AMERICAN HARDCORE : Une Histoire Tribale (2010)
Auteur : Steven Blush
Traduction : Dom Franceschi
Langue : Français
Parution : 1er avril 2010
Maison d'édition Française : Camion Blanc
Nombre de pages : 738
Genre : Cri primal
Dimension : 15 x 21 cm
ISBN-10 : 2357790393
ISBN-13 : 9782357790391
Il y a des livres qu’on lit, et des livres qu’on vit. Il est toujours difficile de se laisser entraîner dans les méandres d’une épopée qu’on n’a pas vécue. On a bien sur la sensation d’en connaître les protagonistes aux travers de nos nombreuses et diverses pérégrinations musicales, mais l’odeur du sang, les montées d’adrénaline restent du domaine de la procuration, et la frustration engendrée par cette sensation d’être le témoin manqué d’une légende fabuleuse vous crispe l’estomac et vous fait amèrement regretter de ne pas être né quelques années plus tôt, et au bon endroit.
Sauf lorsque le narrateur vous procure ces mêmes sensations sans remonter le temps ni bouger de chez vous.
American Hardcore n’est pas un livre, c’est un journal, un fanzine ultime. Constitué en grande partie de témoignages des figures de la scène Hardcore de la fin des années 70 et du début des années 80, cet ouvrage se lit comme un carnet de bord. On retrouve bien sur au gré des pages les incontournables, les véritables icônes d’un style extrême, de Ian MacKaye à Bob Mould, en passant par Jello Biafra, Dr Know, Harley Flanagan et tant d’autres, mais aussi des personnalités plus obscures, parti prenante de la scène ou simples observateurs extérieurs.
Ceci confère de fait à l’ouvrage un style unique, quasi oral, instinctif, spontané, à l’image de la musique dont il nous narre l’histoire.
Née des cendres d’un Punk toujours plus stylisé et régit principalement par les diktats d’une pseudo mode « no future », le Hardcore se veut plus radical, plus politisé, plus outrancier, en un mot, plus organique. Cet anti-look dont se sont tellement réclamés les thrasheurs via leurs grands frères de METALLICA fut le fer de lance de quelques musiciens refusant le conformisme et la mentalité capitaliste de l’ère Reagan, et même avant.
MINOR THREAT, DEAD KENNEDY’S, BAD BRAINS, VERBAL ABUSE, TSOL, autant de noms qui résonnent encore dans nos têtes trente ans après…
Mais ce qui est proprement génial à propos de American Hardcore, découle du principe même de la narration. En laissant la parole à ceux qui ont fait la scène à cette époque, il nous offre en pâture toutes les contradictions qui ont agité cette époque, sans essayer de travestir la vérité et de la rendre plus « romantique ».
Car il n’y avait rien de romantique dans le Hardcore. C’était la vérité nue, l’agression au premier degré. La plupart du temps, les concerts étaient loin de se jouer à guichets fermés, et le plus souvent, les combos se retrouvaient devant une cinquantaine de péquins, autant là pour apprécier la musique que pour foutre le bordel. Les « tournées » n’avaient rien de glamour, et se retrouvaient la plupart du temps constituées d’une poignée de dates, plus symboliques qu’autre chose, entassés dans un van crade et à deux doigts de rendre l’âme…
L’affrontement permanent des trois scènes les plus influentes, Boston, Washington DC et New York en dit long sur « l’unité » qui unissait les groupes, et on comprend vite qu’à défaut de grande famille, la scène Hardcore était le plus souvent l’assemblage de divers petits noyaux durs, en constante évolution sur la corde raide pour obtenir le titre de véritable Hardcore warrior.
Ainsi, le fameux « Straight Edge » si bruyamment chanté par MINOR THREAT était aussi loin de faire l’unanimité…
Steven BLUSH, tourneur et organisateur de concerts était probablement un des mieux placés pour nous raconter cette histoire. Suffisamment impliqué pour avoir connu ça de près, mais avec le recul nécessaire pour rester objectif, il ne cherche à aucun moment à nous faire regretter de ne pas avoir été là. Son unique but est de nous présenter les faits, et de brosser le portrait de quelques individus ayant simplement cherché à s’exprimer, à matérialiser leur rage au travers de quelques titres et prestations rageuses.
Sans artifices, sans accoutrement tape à l’œil, sans glaçage pour faire oublier l’amertume.
American Hardcore est l’anti American Dream. Le no way of life ultime.
Et pas besoin d’avoir été la pour en ressentir encore les secousses.
Ajouté : Mardi 31 Août 2010 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Camion Blanc Website Hits: 100832
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