel et je pense que c’est ce qui le rend bien plus sombre textuellement que n’importe lequel des albums d’Immolation. Ce qui s’est passé le 11 septembre restera toujours gravé dans nos âmes, surtout étant de New York, et c’est une échappatoire pour bon nombre d’émotions que nous refoulons au fond de nous et essayons de garder sous clé.

MI. Vous avez un peu réduit l'espace temps entre chaque sortie, est ce lié au fait que vous avez changé de label et que vous êtes satisfait du travail de Listenable ou à autre chose ?
Ross. Nous avons essayé de faire un effort conscient pour sortir nos albums de façon plus régulière et je pense que nous avons dans l’ensemble plutôt réussi. Nous voulons vraiment que les gens entendent parler de nous et nous ne voulons pas que nos fans attendent trop longtemps entre deux albums. Egalement, comme tu le mentionnais, comme notre situation au niveau des labels s’est améliorée en Europe comme aux USA avec Listenable et Olympic/Century Media, cela nous motive encore plus. Nous avons l’assurance que les labels sont 100% derrière nous et souhaite que le groupe réussisse et progresse.

MI. Parles nous un peu plus de cet album qui peu d'ailleurs surprendre par son son...
Ross. Cet album est vraiment notre plus bel effort. C’est le plus sombre, celui qui a le plus d’âme et d’émotions ; il est direct et va droit au but. C’est certainement le plus Heavy et le plus sale ; il représente vraiment Immolation à son plus haut niveau !!! Nous sommes très fiers et très satisfaits de chacun de ses aspects.

MI. Qu'avez vous voulu transmettre à travers "Harnessing Ruin" ?
Ross. Nous voulons exprimer tous les sentiments et les émotions que nous avons en nous concernant l’état du monde de nos jours. Et cela signifie sur chaque front, que ce soit en Europe, au Moyen-Orient ou en Asie. Je pense que nous sommes tous affectés de bien des manières par tous les événements qui déterminent notre futur ces quelques dernières années. Cela pèse parfois très lourd sur nous quand on prend le temps malgré notre agenda très chargé de penser à ce qui est en train de se passer et pourquoi. C’est très effrayant et nous voulons sortir tout cela à travers notre musique pour expliquer comment nous voyons les choses et ce que nous pensons être mauvais.

MI. Parles nous des mélodies et autres envolées guitaristiques (des solos quoi) qui ont pris une plus grande place sur ce disque...
Ross. Cet album est en effet assez chargé en guitare avec de nombreuses « couches » différentes, beaucoup de nuances. J’ai le sentiment que les solos de cet album sont les meilleures réalisations de Bob et je pense que dans l’ensemble, il y a un thème mélodique très sombre qui parcourt l’album, lui donnant un côté terrifiant et horrible. Quand nous avons réalisé ce disque nous avons fait attention à ce que chaque partie de guitare supplémentaire, chaque nuance ressorte bien dans le mix, nous ne voulions pas que rien se perde comme cela s’est déjà produit si souvent par le passé. Cette fois tout s’est déroulé parfaitement et c’est ce qui donne à l’album une autre dimension, son côté unique.

MI. Pourquoi avoir voulu faire un artwork différent et donc de vous séparer des services d'Andreas Marschall, l'illustrateur de tout vos albums ?
Ross. Nous avons simplement pensé qu’il était temps d’essayer quelque chose de nouveau . Puisque nous allions plus dans une direction différente au niveau des paroles, nous avons pensé que la couverture devait représenter cette nouvelle direction. Donc l’utilisation d’images digitales nous a semblé être la bonne façon de faire et Sven était notre homme. Il a fait du très bon travail et nous sommes extrêmement contents de son travail. Nous avons le sentiment que cela synthétise l’humeur et l’émotion du nouvel album. Andreas était un vrai classique pour nous et je pense qu’il a fait le design de quelques-unes des meilleures couvertures d’albums Metal. Il a déjà un vrai héritage avec nos cinq premiers albums.

MI. Peux-tu nous donner quelques détails ou anecdotes sur votre dernier vidéo clip "Harnessing Ruin" ?
Ross. C’était vraiment un processus intéressant. Le vidéo clip est meilleur que nous n’aurions pu l’espérer. Maurice de Low Life Media a fait un boulot fantastique et c’était génial de travailler de nouveau avec lui. On l’a fait en une journée de 10 heures dans un studio de répétition local. C’était une petite pièce et Bob a réussi à obtenir un éclairage de scène professionnel grâce à son travail ; il a vraiment donné à cette vidéo un aspect pro. Ensuite, nous avons simplement joué le morceau environ 20-30 fois d’affilée en filmant sous des angles différents, différents membres du groupe. C’était épuisant et très bizarre au début, pour être honnête. On avait l’impression de mimer la même chose pendant 10 heures ; très étrange pour nous mais génial au final. Le résultat est impec et nous pensons qu’il rend vraiment l’atmosphère de ce titre à la perfection.

MI. Un mot sur le DVD "Bringing down the world" sorti en 2004 et pourquoi l'avoir fait, etc ?
Ross. C’est entièrement l’idée de Listenable et nous avons adoré cette opportunité de faire enfin un DVD pour que les gens voient la véritable essence d’un concert d’Immolation sur un support vidéo professionnel. C’est un produit solide si l’on considère que c’était la première fois que nous faisions ça. Bien sûr, il y a certaines choses que nous ferons mieux la prochaine fois mais dans l’ensemble, c’est un très bon DVD pour chaque fan du groupe car il offre de bons concerts et des aspects très différents du groupe en live comme ailleurs.

MI. Pourquoi avoir décidé de rééditer votre album "Stepping On Angels... Before Dawn" et quelles seront les petits plus de cette sortie ?
Ross. Tout d’abord, il y a encore une demande à ce niveau. Les gens payent des sommes hors de proportion pour acquérir ce disque sur e-bay, nous avons donc décidé de ressortir ces démos avec d’autres matériaux pour que les gens puissent l’acheter à un prix raisonnable avec une bonne qualité. De plus, il y a beaucoup de nouveaux fans qui sont curieux d’entendre nos débuts. C’est une bonne chance de voir nos racines et la façon dont nous avons évolué.

MI. Un mot peut-être sur l'assassinat de Dimebag Darrel et sur le port d'arme ?
Ross. C’est particulièrement tragique et cela montre la scène Metal sous un mauvais jour. Ce qui est même plus effrayant est que nous avons joué dans cette même salle à de multiples occasions. Je ne préfère même pas penser à la possibilité que cela arrive à l’un d’entre nous. C’est très triste et je pense que chaque club doit prendre ce genre de menace plus au sérieux.

MI. Au USA, quelle image a la scène Metal française et son public ? La même que le sentiment général anti français ?
Ross. Je ne pense pas que le fan de Metal moyen ici réfléchisse beaucoup aux différentes scènes Metal de par le monde. Parfois les jeunes nous demandent de manière générale comment est la scène Metal en Europe et nous leur disons combien elle est géniale, surtout en France où nous pensons personnellement qu’elle est très forte et unie. Quant aux sentiments anti-français, je ne pense vraiment pas qu’ils soient évidents quant on en vient à parler musique, surtout Metal. Dans l’ensemble, cela ne reflète pas l’opinion de la majeure partie des USA, juste un petit pourcentage qui tend à se réduire depuis environ un an.

MI. Quelle est ta formation musicale ?
Ross. J’adore simplement les musiques de tout type depuis que je suis tout petit. Je n’ai jamais vraiment eu de formation musicale, j’ai appris tout seul et il se trouve que j’ai une très bonne oreille. Je pense que c’est vraiment cette passion qui me fait avancer.

MI. Que penses-tu de la "New Wave Of American Heavy Metal" ?
Ross. Je ne sais pas ce que tu entends par là, il faudrait que tu me donnes des exemples. Je sais que beaucoup de groupes de nos jours essaient de faire revivre ce bon vieux sentiment Thrash des années 80 et beaucoup de choses que j’entends n’ont pas d’atmosphère ni d’originalité mais ce n’est que mon opinion. C’est toujours du Metal et j’imagine que pour les jeunes qui n’ont jamais connu la première vague, ça doit être génial.

MI. Selon toi, les triggs sont-ils nécessaires dans le Metal ?
Ross. Seulement quand tu joues en live et seulement pour la grosse caisse. Ils font gagner du temps et tu obtiens le son exactement où tu en as besoin. Comme ça, tu peux passer plus de temps sur les tomes et d’autres instruments. Les triggers font qu’un joueur génial a l’air tout aussi génial mais ils font d’un joueur inconsistant un joueur encore plus terrible. On ne peut pas le cacher quand on en utilise, ils rendent tout audible. On ne jure que par eux en live, comme n’importe quel groupe de nos jours.

MI. Quelle est pour vous la meilleure chose, composer, enregistrer ou faire des concerts ?
Ross. Nous adorons les trois mais je dirais personnellement que je préfère les tournées. Jouer en live, c’est vraiment ce qui fait battre mon cœur. J’adore les concerts et je pense que c’est là que nous brillons le plus en tant que groupe.

MI. Quelle est la question à laquelle tu en as marre de répondre et quelle est celle à laquelle tu aimerais répondre (avec les réponses s'il te plaît) ?
Ross. J’en ai assez des ignorants et des questions hyper-critiques mais cela fait longtemps que je passe outre. J’ai oublié plus de choses sur le Metal que la plupart de ces gars pensent en savoir alors ne me faites pas une conférence sur quoi que ce soit. Nous vivons cela depuis plus de 17 ans, et vous, qu’avez-vous fait ? C’est ce que je dirais à ces mecs qui posent ce genre de questions.
Quant à la question que j’aimerais qu’on me pose, je pense que chaque question de cette interview était très bien, alors ils peuvent peut-être s’en servir comme modèle !!!

MI. Pour conclure, si tu as un message à faire passer, je te laisse tribune libre...
Ross. Merci beaucoup pour cette « killer interview ». Nous apprécions votre soutien et celui de tous les fans français de Metal, ils sont géniaux. Nous attendons avec impatience de revenir vous voir, de monter sur scène et tout mettre au feu !!! On vous souhaite plein de bonnes choses !!!